Avant le changement de taux d'intérêt, certains biens immobiliers ont fait l'objet d'une mise en garde particulière, car ils risquaient de subir de fortes baisses de prix. Maintenant que le changement de taux est intervenu, les prix de l'immobilier de rendement ont effectivement nettement baissé.
Dès lors, de nombreuses questions se posent: qu'adviendra-t-il des biens immobiliers qui ont été achetés ou construits pour générer un revenu via la location? A qui les baisses de prix actuelles font-elles le plus mal? Et les prix vont-ils encore baisser? Eléments de réponse.
Auparavant, pendant plus de deux décennies, les prix n'ont fait que grimper, année après année. Il y a eu un boom, comme le montrent les chiffres de la société de conseil Fahrländer Partner (FPRE). De 2000 à 2022, les prix ont plus que doublé en moyenne nationale, avec une hausse de 154%.
C'est bien plus que l'inflation moyenne enregistrée au cours de ces 22 années. Comme le montre l'indice des prix à la consommation, les prix des biens et des services n'ont augmenté en moyenne que de 11% durant cette période.
En 2023, le boom semble toucher à sa fin. Selon les chiffres provisoires de FPRE, les prix de l'immobilier de rendement baissent pour la première fois – et ce de manière significative. Par rapport au pic de 2022, on note une baisse de 10,3 %. Si l'on regarde de plus près, sur certains trimestres et dans certains cantons, les baisses de prix sont encore plus importantes.
Le pic des prix nationaux a été atteint au premier trimestre 2022. Comparés à ce niveau record, les prix du deuxième trimestre 2023 ont déjà connu une correction de 13,4%. Il s'agit de la moyenne nationale. Dans certains cantons, c'est nettement moins – ou plus. Les baisses les plus importantes sont enregistrées dans les deux Appenzell (17,6%) et à Obwald (17,3%), à Soleure (16,5%) et à Bâle-Campagne (16,1%).
Dans le dernier rapport de stabilité publié cet été, la BNS avertit:
En effet, les marchés immobiliers réagissent toujours avec un certain retard aux changements de taux d'intérêt.
Ces baisses de prix peuvent se faire en douceur, c'est-à-dire sans que les prix ne baissent significativement en termes nominaux. L'immobilier ne suivrait pas le renchérissement général de tous les biens et services, et perdrait ainsi de la valeur. Mais les vendeurs recevraient toujours à peu près le même prix nominal que celui qu'ils avaient payé lors de l'achat.
Cela peut aussi moins bien se passer – ou, comme le formule la BNS, s'accompagner de «corrections brusques et substantielles des prix nominaux». Les vendeurs verraient ainsi leur compte crédité d'une somme nettement inférieure à celle qu'ils ont déboursée. Ce risque existe pour tous les biens immobiliers, mais plus particulièrement pour les biens immobiliers de rendement résidentiels.
Dans ce segment, écrit la BNS:
Ainsi, les prix se sont particulièrement éloignés des «facteurs fondamentaux». Il s'agit par exemple du montant des loyers que rapporte un immeuble d'habitation. Actuellement, pour le même revenu locatif, on paie un prix d'achat beaucoup plus élevé que ce qui était la norme pendant de nombreuses années: 45% plus cher.
Et puis il y a les investisseurs commerciaux qui ont acheté des immeubles collectifs. Selon la BNS, l'expérience montre en effet que les défaillances de crédit sont plus rapides parmi eux que parmi les propriétaires privés.
Contrairement à ces derniers, les investisseurs commerciaux ne sont en effet pas responsables sur l'ensemble de leur patrimoine. Leur responsabilité est limitée, par exemple uniquement au capital-actions. Ainsi, toujours d'après la BNS:
Voilà les dangers qui nous guettent. Mais les baisses de prix opérées jusqu'à présent font-elles une vraie différence dans les porte-monnaie? Creusent-elles de gros trous dans les bilans? Le chef de la FPRE, Stefan Fahrländer, en doute.
Les prix ont certes baissé récemment, et ce de manière significative. Quatre années de hausse des prix ont ainsi été réduites à néant.
Mais cela signifie aussi que ceux qui ont acheté en 2018 ou avant feraient encore un bénéfice en cas de vente aujourd'hui. Les prix sont plus de 5% plus élevés qu'en 2018.
Ceux qui cherchaient à s'enrichir rapidement, par exemple en achetant en 2021 pour revendre en 2023, ont vu leurs projets contrariés par le changement de taux d'intérêt. Mais il est rare de faire une spéculation si hasardeuse.
La plupart des propriétaires vont ainsi probablement conserver leur bien immobilier longtemps, voire très longtemps. Ils font certes actuellement moins de bénéfices que s'ils avaient quitté le marché au pic de 2022, mais ils continuent à en faire.
Beaucoup de choses dépendent du maintien de cette situation. En Suisse, les banques ont bien plus de 1000 milliards de francs d'hypothèques en suspens. Certes, le total n'a que modérément augmenté ces derniers temps en comparaison historique. Mais les banques ont récemment accordé de nouvelles hypothèques aux sociétés immobilières à un rythme nettement plus élevé.
Les banques suisses ont prêté environ 15% de leurs crédits à des entreprises qui tirent leurs revenus de l'immobilier, comme l'écrit la BNS dans son rapport. Et de poursuivre:
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder