Economie
Suisse

Crise immobilière et hypothécaire en Suisse: l'analyse du Seco

The Swiss Capital Building in Bern
Montage: watson

La crise immobilière va-t-elle se propager à la Suisse? Berne répond

En Suède, les ventes d'urgence menacent, en Allemagne, les prix de l'immobilier chutent à une vitesse record, le Royaume-Uni vit un cauchemar. Mais qu'en est-il en Suisse?
08.07.2023, 07:4408.07.2023, 11:31
Niklaus Vontobel / ch media
Plus de «Economie»

Les signaux de crise se multiplient sur les marchés immobiliers étrangers. En Suède, des ventes d'urgence menacent déjà. Au Royaume-Uni, l'opposition politique se plaint d'un «film d'horreur hypothécaire». Dans un certain nombre de pays, les prix chutent aussi. En Allemagne plus rapidement que jamais.

Une bonne et une mauvaise nouvelle pour l'immobilier

Que se passe-t-il dans ces pays? Où se situe la Suisse par rapport à tout cela? Le Secrétariat d'Etat à l'économie (Seco) a récemment réévalué le risque de crise immobilière pour la Suisse. Bilan: une bonne et une mauvaise nouvelle.

Une crise s'installe et survient lorsque les prix ont particulièrement augmenté auparavant sur une période assez longue, lorsqu'il y a eu des exagérations. En Suisse, la hausse a été «très forte», écrit le Seco. Mais elle se situe encore «dans la moyenne». Par exemple, au Canada et aux Etats-Unis, les prix ont subi une hausse bien plus importante, tout comme en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Suède.

En fait, les prix de l'immobilier ont déjà nettement baissé dans ces pays. En Suisse, en revanche, il n'y a eu jusqu'à présent qu'une petite baisse. Les tarifs ont diminué de 1,2% au premier trimestre 2023. Cela vaut pour la moyenne nationale. Dans les zones rurales, les maisons individuelles ont déjà vu leur prix baisser de 4,5 pour cent.

Et les crises surviennent souvent lorsque les prix de l'immobilier se dissocient des revenus. Dans ce cas-là, même les ménages aux revenus très élevés ne trouvent plus de logement abordable.

Ce découplage existe aussi en Suisse, et selon le Seco, dans une mesure «plutôt supérieure à la moyenne» par rapport à l'étranger. Toujours est-il que la situation était encore pire lors de la bulle de la fin des années 1980. La Banque nationale suisse (BNS) a récemment estimé que l'immobilier était surévalué de 15 à 40 pour cent.

La vulnérabilité des pays dépend également de l'endettement privé. Les changements de taux d'intérêt se répercutent plus fortement sur le budget des ménages si ces taux sont élevés. Et dans ce domaine, la Suisse fait très mauvaise figure.

C'est surtout le poids des dettes hypothécaires qui est important dans notre pays. Mais la situation est en réalité plus complexe. Les dettes ne sont pas élevées parce que les ménages suisses ne peuvent pas les rembourser – ils ont l'argent pour le faire – mais ils les conservent parce qu'elles leur permettent de réduire leurs impôts. La Suisse est donc moins vulnérable qu'il n'y paraît.

L'apparition de crises dépend également du type d'hypothèques les plus répandues, selon le Seco. Lors des changements de taux, les hypothèques à taux variable sont risquées. Pour les hypothèques à court terme – d'un an ou moins – les coûts des intérêts peuvent prendre l'ascenseur en un temps record. Ici encore, la Suisse se situe dans la moyenne. En Allemagne, les ménages sont beaucoup plus nombreux à détenir des hypothèques à long terme, alors qu'ils sont beaucoup moins nombreux au Royaume-Uni ou en Suède.

Un seul facteur sera déterminant

Jusque-là, l'analyse n'a rien de très rassurant. Mais selon le Secrétariat d'Etat à l'économie, la Suisse a de nombreux arguments en sa faveur. Sa réglementation serait l'une des plus strictes au monde. Les ménages doivent par exemple apporter beaucoup de fonds propres pour obtenir une hypothèque. Et la population croît fortement, mais on construit peu - ce qui soutient les prix.

«Malgré tout, une correction des prix sur le marché immobilier n'est pas à exclure»
Secrétariat d'Etat à l'économie

Cela sera particulièrement vrai dans certaines régions ou dans des segments de marché précis comme les immeubles de rendement achetés pour être loués. C'est la mauvaise nouvelle.

La bonne nouvelle, c'est que:

«Dans l'ensemble, une crise immobilière marquée est peu probable»

En Suède, les prix sont presque en chute libre. Pourquoi une telle dégringolade? L'inflation a atteint 12%, alors qu'elle n'était que de 3,5% en Suisse. La Banque centrale suédoise a donc dû agir de manière beaucoup plus brutale. Son taux directeur est passé à 3,75%, alors que la BNS a pu le maintenir à 1,75% jusqu'à présent.

Ce revirement des taux d'intérêt a atteint les ménages suédois très rapidement. Dans ce pays, 40% de toutes les hypothèques ont des taux d'intérêt qui sont constamment ajustés. Jusqu'à présent, les prix ont chuté d'environ 20 pour cent.

C'est pour les bureaux et les surfaces de vente que la pression est la plus forte, rapporte Bloomberg. Les bailleurs ont des dettes de plus de 17 milliards de dollars qui arriveront à échéance dans les prochains mois. De nouveaux crédits ne sont disponibles qu'à des taux d'intérêt beaucoup plus élevés. Il pourrait donc y avoir des ventes d'urgence.

Hausse des taux d'intérêt à une vitesse record

Au Royaume-Uni, l'inflation s'est également envolée, atteignant parfois 11%, et a contraint la Bank of England à un changement de taux: de 0,1 à 5% en sept mois. Et comme en Suède, les ménages ont été rapidement touchés, car les hypothèques à taux variables sont très répandues. De nombreux ménages paient désormais des intérêts supérieurs à 5 pour cent.

A la clé: un «film d'horreur hypothécaire». Le trésorier Jeremy Hunt a évoqué une «crise hypothécaire croissante» et a convoqué les banques pour qu'elles fassent des concessions aux ménages. Quoi qu'il en soit, jusqu'à présent, les prix de l'immobilier ont baissé.

En Allemagne, il y a peu d'hypothèques à taux variable, beaucoup d'hypothèques à taux fixe sur de nombreuses années. Mais il y a également eu un changement brutal des taux d'intérêt. La Banque centrale européenne (BCE) est passée de 0 à 4% en un an seulement. Et il y a eu un tournant dans l'immobilier.

Auparavant, les prix étaient surévalués, de 15 à 40% selon la Banque fédérale allemande. Désormais, les maisons et les appartements sont moins chers: de 6,8% au premier trimestre 2023 par rapport à l'année précédente. Dans les statistiques officielles, qui remontent à l'an 2000, c'est un record.

Les ménages allemands ont donc certes des coûts d'intérêts qui augmentent moins que les ménages britanniques ou suédois, mais ils ont des maisons dont les prix baissent. Et cela peut faire mal si, de ce fait, l'hypothèque n'est plus suffisamment garantie et que la banque doit frapper à leur porte pour leur réclamer de l'argent.

Ces exemples le montrent: en Suisse, tout dépendra de la capacité de la BNS à maîtriser l'inflation sans devoir trop augmenter les taux d'intérêt.

Traduit et adapté de l'allemand par Anaïs Rey.

Voici la nouvelle maison des Bennifer (à 61 millions de $)
1 / 14
Voici la nouvelle maison des Bennifer (à 61 millions de $)
partager sur Facebookpartager sur X
Copin comme cochon: les radins
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
Trump met en péril l’économie des Etats-Unis et de la Suisse
Au départ, ce n’étaient que des droits de douane absurdes contre des îles peuplées de pingouins. Aujourd'hui, ce sont des rayons vides, des ports déserts et des portefeuilles vides. Le chaos politique de Donald Trump touche désormais le quotidien des Américains – et affecte aussi la Suisse.

La Bourse se trouve aujourd'hui dans une situation que l'économiste vedette Paul Krugman n'hésite pas à comparer à une personne piégée dans une relation abusive:

L’article