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Initiative 99%: Faut-il taxer les riches davantage pour redistribuer?

Face-face 99%
Geoffray Sirolli (jeune PLR) et David Raccaud (jeune PS) ne s'accordent pas sur la façon d'obtenir une société équitable.Image: Montage watson
Duel

Initiative 99%: Faut-il taxer les riches davantage pour redonner aux plus pauvres?

Les Jeunes socialistes suisses souhaitent redistribuer une partie de l'argent des plus riches à la classe moyenne. Leurs contemporains de droite, eux, ne l'entendent pas de cette oreille. Que le face-à-face watson commence.
11.08.2021, 05:5917.08.2021, 13:48
Jonas Follonier
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L'initiative «Alléger les impôts sur les salaires, imposer équitablement le capital», résumée sous le nom de «99%», n'est pas surnommée «initiative Robin des Bois» pour rien: il s'agit d'imposer 1,5 fois plus les revenus de capital les plus élevés (estimés à plus de 100 000 francs, un montant à préciser dans la loi) pour redistribuer cet argent aux Suisses ayant un niveau de vie plus modeste.

Cette redistribution devrait alors se faire sous forme d'allègement d'impôts ou de renforcement des services publics. Faut-il voir dans ce projet un plan de voleur, fût-il bienveillant, comme dans le cas du personnage fictif? C'est le cœur du débat.

Un revenu de capital, c'est quoi?
Il s'agit par définition d'un revenu provenant d'un capital, c'est-à-dire du patrimoine financier d'une personne physique ou morale (une entreprise). Celui-ci peut être une propriété immobilière (immeuble, appartement, maison...), un placement financier (actions, obligations...) ou encore une propriété intellectuelle (brevets, marques...). Les revenus de capital peuvent ainsi être, par exemple: des loyers versés par des locataires, des dividendes issus du bénéfice d'une entreprise dont on est actionnaire, des redevances de droits d'auteurs, etc.

Le 27 septembre prochain, la population suisse votera sur cet objet lancé par les Jeunes socialistes. Les jeunesses de droite et du centre, elles, se sont rassemblées en un front commun contre l'initiative. Place au face-à-face entre le jeune socialiste vaudois David Raccaud, 26 ans, étudiant et responsable du fundraising pour l'initiative 99%, et Geoffray Sirolli, 30 ans, maraîcher et conseiller municipal libéral-radical à Corsier (GE).

1. Etes-vous tous les deux favorables à l'idée de redistribution, mais aussi à celle de capitalisme pour que de la richesse soit créée?

David Raccaud: Non. Le capitalisme est le moteur de création des inégalités: la plus-value n'est pas redistribuée aux travailleuses et travailleurs. L’initiative 99% propose de mettre un terme à l’accroissement sans fin de ces inégalités, en redistribuant la plus-value à celles et ceux qui la créent.
Geoffray Sirolli: Bien sûr, l’un ne va pas sans l’autre. Il est impossible de redistribuer une richesse qui n’a pas été créée. Le tout est de savoir où placer le curseur. Pour ma part, solidarité et égalité des chances doivent pouvoir rimer avec liberté, innovation et efficience. L'initiative 99% ne suit pas cette logique libérale.

2. La Suisse redistribue-t-elle assez les richesses?

David Raccaud: Vraiment pas, non. Il suffit de voir l’écart entre les personnes les plus riches – ce fameux 1% – et les personnes les plus pauvres. Il n’est pas normal que les classes les plus défavorisées peinent à boucler leurs fins de mois et qu’autant de charges pèsent sur les classes moyennes. Il devient impératif que les grandes fortunes participent justement aux charges de la société.
Geoffray Sirolli: De mon point de vue, l’égalité des chances est le meilleur système de redistribution possible, dont la clef de voûte est la formation. La Suisse, notamment grâce à la qualité de son apprentissage et de sa formation continue, donne à toutes et à tous l’opportunité d’accéder à d’excellentes opportunités.

3. Les PME sont-elles concernées par l'initiative?

David Raccaud: L’initiative 99% n’entraînera aucune nouvelle charge sur les petites et moyennes entreprises (PME), puisqu’elle propose d’augmenter l’imposition sur les revenus du capital des personnes physiques. Les propriétaires de PME dépassent très rarement les 100 000.- CHF de revenu du capital.
Geoffray Sirolli: Oui. Cette initiative a été rédigée de façon extrêmement maladroite. Sous prétexte d’attaquer les 1% de contribuables les plus riches, elle attaque en réalité directement tous les entrepreneurs. Il est bon de rappeler que le patron d’une PME en est aussi bien souvent l’actionnaire. L'entrée en vigueur d'un tel texte impacterait également les ventes ou transmissions d’entreprises, notamment agricoles.

4. Ce texte met-il en danger l'attractivité de la Suisse? Certains s'alarment déjà après les récentes taxes pour les entreprises décidées par le G20 et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

David Raccaud: Non, il s’agit d’un argument-chantage des plus riches. Résumer l’attractivité de la Suisse aux avantages fiscaux qu’elle offre aux grandes fortunes et aux grandes entreprises est un non-sens. Son attractivité est bien plus liée à la qualité de vie, de l’éducation et des infrastructures, qui se verrait augmenter si l’initiative venait à être acceptée.
Geoffray Sirolli: Bien sûr que oui. Aujourd’hui, qui voudrait investir dans une start-up ou une entreprise suisse s’il sait qu’il va être taxé à 150%? Une acceptation de l'initiative rimerait avec des emplois créés ailleurs qu’en Suisse et une perte directe pour l’innovation.

5. Le texte de l'initiative est-il suffisamment précis? Ni le seuil imposable, ni la nature de la redistribution ne sont réglés.

David Raccaud: Oui, le texte de l’initiative fixe une nouvelle base de calcul pour les revenus du capital. Le seuil imposable et la nature de la redistribution seront définis ensuite par la loi, en fonction des besoins et des objectifs de l’Etat. Ce qui est cependant clair, c’est que l’augmentation des recettes fiscales de l’Etat profitera à l’ensemble de la population, et pas uniquement aux plus fortunés d’entre nous.
Geoffray Sirolli: Clairement non et c’est bien ce qui inquiète tant les milieux économiques. Les initiants utilisent le terme «revenu du capital» qui est extrêmement vague. Ni la constitution, ni la législation fiscale ne le définissent. Sans compter le seuil et l’utilisation de cette taxe qui demeurent obscurs. Ce sera un grand «NON» à cette initiative anti-entrepreneuriale et contreproductive.
Après cet article, êtes-vous pour ou contre l’initiative?
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