Isoler les personnes à risque pour relancer l'économie? Le débat est lancé.Image: Pixabay
Duel
Confiner les personnes à risque, une vraie bonne idée?
Plus de 250 000 signatures ont été récoltées pour la pétition qui veut isoler les personnes à risque. Objectif: arrêter le confinement. Les manifestants du samedi 20 mars étaient nombreux à le revendiquer. Que faut-il en penser? Deux Suisses en débattent.
L'option est tentante: isoler les personnes à risque pour permettre à la majorité de la société de reprendre ses activités et de retrouver une partie de ses libertés. Une pétition, «Stop the lockdown» («Arrêter le confinement»), avait été déposée à Berne il y a un mois. Ce samedi 20 mars, une part importante de la bonne centaine de Romands présents à la manifestation contre les mesures sanitaires voit d'un bon œil cette option. Mais est-elle réaliste? On en débat.
Dorith Zimmermann VS Peter Burri Follath
Dorith Zimmermann (à g.) et Peter Burri Follath (à d.)montage watson
Représentatifs des deux tendances qui s’opposent sur ce terrain, Dorith Zimmermann, docteure en épidémiologie et en biostatistique aujourd'hui à la retraite, et Peter Burri Follath, responsable communication et membre de la cellule de crise de Pro Senectute Suisse, répondent chacun à trois questions.
1. Soutenez-vous la pétition «Stop lockdown», déposée à Berne le 15 février 2021?
Dorith Zimmermann: Mon époux et moi l’avons signée. Mais j’ajoute immédiatement que le déconfinement partiel doit se faire avec prudence. Je suis d’accord avec EconomieSuisse, par exemple: il faut un plan de relance en étapes. Il reste que les personnes à risque sont prudents par nature: ils font attention au covid-19, mais aussi aux autres maladies. Nous responsabiliser serait une option réaliste et souhaitable, plutôt que de nous infantiliser.
Peter Burri Follath: Avec «Stop lockdown», on mêle deux choses qu’on ne devrait pas mêler: la santé de l'économie et celle des séniors. Ce que nous avons constaté avec cette crise, c'est que la politique ne peut pas gérer à elle seule la pandémie. Celle-ci a ses propres règles. Par contre, il faut des solutions politiques pour venir en aide à l’économie. Dans un pays confortable financièrement, il faut aider les personnes en détresse.
2. Quel regard portez-vous sur l'isolement social imposé aux résidents d'EMS?
Dorith Zimmermann: Cette détresse est réelle et il faut trouver des moyens (par exemple avec des vitres ou que sais-je) pour que l’interaction sociale soit quand même présente dans les EMS de la meilleure manière possible. Mais nous parlons quand même ici d’une petite minorité de la population. Bloquer toute la société pour une tranche d’âge avec à peu près six mois d’espérance de vie est injuste. Surtout que depuis le moment où j’ai publié ce courrier, en novembre 2020, une chose importante est arrivée: le vaccin. Il faut vacciner au plus vite toutes les personnes de plus de 65 ans et faire retrouver le maximum de libertés au maximum de gens. Cela ne va pas assez vite.
Peter Burri Follath: Il y a 1'600'000 personnes de plus de 65 ans en Suisse et, parmi eux, 60'000 vivent dans un EMS. La solitude n’est pas quelque chose d'inconnu pour cette génération: avec l'âge, on devient capable de vivre une certaine solitude car on en a l’habitude. Ce qui est demandé aux séniors vivant à la maison est de ne pas aller faire leurs achats eux-mêmes et de tenir les distances avec leurs familles. Dans les EMS, ils ne peuvent quasiment plus avoir de contact avec les autres résidents. Nous avons tenté d’inventer des alternatives, surtout numériques, à cette interaction sociale perdue. Nous devons tout faire pour que la dernière étape de leur vie soit la plus sociale possible.
3. L'équilibre a-t-il globalement été trouvé entre la protection des plus faibles et les intérêts de la majorité de la société?
Dorith Zimmermann: Non. Je pense à mes petits-enfants. Je suis attristée par cette idée de confiner tous les jeunes, les étudiants et les entrepreneurs pour des personnes qui peuvent s’auto-confiner et pour qui ça ne change pas dramatiquement la vie. On aurait pu donner beaucoup plus de liberté aux jeunes. Aujourd’hui, beaucoup d’entre eux dépriment et sont en faillite. En plus, c’est culpabilisant pour nous, les séniors, car nous avons l’impression que c’est de notre faute. Je préfèrerais qu’on nous responsabilise.
Peter Burri Follath: La pandémie n’est pas une question de générations ou d'intérêts. C’est une question sanitaire intergénérationnelle. Le vrai enjeu, à mon sens, est le suivant: être assez fort en tant que pays pour lutter contre tous les problèmes que rencontrent les personnes âgées, mais aussi en fin de compte toute la société. Parmi ces problèmes, il y a la pandémie, bien sûr, mais aussi la prévoyance vieillesse, typiquement. Si nous discutons de cela tous ensemble, nous pouvons trouver des solutions acceptables par tous.
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
«Votre voisine nue»: ces apps sont utilisées pour rançonner les Suisses
De nombreux jeunes Suisses sont victimes de chantage à l'aide de fausses photos denudées. Les auteurs sont organisés en bandes et choisissent leurs victimes de manière ciblée.
On dirait un scénario tout droit tiré d'un film érotique sordide des années 80: une simple pression sur un bouton et tous les vêtements disparaissent. Et pourtant, c'est une réalité depuis longtemps. Les applications et sites du type Nudify permettent, grâce à l'intelligence artificielle (IA), de transformer n'importe quel portrait inoffensif en photo dénudées. Et les résultats sont d'un réalisme effrayant.