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Les néonazis sont «partout» aux Etats-Unis

Christopher Pohlhaus est à la tête d'un nouveau groupuscule néo-nazi baptisé Blood Tribe.
Christopher Pohlhaus est à la tête d'un nouveau groupuscule néo-nazi baptisé Blood Tribe.getty

Les néonazis sont «partout» aux Etats-Unis

Samedi, le groupuscule Blood Tribe a secoué la quiétude d'Altamonte Springs, en Floride, avec une «Marche des chemises rouges». Des suprémacistes blancs qui peuvent ouvertement hisser Hitler en messie, grâce au sacro-saint premier amendement de la Constitution. Récit d'une montée en puissance.
05.09.2023, 06:0905.09.2023, 07:18
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Nous ne publierons pas l'une des innombrables vidéos de cette «Marche des chemises rouges». Des hommes blancs racistes et homophobes qui alignent saluts nazis et insultes antisémites en colonne par deux, on sait tous à quoi ça ressemble.

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Samedi à Altamonte Springs, un patelin de Floride de même pas 50 000 habitants, le groupuscule Blood Tribe (la tribu du sang) a déballé drapeaux, croix gammées et slogans nauséabonds, dans une atmosphère à couper au couteau.

Face à eux, quelques badauds et une poignée de journalistes ont assisté à ce qui ressemblait à une nazi-shower. En d'autres termes, cette petite sauterie en l'honneur d'Adolf Hitler n'avait pour unique but que d'accoucher officiellement d'un mouvement d'extrême droite relativement frais. Première constatation: même de violents néonazis peuvent avoir le trac. Le défilé, très propre, pas trop dense et plutôt maladroit, s'est lancé dans toutes les chorégraphies racistes et antisémites disponibles sur le marché, mais sans grande spontanéité.

Malgré des «Heil Hitler» hurlés comme à la funeste époque.

A quelques pas d'Orlando, entre les chants violents et les balades d'intimidation, les membres ont tour à tour voulu soutenir Joe Biden «parce qu'il envoie des armes à l'Ukraine» ou Ron DeSantis, gouverneur de Floride et candidat à la présidentielle, «pour rigoler». C'est confus. La seule information vérifiée étant le racisme, l'antisémitisme et le masculinisme qui coulent dans leurs veines.

Et à entendre leur leader...

«Ce n'est que le début. Nous sommes partout»
Christopher «Hammer» Pohlhaus, leader des Blood Tribe

Le début de quoi, Christopher? Rien de moins que la construction d'un «ethno-Etat blanc». Cet homme, ancien marine américain reconverti dans le tatouage et la haine de tout ce qui n'est pas blanc et masculin, a profité de la pandémie de Covid-19 pour étaler son idéologie et recruter des fidèles.

Le néo-nazi Christopher «Hammer» Pohlhaus.
Le néo-nazi Christopher «Hammer» Pohlhaus. getty

En 2020, notamment sur Telegram, il se fait ainsi connaître sous le pseudonyme «The Hammer» (le marteau) à la vitesse grand V. A son ceinturon, des slogans maison et des produits dérivés qui ne laissent aucune place à l'interprétation. De quoi renflouer les caisses et asseoir son nouveau leadership.

Une année plus tard, Pohlhaus déménage ses croix gammées dans le Maine, l'un des Etats les plus blancs des Etats-Unis. Il s'y offre alors quelques mètres carrés de terrain. Objectif: montrer un gigantesque camp d'entraînement dans la petite ville de Springfield, pour préparer son armée à «un dernier combat, une guerre juste».

«Faire du Maine un Etat nazi demanderait très, très peu d’efforts et nécessiterait un changement dans la mentalité et la démographie de l’Etat»
Christopher Pohlhaus, au média Vice US, en octobre 2022.

Pourtant, ce n'est qu'en janvier dernier que cette nouvelle troupe en rouge et noir se décide à sortir de la théorie, pour imposer à autrui sa pratique de la haine. Sans surprise, ce sont les mouvements LGBT+ qui s'y sont cassé les dents en premier, dans l'Ohio. Ce week-end, ce fut donc au tour de la Floride, avec le pont d'Altamonte Springs pour l'apéro, puis l'immense Disney World, embourbé depuis quelques temps dans une série de polémiques vaguement progressistes.

Bref, l'endroit idéal pour marquer le coup et attirer l'attention d'une poignée de médias. Christopher Pohlhaus n'était d'ailleurs pas tout seul à défroisser ses drapeaux de la honte. Une centaine de néonazis, en provenance de différents groupuscules existants, sont parvenus à se tenir les coudes pour dépasser les bornes.

Christopher Pohlhaus, dans son nouveau camping nazi du Maine, aux Etats-Unis.
Christopher Pohlhaus, dans son nouveau camping nazi du Maine, aux Etats-Unis.getty

A Springfield, depuis que le campement a fait pousser ses premières tentes, on tire la gueule. Les riverains ont peur et le sénateur du Maine Joe Baldacci avoue à Daily Beast qu'il a «un problème avec les nazis qui viennent établir un camp de style militaire». Mais Chris Polhaus compte bien former ses nouveaux apôtres, quitte à faire déménager des familles entières dans ce qu'il considère comme «les fondations de l'Etat blanc». Si on ignore comment les recrues sont «entraînées», quelques médias américains ont déjà levé un bout de voile sur le rite initiatique, qui consiste notamment à se couper volontairement un bout de chair avec l'épée du mouvement Blood Tribe.

Tout un programme.

Pour l'anecdote, fin juillet, le leader du mouvement a été banni de son fitness, à cause de ses T-shirts racistes et de sa croix gammée incrustée dans la peau. La direction de l'établissement précise qu'il agissait «comme un faucon». Sur les réseaux sociaux, Chris Pohlaus ne s'en cache pas, allant jusqu'à diffuser l'email de Planet Fitness.

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Selon toute vraisemblance, Blood Tribe aurait déjà dans ses rangs d'anciens combattants de retour d'Ukraine. Des néonazis incorporés dans le célèbre bataillon Azov, que Chris Pohlaus accueille désormais les bras ouverts, puisque déjà entraînés. Parmi eux, Kent «Boneface» McLellan, 33 ans, qui considère que les Américains sont très mal informés sur la guerre, car Poutine «n'est pas le dictateur» qu'on pense. «Boneface», sans surprise, était au rendez-vous, ce week-end à Orlando.

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Christopher Pohlaus, qui avait publiquement soutenu Kanye West dans son épisode d'adoration d'Hitler, n'a pas tout à fait tort lorsqu'il promet que «ce n'est que le début» et qu'ils sont partout. En 2022, selon un rapport de l'Anti-Defamation League, les Etats-Unis ont enregistré le plus grand nombre d'incidents antisémites depuis le début du recensement en 1979. Et les groupes se tracassent de moins en moins pour planquer leur véritable dessein.

A l'instar du groupuscule Blood Tribe ce week-end, un bon millier de mouvements affichent désormais ouvertement leur amour pour Adolf Hitler, leur haine contre les noirs et les juifs et leur volonté de transformer le pays en une «nation pure».

Ce qui peut paraître effrayant est en réalité protégé par le premier amendement de la Constitution, à savoir la liberté d'expression. Dans le pays de Martin Luther King, il est tout à fait possible de se trimballer avec des drapeaux nazis dans une volonté de prosélytisme, tant qu'une personne n'est pas spécifiquement visée par cette haine. Ce qui laisse le champ libre aux démonstrations de force que la Floride a connues samedi.

Avec une présidentielle qui s'annonce chaotique, l'Anti-Defamation League n'est pas très optimiste quant à un éventuel ralentissement des crimes racistes ou antisémites. Si aucun candidat n'a intérêt à tolérer publiquement le moindre mouvement néonazi, la terreur fait la une chaque semaine.

Fin août, encore en Floride, un suprémaciste blanc a ouvert le feu sur trois personnes noires dans un magasin de Jacksonville, avant de se suicider. Une «pourriture», selon les propos du gouverneur et candidat à la Maison-Blanche, Ron DeSantis.

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