Le week-end dernier, Luise, 12 ans, a été retrouvée morte poignardée dans une forêt en Allemagne, vidée de son sang. Les coupables, deux filles âgées respectivement de 12 et 13 ans, ont rapidement avoué leur crime. Le motif doit encore être identifié et l'hypothèse d'un acte de vengeance circule.
Fabian Ilg, directeur de la Prévention Suisse de la Criminalité (PSC), explique:
Il n'a pas connaissance d'un cas similaire d'une telle ampleur. Il suppose cependant que l'attaque mortelle au couteau n'est pas uniquement un acte commis sous le coup de l'émotion. «Il y a probablement eu une préparation mentale chez les filles qui ont commis le crime, une dispute peut-être et une planification de l'acte. Car le couteau a probablement été pris de la maison, sorti et finalement utilisé.»
Fabian Ilg souligne qu'il est difficile d'empêcher de tels actes, même s'ils restent rares. Cependant, des mesures de sensibilisation pourraient contribuer à la prévention.
S'ils remarquent effectivement de tels développements, les enseignants, camarades de classe ou parents doivent demander de l'aide le plus tôt possible. Il est important de sensibiliser les enfants et les adolescents à ce sujet, surtout à l'époque des discours haineux sur les réseaux sociaux et les conversations de groupe.
En collaboration avec les polices cantonales, la PSC planifie actuellement des mesures de prévention concrètes concernant les délits commis avec des couteaux. Car ceux-ci ne sont pas seulement en augmentation en Allemagne, mais aussi en Suisse. C'est ce qu'a montré une étude de l'année dernière menée par le sociologue Dirk Baier, directeur de l'Institut de la délinquance et de la prévention de la criminalité à la Haute école des sciences appliquées de Zurich (ZHAW).
Dirk Baier a en effet étudié l'augmentation de la criminalité chez les jeunes en Suisse. Celle-ci a progressé encore plus fortement chez les 10-14 ans que chez les 15-17 ans au cours des dernières années.
Les blessures corporelles graves et les vols ont particulièrement augmenté, et les délits commis de manière collective sont plus fréquents, constate le sociologue. De plus, l'augmentation de la violence chez les jeunes s'accompagne d'une utilisation croissante de couteaux.
Lors d'une enquête menée dans des écoles du canton de Zurich auprès de 2000 enfants et adolescents âgés de 12 à 24 ans, 5% ont déclaré avoir été menacés au moins une fois avec un couteau au cours des douze derniers mois. 20% des hommes interrogés ont en outre indiqué qu'ils portaient au moins de temps en temps un couteau sur eux; chez les participantes, ce chiffre était de 9%.
Selon Dirk Baier, une consommation plus élevée d'alcool et d'autres drogues s'accompagne d'un port de couteau plus fréquent. Les victimes de cyberharcèlement tendent également plus à s'armer d'un couteau. Selon l'étude, les personnes qui ont des amis qui ont souvent des couteaux sur eux sont aussi plus susceptibles d'en emporter un.
Mais même s'il s'agit d'attaques au couteau ou d'autres agressions, il est extrêmement rare que les jeunes, et encore plus les enfants, commettent un meurtre. C'est pourquoi il n'y a pas de connaissances solides pour expliquer ces terribles événements.
Alexander McCall Smith, professeur émérite de droit médical à l'université d'Edimbourg, et la pédopsychiatre Sula Wolff, ont néanmoins tenté de le faire dans un article publié dans le British Medical Journal. Selon eux, les enfants qui commettent des meurtres se ressemblent à certains égards. Ils sont tous déséquilibrés, ont un mauvais contrôle des impulsions, échouent à l'école et la courbent d'ailleurs souvent. La peur de la séparation, l'énurésie (le problème du pipi au lit) et la dépression semblent également être plus fréquentes chez les enfants qui commettent des meurtres.
De plus, ils connaissent souvent de graves problèmes familiaux: violence domestique, négligence, abus, consommation de drogues, dépression de la mère ou absence du père.
Mais comme le soulignent les psychologues David Shumaker et Ronald Prinz de l'Université de Caroline du Sud dans une autre étude, il est important de noter que «de nombreux, si ce n'est la plupart, des préadolescents exposés à la violence familiale, à une éducation insuffisante et à des adversités similaires, ne commettent pas de meurtre». Les conditions familiales difficiles peuvent donc favoriser le comportement meurtrier, mais n'expliquent pas pourquoi un enfant passe à l'acte.
Selon les chercheurs Alexander McCall Smith et Sula Wolff, les observations indiquent également que les enfants auteurs de meurtres s'en sortent bien avec des soins et un traitement psychiatrique appropriés, et ne récidivent pas plus tard dans leur vie.
Les deux jeunes filles allemandes qui ont tué Luise se trouvent actuellement en «zone protégée», a-t-on appris mardi 14 mars lors d'une conférence de presse. Comme elles ont moins de quatorze ans, elles ne peuvent pas être condamnées à une peine en Allemagne.
En Suisse, c'est différent: les enfants sont considérés comme conscients dès l'âge de dix ans et peuvent être tenus pour responsables du point de vue pénal. Le droit pénal des mineurs s'applique à eux. Celui-ci ne met pas l'accent sur la punition, mais sur la prévention. Il s'agit donc de faire changer les mentalités chez les délinquants.
Il existe différentes formes de sanctions. Il y a par exemple le travail dans des institutions sociales. Pour les moins de 15 ans, cette peine peut durer au maximum dix jours, pour les plus âgés jusqu'à trois mois. Des amendes ou une privation de liberté ne peuvent également être ordonnées qu'à partir de 15 ans.
Outre les punitions, il existe aussi des mesures éducatives. Cela consiste par exemple à aider les parents à éduquer leurs enfants ou à leur faire suivre un traitement ambulatoire ou hospitalier.