Du 15 au 16 novembre, l'Indonésie reçoit les 20 premières puissances économiques mondiales sur fond de crises d'envergure.
Le G20 est un forum intergouvernemental réunissant 19 pays, ainsi que l'Union européenne (UE), et des représentants des banques centrales. Le sommet a été créé en 1999, en marge du G7 de Washington. C'est à l'issue d'une crise financière majeure que les ministres des Finances du groupe des sept (l’Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, la France, l’Italie, le Japon et le Royaume-Uni) décident d’impliquer les pays émergents au sein de la gouvernance mondiale.
C'est l'Indonésie qui a exercé sa présidence du 1er décembre 2021 au 30 novembre 2022. Cette année, le forum se focalise sur la résilience sanitaire, dans le sillage de la pandémie du Covid 19 qui a immobilisé le monde pendant près deux ans. C'est pourquoi son mot d'ordre est: «Se rétablir ensemble, se rétablir plus solidement». Les axes mis à l'agenda de façon officielle sont:
Mais, en filigrane, l'équilibre des puissances et les questions liées à la paix internationale ont toute leur importance. En effet, la diplomatie bilatérale est facilitée par les arènes multilatérales, où des pays rivaux ont une opportunité de facto de maintenir un dialogue, sans la pression d'une rencontre exclusive.
Une évaluation fournie par la Banque mondiale et par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pointe du doigt un grave déficit de financement dans la lutte contre la pandémie du Covid 19 au cours des cinq prochaines années. Pas moins de 10,5 milliards de dollars américains manqueraient pour maintenir une gestion durable de la pandémie.
En conséquence, les leaders du G20 ont annoncé la création d'un fonds global de 1,4 milliard de dollars pour se préparer aux futures pandémies. Le fonds est destiné en particulier aux pays à revenus faibles ou intermédiaires.
Vingt pays se sont engagés à l'alimenter. Les Etats-Unis ont contribué pour un tiers à l'investissement, soit 450 millions de dollars. Les autres donateurs incluent la France, le Royaume-Uni, le Canada, l'Inde, la Chine, l'Australie et le Japon ainsi que plusieurs organisations philanthropiques telles que la Fondation Bill and Melinda Gates.
La somme est cependant contestée par le pays hôte, qui estime que 31 milliards de dollars seraient nécessaires. D'autres observateurs estiment quant à eux que l'accord vient un peu tard, et n'harmonise pas les modalités selon lesquelles chaque pays gère le virus, notamment la Chine, contestée à l'interne pour sa drastique politique «zéro Covid».
De son côté, la Suisse a salué l'initiative et a fait savoir qu'elle compte y participer. Comme l'explique la RTS, «le Conseil fédéral avait déjà décidé début novembre de soutenir le fonds de la Banque mondiale pour la prévention des pandémies à hauteur de deux millions de francs».
At the meeting of @g20org finance and health ministers in #Bali today, #BRUeliMaurer welcomed via videoconference the establishment of a pandemic preparedness fund and held out the prospect of a 🇨🇭 financial participation. @sif_sfi @BAG_OFSP_UFSP pic.twitter.com/Vx7eDBDJ9m
— EFD_DFF (@efd_dff) November 12, 2022
En septembre, l'Ukraine avait demandé l'exclusion de la Russie du G20, dans le sillage de frappes de drones kamikazes qui avaient terrorisé Kiev.
Si la présence de la Russie au sommet était au centre des spéculations pendant plusieurs semaines, Vladimir Poutine lui-même a trouvé une voie médiane: il ne viendra pas en personne. Pour nombre d'observateurs, l'issue est plutôt bénéfique; il s'agit de ne pas couper toute communication avec le belligérant, tout en maintenant une certaine pression. Comme l'explique Cédric Dupont, professeur de relations internationales au Graduate institute à Genève, au micro de la RTS:
Il est à noter que le G20 est avant tout un forum visant à réguler les mécanismes de coordination économique; il ne favorise pas la prise de position forte dans les affaires internationales. C'est ce qui le différencie du G7, qui réunit des puissances à la vision très similaire. C'est pourquoi le sommet de Bali permet à des rivaux tels que la Chine et les Etats-Unis de se côtoyer avec plus de décontraction.
Cependant, la crise en Ukraine a un impact économique d'envergure mondiale, qui entraîne des chocs généralisés des prix de l'alimentation et de l'énergie - sans compter les risques d'utilisation d'armes nucléaires. Le G20 a donc produit un projet de communiqué final, lequel précise que «la plupart des membres» «condamnent fermement» le conflit.
Ce dernier s'est d'ailleurs exprimé par visioconférence devant ce qu'il a appelé le «G19», excluant visiblement la Russie.
Zelensky a exigé le retrait des troupes russes du territoire ukrainien. Il a en outre appelé à ne tolérer «aucune excuse au chantage nucléaire» face aux «folles menaces» de Moscou, et à réaliser un échange total de prisonniers. Les conditions ont été jugées «irréalistes» par Sergueï Lavrov, qui est cependant resté dans la salle pendant le discours.
"Ukraine should not be offered to conclude compromises with its conscience, sovereignty, territory and independence.
— Anton Gerashchenko (@Gerashchenko_en) November 15, 2022
There will be no Minsks-3, which Russia would violate immediately after signing", - @ZelenskyyUa speaking at G20 summit. He also offered a Ukrainian peace formula pic.twitter.com/kKoCYgTFbA
Deux semaines après sa rencontre avec Olaf Scholz à Pékin, Xi Jinping a pu échanger pendant trois heures dans le cadre du G20 avec Joe Biden sur un ton relativement cordial. La tension autour de la visite de Nancy Pelosi à Taïwan semble s'être un peu dissipée, laissant place à une volonté de trouver des objectifs communs.
Xi Jinping s'est voulu rassurant quant à ses intentions sur la scène internationale.
Biden s'est dit inquiet pour le respect des droits humains au Xinjiang, au Tibet et à Hong Kong. Les Etats-Unis «continueront d'opposer une concurrence vigoureuse», a-t-il averti. Il en a profité pour demander à la Chine de «jouer un rôle constructif pour réfréner les pires tendances de la Corée du Nord».
Si Pékin refuse toujours de condamner l'invasion de l'Ukraine, Xi Jinping est apparu au G20 comme une étrange figure d'intermédiation. Formulant une critique voilée à destination de Moscou, il a appelé à s'«opposer fermement» à une «instrumentalisation» des produits alimentaires et de l'énergie. Mais il a également épinglé l'Occident, en réclamant la levée des sanctions, notamment celles qui visent la Russie.
Alors que la COP27 vise à grand peine à dépasser l'étape de la «wishlist» des mesures à adopter pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, le G20 aborde la transition énergétique sous l'angle technologique et économique. Le forum des 20 a pris un ensemble de décisions visant à accélérer la transition vers les énergies renouvelables.
Une partie des pays riches - dont la France, le Canada, les Etats-Unis et le Royaume-Uni - ont ainsi promis 20 milliards de dollars à l'Indonésie pour que le pays diminue sa dépendance au charbon. Cet accord va lui permettre d'avancer de dix ans son objectif de neutralité carbone, à 2050. L'Indonésie abrite près de 300 millions d'habitants dont la plupart sont très exposés aux catastrophes naturelles liées au changement climatique.
Pas moins de 98 milliards de dollars iront à destination de l'Afrique du Sud, première puissance industrielle africaine.
Cependant, les membres du G20 ont été divisés sur les questions énergétiques, malgré le «Bali Compact» adopté par tous les membres. Ce document, non contraignant, détaille les mesures nécessaires pour parvenir à un objectif de zéro émission.
L'ombre de la guerre en Ukraine, et les risques de crise alimentaire qui en découlent, ont amené les discussions à tourner court lors de rencontres en amont du G20. Résultat: Aucune version commune de communiqué n'a pu trouver grâce aux yeux de tous les participants, notamment «après que les pays qui sanctionnent Moscou ont commencé leurs interventions en condamnant "les exactions russes"», a expliqué une source proche de la réunion à l'Agence France-presse (AFP).
Point positif malgré cet échec, les plus gros pollueurs, dont l'Inde, les Etats-Unis et la Chine, ont répondu présent à la table des négociations. Si le G20 permet désormais de répondre aux besoins des économies émergentes, et plus seulement à ceux des pays riches, nombre de petites économies restent cependant exclues du processus.
(avec rts/nouvelobs/sites officiels/ats/afp)