Le Covid n'y aura rien changé: l'année 2020 est l'une des plus chaudes jamais enregistrées. C'est l'Organisation mondiale de météorologie (OMM) qui le dit dans son nouveau rapport publié ce 19 avril. L'équipe de watson vous le résume 👇
On a eu l'impression que «la nature a repris ses droits» durant la période de Covid-19. On a repéré des signaux localement: on a vu des animaux revenir dans des villes, la pollution urbaine s'estomper... «La qualité de l'air a été drastiquement améliorée en 2020», nous confirme Martine Rebetez, professeure de climatologie à l'Université de Neuchâtel et à l'Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage (WSL).
Cependant, ça ne veut pas dire que les confinement et arrêts d'activités liés au Covid ont globalement eu des effets positifs sur plan du climat ou de la planète. «Si la circulation des personnes a été en baisse durant un temps limité, cela n'a pas été le cas pour le chauffage et l'industrie», relève la climatologue. «Et il faut avoir en tête que la circulation des marchandises, elle, a au contraire augmenté.» Ce qui fait que, dans la balance, les émissions de CO2 n'ont pas chuté dans le monde.
Non seulement on sait maintenant que l'impact du Covid-19 sur la diminution du gaz à effet de serre n'a pas été significatif au niveau global, mais, nous dit le rapport de l'OMM, la crise a même eu des effets négatifs sur le climat et l'environnement. Elle a notamment «compliqué les activités de prévention des catastrophes», ce qui se conçoit assez aisément dans une période... de crise.
En tant que citoyen lambda, on peine à voir comment de grands efforts mondiaux pourraient avoir un quelconque effet positif notoire sur le climat, puisque cet effet n'est même pas vérifié, comme nous l'a rappelé Martine Rebetez, quand une grande partie de la planète est mise sous cloche et son économie, à l'arrêt. Ce n'est pas un scoop: nous venons un peu tard. Les dégâts sont faits.
Par contre, l'être humain a un impact sur son environnement. Nous participons, en temps que sociétés avancées, à la dérégulation climatique. La température globale est en hausse et ce réchauffement provoque des incendies et accroît notamment la fréquence des ouragans. L'augmentation drastique de la population mondiale n'arrange rien à la chose.
Les spécialistes climatiques nous le disent depuis longtemps: un virage dans nos pratiques individuelles et collectives doit être pris; il l'est déjà, à des degrés divers. Mais il peut paraître étonnant de voir les jeunes militants écologistes en appeler à «sauver la planète» et à se définir comme «activistes climatiques». C'est l'être humain qui est mis en péril par lui-même à moyen ou long terme. La Terre, elle, en a connu d'autres. Quant au climat, il évolue, mais n'est pas menacé en tant que tel.
Se positionner «pour le climat» ou «pour la planète» n'a pas vraiment de sens. On entre dans le domaine politique quand on se demande comment nous devons minimiser les effets désagréables du changement climatique sur l'humanité (inondations, famines, malnutrition, ...), qui sont réels et que l'on peut anticiper (certes avec plus ou moins de précision).
De nombreux écologistes politiques défendent l'idée de la décroissance: il faudrait remettre en question les principes sacro-saints de la création de richesses et du progrès technique. Or, ce n'est pas la seule option envisageable. Bertrand Piccard, avec sa fondation Solar Impulse, défend par exemple l'idée d'une croissance qualitative, au lieu de quantitative: ne pas produire plus, mais mieux.
Dans son nouveau livre Les Sept Ecologies, le philosophe Luc Ferry nuance en quelque sorte la position du psychiatre et aéronaute en prenant la défense de l'économie circulaire, qu'il nomme «éco-modernisme». Il faut continuer à produire, oui, mais en recyclant à grande échelle et en minimisant ainsi la production de déchets. Cette vision est à distinguer des autres formes d'écologie politique, que l'auteur réfute pour des raisons politiques et philosophiques.
Personne n'échappera à ce débat. Même à supposer que l'humanité soit amenée à mourir prochainement, cela vaut la peine de réfléchir à la meilleure manière dont cette dernière ligne droite de l'aventure humaine peut, doit, se dérouler, plutôt que d'espérer pouvoir tuer la mort programmée de notre espèce. Epicure disait que la vie se compare à un repas: ce n'est pas sa durée qui compte, mais sa qualité. Si nous choisissons la qualité pour l'existence de notre espèce, alors il nous reste à discuter collectivement des moyens de l'obtenir.