Ces derniers jours, la campagne électorale américaine a été dominée par la question de savoir quel groupe d'électeurs allait voter pour quel candidat. Le camp Trump se réjouit du fait que davantage de Noirs, d'Hispaniques et surtout de jeunes hommes se prononceront pour l'ex-président. Chaque jour, on annonce des hausses de voix dans ces groupes et les républicains se voient remporter la Maison-Blanche.
Dans ces spéculations, on a presque oublié le groupe d'électeurs le plus important: les femmes. Elles représentent 52% de toutes les voix et Kamala Harris a une avance nettement plus importante avec elles que Trump avec les hommes. Selon les sondages, l'avance de la vice-présidente chez les femmes se situe entre 14 et 16%. Chez les hommes, l'avance de Trump n'est que de 11%.
En y regardant de plus près, cette avance est encore plus marquée. 69% des jeunes femmes (18 à 29 ans) ont l'intention de voter pour Harris. Ce qui fera peut-être pencher la balance le 5 novembre, c'est que la probabilité que les femmes se rendent aux urnes est nettement plus forte que celle des hommes, surtout des jeunes hommes, spécialement courtisés par Trump.
Harris peut aussi s'appuyer sur des voix féminines éminentes du camp conservateur, comme celle de Liz Cheney. Bien qu'elle ne soit pas sur la même ligne politique que les démocrates sur la question de l'avortement, elle fait actuellement la tournée des swingstates avec Harris et fait la promotion de l’actuelle vice-présidente.
Cheney s'est aussi exprimé auprès du Financial Times: «La question de l'avortement ne devrait pas être décidée selon les lignes des partis. Beaucoup d'entre nous sont contre l'avortement, mais nous avons aussi vu que les lois dans les différents Etats n'offrent pas assez de protection aux femmes».
Contrairement à Hillary Clinton il y a huit ans, Harris met délibérément la question du genre au second plan.
La question du genre n'est donc pas au premier plan. La question de l'avortement est bien plus importante. Depuis que la Cour suprême a annulé, il y a environ deux ans, le jugement dans l'affaire «Roe v. Wade» et donc aussi la légalisation de l'avortement au niveau national, les démocrates ont gagné presque toutes les élections importantes. Une nette majorité d'Américaines et d'Américains veut que ce soient les femmes, et non les politiciens, qui décident de cette question.
Ce n'est donc pas le sexe qui a provoqué la polarisation des votes en fonction du genre. Christine Matthews, une directrice de campagne pour les républicains, explique dans le New York Times: «La raison est que Trump et Vance sont très extrêmes. Voilà ce qui a provoqué ce grand écart entre les sexes».
La question de l'avortement pend comme un boulet au pied des républicains. Dans 13 Etats, l'avortement est aujourd'hui interdit, parfois même en cas de viol ou d'inceste. Dans certains Etats, on votera le 5 novembre sur des référendums visant à revenir sur les lois sévères en matière d'avortement.
Dans plusieurs Etats, y compris des Etats conservateurs comme le Kansas et l'Ohio, de tels référendums ont déjà tourné à l'avantage des partisans de l'avortement. Les démocrates espèrent donc pouvoir en profiter le 5 novembre, notamment dans l'Arizona, un swingstate très disputé. Les optimistes espèrent même que la Floride votera à nouveau pour le camp démocrate, car elle doit s'exprimer sur une loi très dure que le gouverneur DeSantis a fait passer.
Trump s'est totalement décrédibilisé sur cette question avec ses déclarations contradictoires sur l'avortement. Une fois, il se vante d'avoir nommé les juges qui ont annulé «Roe v. Wade». Ensuite, il laisse sa femme Melania faire un plaidoyer pour l'autodétermination des femmes dans ses mémoires. Son vice-président Vance est connu pour être un adversaire acharné de l'avortement, et ses déclarations sur les «femmes à chats sans enfants» n'ont pas vraiment aidé les républicains - pas plus que la prétention ridicule de l'ex-président à être «le protecteur des femmes».
Traduit et adapté de l'allemand par Léon Dietrich