Les émissions de CO2, principales responsables du réchauffement, incluant celles produites par la déforestation, vont presque retrouver le niveau de 2019, ne laissant à ce rythme qu'une chance sur deux d'éviter de dépasser un réchauffement de 1.5°C dans neuf ans, selon les scientifiques du Global carbon project. Selon leurs calculs:
Cette hausse est portée principalement par l'utilisation du pétrole (+2.2%), avec la reprise du trafic aérien, et du charbon (+1%). Les émissions dues au charbon, en décroissance depuis 2014, devraient croitre de 1% et retrouver voire dépasser leur niveau record de cette année-là.
L'équipe du GCP, qui rassemble plus de 100 scientifiques de 80 institutions, calcule chaque année les émissions de CO2, ainsi que le «budget carbone» restant, soit la limite supérieure de dioxyde de carbone émis permettant de rester sous une température mondiale donnée.
Cette température est en effet liée à la concentration de ce puissant gaz à effet de serre dans l'atmosphère. Concentration qui a augmenté de 51% depuis le début de l'ère industrielle, quand nous avons commencé à brûler en grande quantité les énergies fossiles, souligne l'étude.
Les scientifiques peuvent ainsi traduire en durée le «budget» restant pour respecter les objectifs de l'accord de Paris, pierre angulaire de la lutte contre le réchauffement. Au rythme actuel de «dépense» de ce budget, il ne reste qu'une chance sur deux de tenir dans neuf ans l'objectif le plus ambitieux, contenir le réchauffement à 1.5°C.
Les émissions de gaz à effet de serre devraient en effet baisser de 45% d'ici 2030 pour avoir une chance d'y parvenir. A 30 ans, il y a une chance sur deux de tenir l'objectif moins ambitieux de +2°C, et à 18 ans pour +1.7°C.
Or, avec près de +1.2°C de réchauffement déjà enregistré, les catastrophes climatiques se multiplient déjà à travers le monde, comme l'a illustré l'année en cours, avec son cortège de canicules, sécheresses, inondations ou méga-feux...
«Nous avons enregistré certains progrès», relève la climatologue Corinne Le Quéré, autre auteure du rapport, qui souligne que l'augmentation tendancielle des émissions issues des énergies fossiles est passée d'environ 3% par an dans les années 2000 à 0.5% par an sur la dernière décennie.
«Nous avons montré que la politique climatique fonctionne. Mais seule une action concertée du niveau de celle menée face au Covid peut infléchir la courbe», a-t-elle insisté.
La Chine, qui devrait finir à -0.9%, a connu une forte baisse en début d'année avec les confinements liés à la politique zéro-Covid et la crise du bâtiment, même si la vague de chaleur de l'été a ensuite causé une baisse de l'hydroélectricité et une remontée du charbon.
Le reste du monde devrait voir une augmentation de 1.7%, principalement alimentée par la reprise du transport aérien. Les émissions non liées aux fossiles, environ 10% du total et principalement dues à la déforestation, sont en légère baisse.
Et le réchauffement touche déjà les puits de carbone naturels, qui jouent pourtant un rôle vital pour l'atténuer. L'absorption de CO2 par les puits terrestres a ainsi été réduite d'environ 17% et celle des océans de 4% au cours de la décennie 2012-21.
Du fait des multiples crises, 2022 ne sera pas une année type dont on pourra tirer des enseignements évidents, soulignent les auteurs. La hausse de 1% n'est peut-être pas «une tendance à long terme», estime Corinne Le Quéré. Mais «les émissions ne baissent pas comme elles le devraient».
(jod/ats)