La semaine passée, Donald Trump a fait son show. Comme autrefois dans son émission de télé-réalité The Apprentice, il a pu trancher dans le vif. A l'époque, il jugeait des candidats rêvant d'une place d'apprentissage dans son empire hôtelier. Cette fois-ci, il a noté le monde entier. Tous les pays se sont vu attribuer un droit de douane, des grandes puissances comme la Chine ou l'UE aux îles du sud de l'océan Indien peuplées uniquement de pingouins et de phoques.
Le monde se rend désormais compte de la même chose que les créateurs de son émission de télé-réalité. Trump n'avait aucune idée de quel candidat était le pire dans la salle, ni même de qui était qui. Un nom lui venait à l'esprit et il criait:
Trump calcule désormais les droits de douane pour le monde entier de manière aussi arbitraire qu'à l'époque. Pour le Conseil fédéral, cela ressemble à «un plus un égale trois». Pour le Financial Times, il s'agit d'une «stupidité destructrice». Sur Internet, un expert en informatique suppose que cette stupidité a été imaginée par l'intelligence artificielle.
Mais à la télévision, les producteurs pouvaient mettre eux-mêmes de l'ordre dans sa folie grâce au montage. Dans le monde réel, c'est impossible. De leur côté, les bourses ont finalement compris ce qu'elles avaient longtemps refoulé: avoir Trump à la Maison-Blanche, c'est vivre avec un «roi fou». Un dirigeant qui impose les droits de douane américains les plus élevés depuis 1909. Calculés selon une formule débile. Peut-être levées demain.
De ce chaos naîtra l'inflation. Comme l'a calculé le «Budget Lab» de l'université de Yale, l'ensemble des droits de douane imposés jusqu'à présent par Trump augmenteront le niveau moyen des prix de 2,3% et coûteront 3800 dollars par an à un ménage type aux Etats-Unis. Trump trahit ainsi ses électeurs.
Il avait promis une baisse du prix des œufs et livre à la place, avec les droits de douane, la plus forte hausse de taxes depuis des décennies. Les électeurs sont en colère. Même sur la chaîne de télévision Fox, favorable à Trump, sa porte-parole doit déjà faire face à des sondages selon lesquels la majorité des Américains désapprouvent désormais sa gestion de l'économie.
Cette inflation va obliger la Réserve fédérale américaine (Fed) à changer de cap. Avant son «jour de la libération», l'inflation semblait vaincue et la Fed voulait continuer à baisser son taux directeur. Désormais, elle devra peut-être l'augmenter à nouveau et amorcer le prochain tournant en matière de taux d'intérêt.
Mais du chaos de Trump naîtra, en plus de l'inflation, un deuxième monstre qui engloutira l'inflation: une récession.
Aux Etats-Unis, l'économie ne parvient plus à identifier le sens du vent et se fige. Attendre, plutôt que de construire une usine aujourd'hui et de la regretter demain. Peut-être faire passer de vieux projets pour de nouveaux afin de se faire bien voir de Trump - et c'est tout. On n'investit pas du tout, ou du moins beaucoup moins.
Aux Etats-Unis, les sondages indiquaient déjà avant le «jour de la libération» que les investissements seraient reportés. Depuis, les bourses qui s'effondrent trahissent la crainte d'une récession. Les Etats-Unis ont subi leur plus grande perte journalière depuis mars 2020 - lorsque le Covid a tout éclaté.
La récession fera disparaître l'inflation. Si les entreprises n'investissent pas et si les consommateurs frappés par l'inflation ne font pas de shopping, la demande diminue - et les entreprises n'osent pas augmenter les prix. L'inflation redescend alors. Et bientôt, la Fed devra aider l'économie en baissant ses taux directeurs. La bourse anticipe déjà tout cela - les taux d'intérêt sur les emprunts d'Etat à long terme baissent fortement.
En Suisse, la même crainte de récession est arrivée. C'est pourquoi l'indice phare des actions, le SMI, a fortement baissé depuis vendredi. Le franc, recherché comme valeur refuge, s'apprécie et rendra les importations moins chères. L'essence et le mazout coûteront bientôt moins cher, car la crainte globale d'une récession a fait baisser le prix du pétrole comme jamais depuis 2021, la deuxième année avec le coronavirus. Comme aux Etats-Unis, les taux d'intérêt des obligations d'Etat baisseront.
La crise Trump se déroulera donc différemment de la crise pandémique: la Banque nationale suisse ne devra pas augmenter ses taux directeurs. La question sera probablement de savoir jusqu'où elle devra les abaisser. S'il y a un revirement des taux, ce sera vers le bas.
Traduit de l'allemand