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Nobel et Gaza: Trump a le cul entre deux braises

Très à l’aise dans l’opposition, Donald Trump aurait tout intérêt à pester contre sa course ratée au Nobel, tout en marquant des points sur le terrain, à Gaza.
Très à l’aise dans l’opposition, Donald Trump aurait tout intérêt à pester contre sa course ratée au Nobel, tout en marquant des points sur le terrain, à Gaza.images: getty, montage: watson
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Trump a le cul entre deux braises

Entre l’ego trip habituel et la possibilité d’un réel exploit diplomatique avec son arbitrage d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, le président américain a infecté le processus du Nobel de la Paix. Au point qu’il aurait tout intérêt à se voir refuser cette nomination pourtant si désirée.
09.10.2025, 18:5809.10.2025, 18:58

Le match se jouera dans un mouchoir de poche. A peine le Nobel de la Paix décerné, vendredi à 11 heures, que Donald Trump s’envolera, selon ses vœux, pour le Moyen-Orient dans l’espoir de savourer l’accord sur un cessez-le-feu à Gaza entre Israël et le Hamas. Sans oublier de célébrer «en personne» la libération des vingt otages toujours retenus dans l’enclave, estimée au 13 octobre.

«C’est un grand jour pour le monde arabo-musulman, Israël, tous les pays voisins et les États-Unis d’Amérique. (...) BÉNIS SONT LES ARTISANS DE LA PAIX!»
Donald Trump, sur Truth Social

Comme le rappelait le New York Times jeudi matin, «le président Trump est sur le point de réaliser le plus grand accomplissement diplomatique de son second mandat». Lui qui rêve depuis toujours de graver l’Histoire en enfilant le veston du grand pacificateur moderne devant l’Eternel, la deuxième phase de ce plan de paix «durable», autrement dit le retrait progressif de l'armée israélienne de Gaza, pourrait bien venir lui caresser l’ego dans le sens du poil.

Bien sûr, nous en sommes encore loin. Mais dans la tête de Donald Trump, cette crise sans fin et meurtrière, que Joe Biden rêvait de maîtriser durant son dernier mandat, est résolue. Grâce à lui, lui et encore lui. On en veut pour preuve la petite mise en scène qu’il s’est offerte à la Maison-Blanche, cette nuit et en plein meeting sur le mouvement d’extrême gauche Antifa, lorsque Marco Rubio lui a glissé un mémo et deux mots à l’oreille.

La séquence en question:

Vidéo: extern / rest

Annoncer le cessez-le-feu avant tout le monde, coûte que coûte. La fin justifie les moyens. Sans doute moins pour réellement pacifier un monde en feu que pour peaufiner le personnage du héros sans cape qu’il se fabrique à la force d’un marketing politique somme toute très efficace. Sera-ce suffisant pour faire vriller le prestigieux comité norvégien, à moins de 24 heures de l’annonce du lauréat 2025? Rien n’est moins sûr. Mais l’affaire du «Nobel de Trump» va bien au-delà du prix.

Seul président américain à avoir fait bruyamment campagne pour lui-même, estimant mériter le sacre tout en brandissant un bilan personnel de «faiseur de paix» gonflé à l’hélium, le locataire actuel de la Maison-Blanche sait très bien qu’il n’a que peu de chances de voler en rythme avec la colombe cette année. Et d’abord parce que le comité se concentre sur «la personnalité dans son intégralité», comme l’expliquait son président, Jørgen Watne Frydnes.

On sent bien cette gêne qui s’empare depuis quelques semaines de beaucoup d’intellectuels et d’académiciens lorsqu’il s’agit de jaser sur l’auto-candidature d’un chef d’Etat loin d’être blanc comme neige. La même qui enlace certains décideurs mondiaux face aux avancées tangibles de Trump au Moyen-Orient.

Nous voilà face à un président qui s’affaire à terroriser sa propre population, au moyen d’une armée aux brutales méthodes déployée dans les grandes villes américaines. Qui pourchasse les étrangers sur son territoire. Qui veut emprisonner des élus démocrates pour les punir. Qui s’assied sur les traités internationaux. Qui lorgne des frontières qui ne lui appartiennent pas.

Mais il y a Gaza. Et Gaza, pour tout un tas de raisons éminemment légitimes, est au sommet des inquiétudes mondiales. Et Donald Trump est en train de faire le ménage là où beaucoup ont échoué avant lui.

En monopolisant la parole pacificatrice entre deux coups de canif dans la bienséance diplomatique, le milliardaire a déjà réussi à infecter les systèmes du Nobel et à obstruer ses tuyaux de délibération. Le lauréat, le vrai, sans doute incarné par une personnalité ou une organisation passe-partout face à la tornade MAGA, ne risque pas de marquer l’événement plus de quelques heures.

Et le président américain, tout comme le reste du monde, devrait s’en réjouir.

Très à l’aise dans l’opposition, Donald Trump aurait tout intérêt à pester contre sa course ratée au Nobel, tout en marquant des points sur le terrain. Surtout à court terme. Un scénario idéal pour cet as de la victimisation, dans le cas où cet accord entre Israël et le Hamas, aujourd’hui historique, devait capoter dans les jours qui viennent. Quand on a le cul entre deux braises, il est toujours plus facile de digérer l’échec éventuel d’un projet de paix sans avoir à transformer un prix en casserole humiliante.

Et, qui sait, s’octroyer le Graal dans un an puisque, comme l’a évoqué professeur suédois Peter Wallensteen à l’AFP mercredi, «d’ici là, la poussière sera retombée autour de ses diverses initiatives, notamment sur la crise de Gaza».

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