Parce que c'est une véritable humiliation. Parfois pire.
Pour un simple quidam qui se fait tirer le portrait après un excès de vitesse, c'est bien souvent un tatouage judiciaire qui ne s'efface pas. Les nombreux sites qui répertorient ces véritables pièces de pop culture, se contentent souvent de publier l'identité et la photographie du prévenu, s'en fichant de préciser l'issue du procès. S'il y en a un.
Bonjour, ensuite, pour trouver du boulot.
Rappelons qu'aux Etats-Unis, près d'un citoyen sur trois possède un casier. Et pas tout le monde n'a le loisir (ou la présence d'esprit) de rendre le cliché aussi pretty et iconique.
Jeudi soir, accueilli (comme à son habitude) par une grappe de fanatiques grimés aux couleurs great again, ce fut donc au tour de Donald John Trump, 77 ans, de passer devant l'objectif le moins tolérant du monde. De mémoire récente, jamais une photographie annoncée, qui plus est de mauvaise qualité, n'avait suscité autant de rumeurs, de ralliements, de moqueries et d'impatience. Et le cliché est d'ores et déjà entré dans l'histoire: c'est la première fois qu'un ex-président des Etats-Unis doit se soumettre à l'exercice du mugshot.
Pour Trump, l'exercice a sans doute été difficile. Très soucieux de son image et de son apparence, il bichonne son allure, son teint et sa teinture pour faire oublier son âge. C'est, évidemment, d'abord politique. Face à lui, Joe Biden doit batailler quotidiennement avec ceux qui l'estiment trop vieux pour rempiler. Durant son émission avec Tucker Carlson, mercredi soir, les plus fins observateurs auront remarqué que ces cheveux n'avaient jamais été aussi blancs. Se préparait-il au terrible shooting?
La veille, Jenna Ellis, l'une de ses avocates inculpée et photographiée en même temps que l'ex-maire déchu de New York, Rudolf Giuliani, avait choisi de se moquer de la gravité du moment, en affichant un large sourire. Pour le New York Times, «ça ressemble à une extraordinaire production de théâtre politique, qui va de paire avec l’affirmation souvent répétée par Donald Trump: ces poursuites sont une farce, une plaisanterie».
Pour rappel, dix-neuf co-accusés sont visés par la justice de Géorgie pour «tentative de manipuler l'élection de 2020».
En l'utilisant évidemment contre ses ennemis. La justice, mais aussi l'administration Biden. Un statut de martyr qu'il est aujourd'hui contraint d'entretenir, s'il veut viser la Maison-Blanche en slalomant entres les nombreuses menaces de condamnation qui pèsent sur lui. Il est aussi probable que l'as du marketing politique en profite pour nourrir son compte en banque, par exemple en commercialisant son mugshot sur des produits dérivés. (Un mug, par exemple?)
Vu la quantité de fausses photographies d'identité judiciaire et de goodies qui infestent les réseaux sociaux depuis un peu plus de dix jours, l'arrestation de Trump, jeudi soir à Atlanta, sera une véritable mine d'or.
Depuis le début de ses déboires judiciaires, Donald Trump dépense des millions pour sa défense. Un marathon judiciaire qui est devenu son principal argument de campagne, avec comme objectif majeur, celui d'être élu avant la moindre éventuelle condamnation. A noter encore que l'Etat de Géorgie a proposé jeudi matin que la première audience se tienne le 23 octobre prochain. (Oui, déjà.) Quelques heures plus tard, les avocats du candidat ont fait, sans grande surprise, opposition.
Si cette date venait à être maintenue, ce procès serait le premier (et le plus dangereux) sur l'agenda du 45e président des Etats-Unis.