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Voici le principal point faible de la défense aérienne de l'Otan

Les drones russes sont nettement moins chers que les systèmes censés les abattre.
Les drones russes sont nettement moins chers que les systèmes censés les abattre.Image: Keystone

Voici le principal point faible de la défense aérienne de l'Otan

L'intrusion d'une vingtaine de drones russes en Pologne dans la nuit de mardi à mercredi a mis à l'épreuve la défense antiaérienne du flanc Est de l'Otan, qui, en abattant au moins trois appareils, peut avoir des motifs de satisfaction, mais aussi de préoccupation.
12.09.2025, 17:0112.09.2025, 17:01
Mathieu RABECHAULT, Paris / afp

Les alliés ont annoncé avoir abattu au moins trois drones sur la vingtaine détectée dans le ciel polonais. Une faible proportion, mais les militaires interrogés par l'AFP expliquent que le dispositif de «défense aérienne et antimissile intégrée de l'Otan» (Nato IAMD), a bien fonctionné.

«Cette posture a montré toute son efficacité», assure le porte-parole de l'état-major des Armées françaises, le colonel Guillaume Vernet. Et une source militaire européenne d'ajouter:

«Tous les drones qui ont été identifiés comme une menace ont été abattus»

Mais, politiquement, l'équation est plus complexe. «Les défenses anti-aériennes de l'Europe et de l'Otan ont fonctionné, mais pas aussi bien qu'elles auraient dû pour empêcher la pénétration d'un aussi grand nombre de drones», a déploré le chancelier allemand Friedrich Merz.

Avec ces interceptions, «l'Otan a passé un test de résistance, sur le temps de réaction, les appareils, les munitions», selon Igor Delanoë, directeur adjoint de l'observatoire franco-russe, mais «à Moscou, dans les commentaires publics, on relève notamment le coût élevé de ces interceptions pour des drones qui ne coûtaient pas grand-chose».

Bulles de protection

La protection d'un espace aérien ne consiste pas à ériger un mur infranchissable, mais à défendre des points stratégiques, qu'il s'agisse d'une armée en campagne ou d'une ville, par une bulle de protection où tout aéronef ou missile doit être intercepté par la défense sol-air.

Le système américain Patriot a par exemple une portée d'interception d'une centaine de kilomètres contre les avions, comme le SAMP/T franco-italien, et d'une vingtaine de kilomètres contre les missiles balistiques.

Yuriy Ignat, colonel de l'armée de l'Air ukrainienne, explique:

«Aucun pays au monde n'a de protection à 100% contre les missiles et les drones, c'est impossible surtout compte-tenu de la taille des grands pays, comme l'Ukraine»
Yuriy Ignat

«Pour cette raison, les infrastructures sont protégées localement» et Kiev est couverte par différentes «couches de défense aérienne», ajoute-t-il.

«On crée des bulles et dans les interstices, on chasse», comme cela a été le cas avec les F-35 néerlandais et F-16 polonais mobilisés face aux drones russes, résume la source militaire européenne.

Une défense en couches

Il existe plusieurs types de systèmes de défense sol-air en fonction des différentes menaces à contrer. Face aux drones, les Etats renouent avec les canons antiaériens de quelques kilomètres de portée, dont les munitions sont infiniment moins chères que les missiles.

Contre les avions, il y a tout un éventail de missiles, allant du lanceur portatif de quelques kilomètres de portée aux Patriot ou aux SAMP/T, tirant des missiles à plusieurs millions de francs l'unité.

Les systèmes Patriot tirent des missiles à plusieurs millions de francs l'unité.
Les systèmes Patriot tirent des missiles à plusieurs millions de francs l'unité.

Face aux missiles de croisière, les Ukrainiens utilisent également leurs avions F-16 ou Mirage 2000, selon une source militaire européenne, mais les défenses peinent à intercepter les missiles supersoniques, beaucoup plus rapides.

La défense contre les menaces venues des airs implique donc des radars terrestres et aéroportés, connectés avec des systèmes anti-aériens ou avions destinés à les intercepter.

Des systèmes trop couteux?

Aujourd'hui, résister à des vagues d'innombrables drones à bas coût, tout comme à des missiles hypervéloces et manoeuvrants, qui pullulent sur le champ de bataille, est une gageure.

«Imaginez un gardien de but face à dix attaquants fonçant sur lui avec dix ballons chacun. Combien en arrêtera-t-il? Deux à quatre? Il ne faut pas s'attendre à ce que tout soit stoppé. C'est impossible», résume le colonel ukrainien Ignat, dont l'armée est pourtant en pointe dans la défense antiaérienne.

Pour les autres Européens, le défi est encore plus énorme, puisqu'ils ont dramatiquement sous-investi dans le domaine depuis la fin de la Guerre froide, et que leurs systèmes sont trop coûteux pour être utilisés systématiquement contre des drones.

Des drones russes Gueran-2, infiniment moins chers que les systèmes utilisés pour les abattre.
Des drones russes Gueran-2, infiniment moins chers que les systèmes utilisés pour les abattre.Keystone

Un missile Sidewinder utilisé mercredi en Pologne, comme l'a confirmé à l'AFP une source militaire, coûte plusieurs centaines de milliers de dollars, contre quelques dizaines de milliers pour le drone Gueran qu'il a abattu.

Côté volume, «nous avons besoin d'une augmentation de 400% dans les systèmes de défense anti-aérienne et antimissile», avait annoncé en juin le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte. Un récent rapport du centre de recherche IISS le confirme:

«L'Europe ne dispose pas d'IAMD adéquate couvrant la quasi-totalité du spectre des menaces. Des systèmes performants (...), sont en service, mais la plupart ne sont pas disponibles dans les volumes requis.»
IISS

Le problème, «c'est que les systèmes de défense anti-aérienne actuels ont été pensés contre des avions, et pas contre des drones», résume un haut gradé occidental, selon qui l'Otan cherche les solutions pour des systèmes efficaces et économiquement viables.

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