Il est aux côtés d'Emmanuel Macron depuis 10 ans. Depuis le premier quinquennat du président français. Alexis Kohler, de son nom, va quitter l'Elysée au mois d'avril, pour emprunter un nouveau chemin qui va l'emmener dans les bureaux de la Société Générale, relatait en première instance Les Echos. Son arrivée a été confirmée par un communiqué de la banque, où il est appelé à remplir le rôle de directeur général adjoint.
L'Alsacien de 52 ans portait depuis huit ans le costume de secrétaire général de l’Elysée. Il sera remplacé par Emmanuel Moulin (55 ans). La fonction la moins éclairée de la place publique et pourtant la plus puissante, comme l'analysait L'Express.
Affublé d'une paire de surnoms, tels que «le jumeau», «l’alter ego» de Macron, celui qui revenait le plus souvent était «l'autre cerveau de Macron». Un véritable homme de l'ombre, qui épaulait son patron dans sa direction épineuse de chef d'Etat.
«Il est aussi omniprésent qu’ultrasecret», écrivait Libé. Alexis Kohler était l'œil de Moscou du président de la République, «une tour de contrôle et un visionnaire», glissait le député Renaissance Pierre Cazeneuve.
Si bien que les couloirs de l'Elysée qualifiaient Kohler d'un président bis. Sauf que la dissolution (ratée) de l'Assemblée nationale en juin 2024 a brisé cette position privilégiée; le ressort s'est comme cassé et son nom dans les échanges ministériels s'est réduit à ses initiales «AK» - un mauvais signe. Son pouvoir s'est effrité et il a choisi d'écouter les amis qui lui conseillaient depuis des années de «se tirer».
Considéré comme un bourreau de travail, qui éteignait la lumière du Château tard dans la nuit, raconte Libé, Kohler a peut-être senti le vent tourner. Cela faisait deux ans que les rumeurs couraient concernant son départ.
Il était peut-être temps de filer, car sa discrétion a été mise à mal lorsqu'une instruction judiciaire lui a empoisonné la vie. En novembre, la cour d’appel de Paris a confirmé les poursuites le visant pour prise illégale d’intérêts dans une affaire sur ses liens familiaux avec l’armateur MSC, pour qui il a travaillé entre 2016 et 2017. Des démêlés et des conflits d'intérêts qui ont fendu l'armure prétendument solide du bonhomme qui fuyait la lumière.
Et comme par magie, d'autres casseroles sont apparues, comme cette enquête du Parquet national financier pour des soupçons de «trafic d’influence» autour de la fusion Veolia-Suez.
Tout s'enchaîne dans le mauvais sens: il est également ciblé par une plainte du député LFI, Eric Coquerel, déposée au début du mois de mars. Le président de la commission des finances de l’Assemblée veut poursuivre Kohler pour son refus de venir s’expliquer devant les députés sur le dérapage des comptes publics, rapporte la presse hexagonale.
Beaucoup de bis dans le parcours de Kohler. A force de jouer les doublures, son activité dans l'ombre s'est effritée.
Un ras-le-bol, alors qu'il est aussi touché par une autre affaire liée à Nestlé. Une commission parlementaire doit vérifier les pratiques des industriels de l’eau en bouteille et prévoit d'entendre Alexis Kohler, afin de déterminer s'il a cédé à un lobbying de Nestlé.
Peut-être que cette goutte a fait déborder le vase. Comme il le disait à L'Express: «Ma nature, mon devoir, c’est d’être pessimiste», répétait-il.