La lumière ne s'éteint jamais au Cecot, une gigantesque prison située non loin de la capitale du Salvador. Ils peuvent être jusqu'à 100 hommes entassés presque toute la journée dans l'une des grandes pièces aménagées avec des lits superposés métalliques à quatre étages, sans matelas ni couverture.
Les détenus ont droit à 30 minutes de sport dans le couloir. Avant même qu'une cellule ne leur soit attribuée, on leur rase la tête. Ils n'ont aucun contact avec le monde extérieur.
Les conditions pour les violeurs, les membres de gangs et les meurtriers condamnés sont les mêmes que pour les migrants américains - des soi-disant criminels - qui ont été expulsés. Il n'y a «pas de privilèges», a déclaré le directeur de la prison, Berlarmino García à CNN. Le mois dernier, le gouvernement de Donald Trump a envoyé près de 300 membres présumés du gang vénézuélien Tren de Aragua et du MS-13 des Etats-Unis au Cecot.
Parmi eux, Kilmar Abrego Garcia. Un père de famille originaire de l'Etat du Maryland, expulsé par erreur vers la tristement célèbre prison d'Amérique centrale. Sa femme l'a identifié sur une photo de l'arrivée des malfrats au Salvador.
Kilmar Abrego Garcia n'avait pas de casier judiciaire aux Etats-Unis ni dans son pays d'origine. Il y a près de 14 ans, il a immigré illégalement aux Etats-Unis. Malgré un refus de sa demande d'asile en 2019, il a obtenu un statut de protection en raison d'une menace de persécution. Selon des documents judiciaires, un gang l'avait pris pour cible et menacé son entreprise familiale. L'administration Trump a reconnu une «erreur administrative» dans cette affaire.
Le cas a atterri jusque devant la Cour suprême, qui a décidé que le gouvernement américain devait soutenir le rapatriement du Salvadorien. La ministre américaine de la Justice, Pam Bondi, a toutefois déclaré cette semaine que cela signifiait seulement que Washington devait mobiliser un avion. La ministre a estimé que la décision finale revenait au gouvernement du Salvador.
Une mauvaise nouvelle pour Kilmar Abrego Garcia et sa famille. En effet, le président salvadorien Nayib Bukele et Donald Trump se sont entretenus lundi à la Maison-Blanche. Interrogé sur le possible transfert du détenu, Bukele a déclaré:
Il a également rejeté l'idée d'une libération du jeune homme de 29 ans dans son pays. Assis juste à côté, Trump a hoché la tête et souri à l'autoproclamé «dictateur le plus cool du monde».
Bien que le gouvernement américain affirme respecter la décision de la Cour suprême, il ne travaille pas en ce sens. Lors de la conférence de presse avec Nayib Bukele, Donald Trump a continué à déformer les faits, affirmant que la Cour suprême avait statué en sa faveur. Sans oublier d'ajouter que Kilmar Abrego Garcia n'aurait plus droit à une protection contre l'expulsion parce qu'il était désormais officiellement considéré comme un membre du MS-13. Cette déclaration s'appuie exclusivement sur une accusation déjà démentie par un juge.
«L'administration Trump essaie de trouver ce qui leur permettrait de s'en sortir devant la justice fédérale», a déclaré au Guardian britannique le professeur de droit Stephen Vladeck de l'université de Georgetown. Selon lui, cette situation est une première dans l'histoire américaine.
Bien qu'il n'ait jamais été condamné, Kilmar Abrego Garcia n'a donc que peu de chances d'espérer quitter la prison de l'horreur au Salvador pour retrouver ses trois enfants.
(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)