Alors que l'ambiance est quelque peu électrique à Matignon, la population française découvre peu à peu le nouveau gouvernement choisi et mis en place par le désormais nouveau premier ministre Michel Barnier.
Sou la houlette de ce dernier, ils sont plusieurs à causer de l'écologie. Ils ont même écrit un livre. Non, ce n'est la nouvelle ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runnacher qui a pondu un manuscrit sur le climat. D'autres ministres ont écrit et philosophé sur l'écologie à sa place. A commencer par le premier ministre lui-même.
Michel Barnier a noirci des pages sur l'écologie. Lui, le Savoyard qui a manoeuvré pour les Jeux olympiques de 1992 d'Albertville. Un montagnard d'expérience qui reste discret. Plume empoignée, il a écrit Chacun pour tous. Le défi écologique, en 1990, publié aux Editions Stock.
Le défi climatique devrait faire écho à cet amoureux de l'air des montagnes. A 73 ans, Barnier semble plus enclin à parler de dette économique que de dette écologique. Selon Le Nouvel Obs, c'est un très vieux livre sur l'écologie.
Vieux, mais est-il dépassé? Il écrivait qu'il fallait s'affranchir d'un programme nucléaire coûteux et penser à ralentir la croissance. Envoyé sur l'aile droite du terrain politique, Barnier confirme par son récit que les conservateurs n'ont pas toujours été fan du nucléaire.
Il proposait donc 100 mesures pour l'environnement. Un poil éloigné des critiques qui ont fusé dans les milieux écolos lui reprochant d'avoir «accentué le bétonnage de la Tarentaise», pestait une élue locale dans les colonnes de Libération. Il fallait préparer les Jeux de 1992, tout comme ceux de 2030.
Le quotidien français souligne que Barnier va par ailleurs signer un décret pour une garantie financière étatique pour les JO d'hiver de 2030 en France. Selon l'élue locale, le raisonnement du locataire de Matignon est dans «la continuité d’une politique d’aménagement de la montagne à rebours de tous les enjeux actuels».
En fermant le livre, Le Nouvel Obs affirme que sur l'écologie, le premier ministre n'a pas changé d'un poil sa vision, même si plus de 30 ans ont passé.
Bruno Retailleau a publié son livre en 2021 (Aurons-nous encore de la lumière en hiver?) et traite du sujet de l'écologie pour isoler une conclusion faite de concessions: ni «green washing», ni écologie punitive.
Le désormais nouveau ministre de l'Intérieur reconnaît que les écologistes ont eu le fin nez (et raison) sur de nombreux points. Mais qu'à cela ne tienne, il tacle les défenseurs de la planète dans la foulée pour déplorer des «délires idéologiques et communautaristes».
Pour Bruno Retailleau, il y a une autre écologie possible et «compatible avec les valeurs de la droite», planchait-il. Il disait dans une interview accordée à Ouest-France:
Il muscle son discours en arguant que la décroissance est anti-humaniste. Retailleau veut d'une écologie compatible avec les valeurs des LR. Il se permettait même une petite remontrance adressée à Emmanuel Macron en 2021, chargeant son management défaillant, avec de pouvoir «construire une vraie politique écologiste avec trois ministres de l’Ecologie en quatre ans».
Lui, par contre, n'hésite pas à soutenir le nucléaire et faire l'éloge des ingénieurs. Il profite de renchérir dans ses écrits que le genre humain n’est pas l’ennemi de la planète, c’est son meilleur allié. Une aubaine pour le magazine Nouvel Obs d'isoler une phrase: «Sans la main de l’homme, la “biosphère” serait pour beaucoup d’espèces – et pas seulement l’espèce humaine – un véritable enfer». C'est un point de vue.
Place à Antoine Armand, qui occupe le poste de ministre de l'Economie, s'est déjà fait une bonne bande de potes: il a indiqué refuser de traiter avec le RN, un parti qu'il considère en dehors de «l'arc républicain». S'il ne se fait pas des amis du côté de la droite dure, le Haut-savoyard s'est, lui aussi, essayé à noircir des pages sur l'écologie.
Le Mur énergétique français, c'est le titre de son bouquin publié en 2024, accable 30 ans d'erreurs politiques. Il confiait au Dauphiné qu'après la commission d’enquête (à l’Assemblée nationale où il était rapporteur), menée l’an dernier et une fois le rapport rendu, «il a ressenti le besoin de lancer une alerte, pour faire comprendre que nous étions désormais face à un mur énergétique». Il faudra consommer moins d'énergie, nous enseigne le haut-fonctionnaire.
Dans un texte en forme de prise de conscience, le très «macronien» Antoine Armand, taxé d'imiter les grands libertaires américains, défend la complémentarité du nucléaire et du renouvelable - alors que Barnier en parlait comme une énergie dépassée en 1990.
Le discours tient sur cette prégnante critique d'une politique énergétique qui ne dessine que des trajectoires, selon lui. Dans Le Point, il tapait sur les responsables politiques qui ont hurlé «à la décroissance médiévale». Il brandissait l'avertissement du black-out énergétique à cause de projets (éoliens, par exemple) bloqués par des associations. Son bouquin est un appel à la rationalité écologique.