International
Guerre contre l'Ukraine

Guerre en Ukraine: 2024 sera compliquée pour Kiev

AVDIIVKA, UKRAINE - DECEMBER 7: Group portrait of a Ukrainian soldier on December 7, 2023 in Avdiivka, Ukraine. Both Ukraine and Russia have recently claimed gains in the Avdiivka, where Russia is con ...
L'année s'achève en Ukraine, et aucune grande percée n'a vu le jour.Getty Images Europe

La guerre en Ukraine s'enlise: 2024 s'annonce compliquée pour Zelensky

Malgré les combats acharnés, aucun des deux belligérants n'est parvenu à réaliser une percée majeure en 2023. Et ce sera pareil l'année prochaine - ou pas: l'élection de Trump, l'absence d'avancées et l'épuisement des troupes pourraient entraîner des conséquences inattendues. Voici trois scénarios pour 2024.
18.12.2023, 06:1018.12.2023, 08:24
Suivez-moi
Plus de «International»

Sur les champs de bataille ukrainiens, 2023 n'aura servi à rien. Du moins, d'un point de vue purement territorial. Au cours de cette année qui va bientôt toucher à sa fin, aucun des deux belligérants n'est parvenu à réaliser une avancée substantielle. Entre fin janvier et fin novembre, l'Ukraine n'a repris aux Russes que quelque 360 km2 de territoire, soit 0,06% de la surface du pays, selon les données du collectif War Mapper. Malgré les combats et les lourdes pertes, rien n'a changé.

👉 Suivez en direct la guerre contre l'Ukraine 👈

Les dirigeants des deux pays l'ont pourtant dit et répété, il n'est pas question de baisser les armes. Dans une récente interview à l'AFP, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, a réitéré les objectifs maximalistes du Kremlin: le contrôle total des quatre régions ukrainiennes illégalement annexées en septembre 2022, que Moscou n'occupe qu'en partie. De son côté, Kiev veut libérer ces territoires et reprendre également la Crimée, passée en mains russes en 2014.

Les régions annexées par la Russie en Ukraine.
L'objectif de Moscou: les régions ukrainiennes annexées en 2022, et la Crimée.Image: datawrapper

Peut-on encore espérer en une résolution rapide du conflit? A quoi faut-il s'attendre en 2024? Voici les scénarios les plus (ou moins) probables pour l'année prochaine.

Longue guerre de position

«D'un point de vue militaire, le scénario le plus probable pour 2024 est le même que cette année», avance Julien Grand, rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse:

«Des combats très locaux, avec des gains limités, mais sans aucune percée majeure. Je ne m'attends pas à de grands mouvements, du moins pendant les six premiers mois de l'année»
Julien Grand, rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse

L'Economist Intelligence Unit (EIU), entreprise spécialisée dans les prévisions, table également sur «un conflit prolongé avec des degrés d'intensité variables». «Nous nous attendons à ce que les combats se concentrent dans quelques zones autour de la région du Donbass», écrit l'EIU dans une analyse publiée fin novembre.

«L'Ukraine, on l'a vu au cours de cette année, n'a pas été capable de reconquérir les territoires occupés, malgré l'important afflux d'aide militaire occidentale», complète Julien Grand. «La Russie n'est pas non plus en mesure de fournir un effort capable de percer les lignes ukrainiennes».

Rien ne va changer, donc. Concrètement, il s'agira d'une «guerre longue et épuisante, avec de lourdes pertes humaines des deux côtés», prédit le centre de réflexion Globsec. Pour ce dernier également, un conflit de position est le scénario le plus vraisemblable. Incapables de lancer de nouvelles opérations offensives, les deux belligérants vont se limiter à «s'échanger des mètres carrés de territoire, affaiblissant leur potentiel militaire sans pouvoir réellement progresser», résume Julien Grand.

«Dans cette situation, tout le monde est perdant. C'est une impasse»
Julien Grand, rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse

Les récentes déclarations de Zelensky, selon lequel l'Ukraine va développer davantage ses fortifications et ses capacités défensives sur l'ensemble du front, parlent en faveur d'un enlisement du conflit.

Une percée majeure

La plupart des experts s'accordent donc à dire qu'une grande percée n'est pas au rendez-vous. «Pour que cela se réalise, il faudrait former de nouvelles troupes fraîchement constituées et suffisamment équipées», analyse Julien Grand. «Actuellement, ni la Russie ni l'Ukraine ne sont en mesure de le faire.»

«Le flux logistique dont dispose actuellement la Russie lui permet de maintenir ses positions, sans pouvoir avancer davantage», détaille le spécialiste. Pour l'Ukraine, la situation serait encore plus compliquée. «Le pays, très dépendant de l'aide occidentale, aurait besoin de livraisons encore plus conséquentes», affirme Julien Grand. Et d'ajouter:

«Mais même si cette situation se réalise, cela va prendre du temps. Les prochains équipements promis par l'Occident, tels que les avions de combat, ne pourront pas être opérationnels avant 2025»
Julien Grand, rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse
Romanian air force F-16 fighter planes fly above the Baza 86 military air base, outside Fetesti, Romania, Monday, Nov. 13, 2023. NATO member Romania inaugurated an international training hub for F-16  ...
Les jets de combats F-16, réclamés par Kiev depuis longtemps, ne pourront pas être déployés de sitôt.Keystone

L'analyse de Globsec partage ce point de vue: ce n'est qu'en mettant en oeuvre «de nouveaux systèmes d'armes et modèles de guerre», que les Ukrainiens pourraient «compenser la supériorité de la Russie en termes de ressources humaines, d'aviation et de missiles».

Une chose est sûre: pour accélérer le rythme du conflit, des changements radicaux sont nécessaires. Une percée russe n'est possible que si le pays «augmente sa production nationale d'armes, en réussissant à échapper aux sanctions, et mobilise encore plus de personnel sur le front», estime l'EIU.

Une défaite de Moscou serait encore plus improbable. Toujours selon la même analyse, cela nécessiterait carrément un changement à la tête du pouvoir russe.

Les négociations

Reste l'option diplomatique. «Le tournant va arriver au niveau politique», estime Julien Grand. «Tant que les flux logistiques actuels sont maintenus, la situation ne va pas évoluer. Mais à partir du moment où l'un des deux camps n'aura plus accès à ses réserves militaires, les choses pourraient changer».

Un élément va jouer un rôle majeur dans ce domaine: le soutien militaire occidental à l'Ukraine, celui de Washington en particulier. Or, la poursuite de l'aide américaine est de plus en plus incertaine. Volodymyr Zelensky en a eu un aperçu il y a quelques jours, lorsque le Congrès américain s'est opposé au déblocage d'une grosse enveloppe destinée à l'Ukraine.

L'élection possible de Donald Trump à la Maison-Blanche, en automne prochain, pourrait limiter, voire définitivement mettre fin au soutien américain. Depuis le début de la guerre, les Etats-Unis ont fourni une aide militaire d'environ 44,2 milliards de dollars, soit plus que n'importe quel autre pays. Même si des Etats européens continuent à soutenir Kiev, leurs capacités de production sont «limitées», rappelle Julien Grand.

«Cette situation pourrait pousser Zelensky à s'asseoir à la table des négociations», avance le rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse. Pour l'EIU, les Etats-Unis seraient même en mesure de forcer l'Ukraine à le faire, au vu de sa «dépendance à l'égard de l'équipement américain».

Une victoire de Trump, doublée à la réélection de Poutine et à l'absence de percées ukrainiennes l'a prochain, pourrait pousser les alliés occidentaux à réexaminer leur stratégie, estime Globsec; ceux-ci pourraient décider de privilégier une solution négociée au lieu d'un soutien militaire inconditionné.

Dans tous les cas, il s'agit d'un choix très délicat pour Zelensky, indique Julien Grand: «Le président ukrainien a toujours affirmé vouloir chasser les Russes des régions occupées et de la Crimée. Or, si Poutine accepte de baisser les armes, c'est pour garder les territoires qu'il a conquis». Et l'expert d'ajouter:

«En acceptant de négocier, Zelensky ne pourra pas maintenir ses promesses politiques. Le point de départ pour entamer les discussions n'est pas satisfaisant pour les Ukrainiens»
Julien Grand, rédacteur en chef adjoint de la Revue militaire suisse

La situation serait différente de l'autre côté. «Poutine semble plus près de s'asseoir à la table des négociations», estime Julien Grand. «Un accord de paix lui permettant de garder la Crimée et les territoires occupés pourrait même être présenté comme une victoire auprès de la population russe».

«Pour Moscou, il vaut mieux garder les territoires conquis plutôt que d'essayer d'obtenir quelques mètres carrés de plus au prix de lourdes pertes», ajoute encore l'expert. Lequel conclut:

«D'un point de vue purement territorial, la Russie est aujourd'hui gagnante. Elle n'a pas perdu la Crimée et contrôle environ deux tiers du Donbass. L'Ukraine, par contre, n'a plus la capacité de libérer ses territoires comme elle le souhaite. Elle est perdante. Mais si la guerre continue, ce sont les deux camps qui vont perdre.»
Un premier char britannique détruit lors de la contre-offensive
Video: watson
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
Occupation d'un gymnase par les sans-abri à Lyon
Plus de 150 personnes sans domicile, dont beaucoup de femmes et d'enfants, ont investi un gymnase à Lyon pour dénoncer le manque d'hébergement d'urgence.

Plus de 150 personnes sans-abri, principalement des femmes et des enfants, ont occupé vendredi soir un gymnase à Lyon pour dénoncer le manque d'hébergement d'urgence, avant d'être évacués par les forces de l'ordre, a-t-on appris de sources concordantes.

L’article