Dans le monde des relations internationales, le feutré de la diplomatie peut rapidement faire place au feu et aux flammes d'une guerre. Et dans ce contexte, reconnaître légitimement son voisin, c'est aussi le meilleur moyen de ne pas finir par s'entre-tuer avec lui. Chaque pays décide de reconnaître ou non l'indépendance, l'autonomie ou la souveraineté — l'existence, en bref — des autres nations. Et en fonction des intérêts, des sensibilités historiques et politiques d'un pays, la reconnaissance d'un territoire tiers en tant qu'Etat ne va pas toujours de soi. C'est particulièrement le cas pour des pays limitrophes.
La Suisse, la France ou l'Allemagne par exemple, sont reconnues par l'entièreté des nations sur terre. Mais qu'en est-il du Kosovo? De Taïwan? Ou, dans le cas qui nous concerne en ce moment: d'Israël et de la Palestine?
La création de l'Etat hébreu fut le fruit d'un processus politique international compliqué et de la présence progressive de Juifs sur le territoire de la Palestine britannique, dans la première moitié du 20e siècle. L'Etat d'Israël a été déclaré en mai 1948, mais nombre de pays arabes n'ont toujours pas digéré la création d'une nation juive dans la région.
La plupart des pays qui ne reconnaissent par Israël sont des Etats du monde arabe ou musulman. Exception notable: la Turquie laïque reconnaît Israël dès mars 1949. En 1979, l'Egypte, qui a mené deux guerres contre Israël, rebattait complètement les cartes dans la région en acceptant de normaliser ses relations avec l'Etat hébreu. Il a été suivi par la Jordanie en 1994.
En 2020, les accords d'Abraham, menés par Donald Trump, ont mené à la reconnaissance du pays par les Emirats arabes unis, le Bahreïn, le Soudan et le Maroc. D'autres pays musulman ont reconnu l'Etat hébreu dans une période, avant de revenir en arrière, comme par exemple la Tunisie (de 1994 à 2000), Oman (de 1996 à 2000), le Qatar (de 1996 à 2010) ou la Mauritanie (de 1999 à 2010).
La plupart des pays occidentaux ont toutefois reconnu Israël dès la fin des années 1940. Au gré des alliances et des changements de régimes, d'autres pays ont changé d'avis:
La Russie soviétique et ses pays satellites ont retiré leur reconnaissance d'Israël en 1967, après la Guerre des Six jours, lors de laquelle celle-ci était alignée sur les pays arabes. Au début des années 1990, alors que l'URSS n'était plus qu'un souvenir, ces pays ont tous reconnu Israël.
La Corée du Nord est le seul pays non arabe ou musulman à n'avoir jamais reconnu l'Etat d'Israël.
La plupart des 193 Etats reconnus par l'ONU font consensus. Mais quatre territoires sont des «Etats non membres» avec un statut d'observateur permanent existent. Parmi eux: la Palestine. Il ne s'agit donc techniquement pas d'un «Etat», mais son existence est tout de même reconnue par de nombreux autres Etats.
Les territoires palestiniens sont physiquement composés de deux entités principales: la bande de Gaza et la Cisjordanie — en fait une myriade d'îlots perdus au milieu de la colonisation israélienne.
Ici, ce sont la majorité des pays occidentaux qui ne reconnaissent pas la Palestine. On peut notamment y ajouter d'autres pays asiatiques «occidentalisés», tels que le Japon, la Corée du Sud, Taïwan ou Singapour. Mais l'Arménie, le Panama, la Birmanie, le Cameroun, la Jamaïque ou d'autres ne le reconnaissent pas non plus.
La reconnaissance de la Palestine est plus tardive. La plupart des pays qui la reconnaissent, notamment les pays arabes, musulmans et africains, l'ont acté en novembre ou décembre 1988, après la déclaration d'indépendance du président de l'autorité palestinienne de l'époque Yasser Arafat, le 15 novembre 1988. Mais ce n'est pas le cas de tous. Le Liban, par exemple, le fera en 2008 et la Syrie en 2011.
Les pays de l'Union soviétique et communistes soutiennent à l'époque les pays arabes contre Israël, et donc la Palestine, qui est reconnue. A la chute du Mur et de l'URSS, ces pays ne retirent toutefois pas leur soutien. D'où la présence sur la carte, notamment en Europe, d'un genre de «rideau de fer» dans la reconnaissance de la Palestine, qui survit jusqu'à aujourd'hui. Certains pays d'Ex-Yougoslavie, comme la Croatie, la Slovénie, ne reconnaissent cependant pas la Palestine. C'est aussi le cas de la Moldavie et des pays baltes.
En Amérique du sud, c'est une vague de reconnaissances qui agite le sous-continent dans les années 2010. Le Venezuela lance la tendance en 2009, notamment suivi par la Bolivie, l'Equateur et l'Argentine en 2010, et le Brésil, le Paraguay, le Pérou et le Chili en 2011, puis la Colombie en 2018.
Le Vatican a reconnu l'existence la Palestine en juin 2015. En théorie, ce sont tous les catholiques du monde entier qui la reconnaissent dans le même temps.