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Israël-Hamas: La bataille de la mer Rouge a commencé

La bataille de la mer Rouge a commencé

Après l'attaque de navires par les rebelles Houthis, les Etats-Unis menacent de prendre des mesures de rétorsion. Mais qui se cache derrière les Houthis et comment les experts évaluent-ils la situation? Eléments de réponse.
07.12.2023, 05:5407.12.2023, 11:57
Marianne Max / t-online
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Le message des rebelles houthis au Yémen était clair: ils veulent «rechercher tout navire israélien en mer Rouge», a déclaré le chef des rebelles houthis, Abdel-Malik al-Huthi, il y a moins de trois semaines. Et nous viserons «tous les navires» ayant un lien avec Israël, a ajouté le porte-parole militaire des Houthis, Jahja Sari, quelques jours plus tard.

Les Houthis mettent désormais cette menace à exécution – et visent apparemment aussi des navires sans lien avec Israël. Ainsi, dimanche, la marine américaine a dû venir en aide à plusieurs navires marchands battant pavillon panaméen ou bahaméen, car les rebelles houthis leur tiraient des missiles et des drones. Un drone des Houthis se serait également dirigé vers le destroyer américain «USS Carney».

L'USS Carney a
L'USS Carney a été envoyé en mer Rouge après l'attaque du Hamas en Israël (archives).Keystone

Une telle série d'attaques en mer Rouge n'est pas le premier incident de ce type. Ces dernières semaines, les tensions s'étaient accrues en raison de la guerre entre Israël et l'organisation terroriste palestinienne Hamas.

Mais qui se cache derrière les rebelles Houthi? Jusqu'où iraient-ils dans leurs attaques en mer Rouge? Et que pourraient faire les Etats-Unis, en tant que puissance protectrice d'Israël, pour s'y opposer?

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Des idéologies alliées

Tout d'abord, il est possible que les Houthis aient agi de leur propre chef lors de leurs attaques. L'armée américaine soupçonne toutefois, comme pour les organisations Hezbollah ou Hamas dans la bande de Gaza, que leurs attaques sont certes menées par les rebelles seuls, mais qu'elles sont soutenues par le régime islamique iranien. Il n'y a pas de preuves à ce sujet, mais le soupçon n'est pas surprenant: les rebelles Houthi au Yémen font partie de ce que le régime islamique appelle «l'axe de la résistance» contre Israël et les Etats-Unis.

Le régime iranien désigne ainsi les milices qui lui sont alliées dans la région, dont le Hezbollah au Liban, le Hamas dans la bande de Gaza et d'autres groupes en Irak et en Syrie. Avec leur slogan «Dieu est grand, mort à l'Amérique, mort à Israël, maudits soient les Juifs, victoire à l'Islam», les rebelles Houthi sont en outre idéologiquement en phase avec le régime islamique. Dès sa création en 1979, celui-ci a déclaré Israël et les Etats-Unis comme ennemis jurés.

Bien que Téhéran nie jusqu'à présent tout soutien direct aux Houthis, des fonctionnaires américains et yéménites voient des indices montrant que le régime islamique soutient le mouvement radical en lui fournissant par exemple des armes lourdes, de l'équipement et de l'argent. Les Houthis auraient également été formés par le Hezbollah, l'organisation libanaise soutenue par le régime iranien, ainsi que par la Garde révolutionnaire du régime islamique.

«Les Houthis collaborent avec l'Iran»

Pour Eckart Woertz, expert du Proche-Orient, la collaboration des Houthis avec le régime iranien en général est donc également considérée comme certaine: «Les Houthis collaborent avec l'Iran, reçoivent des armes de l'Iran, et cela a également augmenté ces dernières années», déclare-t-il dans un entretien. En tant que directeur des études sur le Proche-Orient au German Institute for Global and Area Studies (GIGA) à Hambourg, il observe la situation au Proche-Orient de près depuis des années.

Selon Woertz, on peut supposer que Téhéran joue un certain rôle dans les attaques des Houthis en leur livrant des armes. Il n'est pas clair si cela a également été le cas lors de l'incident de dimanche, a-t-il ajouté.

«Les Houthis ont plus d'autonomie vis-à-vis de l'Iran que le Hezbollah, où cette fonction de suppléance est nettement plus marquée»
Eckart Woertz, expert du Proche-Orient

Ali Fathollah-Nejad, politologue pour le Proche et le Moyen-Orient et directeur du Center for Middle East and Global Order (CMEG), considère en revanche que les attaques en mer Rouge sont souhaitées par Téhéran: «Les attaques des Houthis ne doivent pas être considérées indépendamment des aspirations de l'Iran», explique l'expert.

«L'Iran tente d'activer ses alliés dans la région afin de développer une force de dissuasion face à Israël et aux Etats-Unis. Les attaques des Houthis en font partie.»
Ali Fathollah-Nejad

Il ne devrait toutefois pas y avoir d'escalade massive, dit Woertz. Pour en comprendre la raison, il suffit de jeter un coup d'œil au Yémen: le pays est considéré comme l'un des plus pauvres du monde.

«Du point de vue politique, les Houthis et l'Iran ne le souhaitent pas. Ils devraient s'attendre à des conséquences négatives massives»
Ali Fathollah-Nejad

Depuis 2014, le pays est en proie à une guerre civile qui a plongé la population dans une crise économique et humanitaire. Plus de 15 000 personnes ont été tuées jusqu'à présent. Environ 80% de la population dépend de l'aide humanitaire internationale. Les observateurs ne voient donc dans les Houthis qu'un faible allié, même pour le régime iranien.

Les Houthis sont au pouvoir dans le nord du pays. Un gouvernement soutenu par l'Arabie saoudite contrôle cependant le sud. A l'instar de l'organisation Hezbollah, les Houthis pourraient également craindre une perte de soutien au sein de la population s'ils contribuaient à une nouvelle escalade de la situation. A cela s'ajoute, selon Woertz, le fait que les capacités militaires des Houthis ne sont pas assez développées pour pouvoir paralyser le trafic maritime en mer Rouge.

Un acteur majeur en mer Rouge

Les dernières attaques montrent néanmoins que les rebelles ne plaisantent pas avec leurs menaces contre Israël. Dernièrement, ils se sont joints aux attaques de roquettes du Hamas. Dans le champ de bataille de la mer Rouge, ils sont l'un des principaux acteurs. C'est là, le long de la côte yéménite, que passe l'une des plus importantes voies maritimes du monde en direction du canal de Suez en Egypte. Elle offre la liaison maritime la plus courte entre l'Asie et l'Europe. Environ 10% de l'ensemble du commerce mondial passe par la mer Rouge.

L'armée américaine déplore que les attaques des Houthis constituent «une menace directe pour le commerce international et la sécurité maritime». Elles ont mis en danger la vie des équipages internationaux. Les Etats-Unis discuteraient désormais de «toutes les mesures appropriées» en coordination avec les partenaires internationaux. «Il est certain que les Etats-Unis vont renforcer la protection des voies maritimes et, si nécessaire, prendre des contre-mesures au Yémen, mais si cela aura lieu et sous quelle forme, cela relève de la spéculation», estime Woertz à propos de la réaction de la marine américaine.

Réaction américaine «très minime»

Peu après le début de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre, Washington avait déjà envoyé dans la région deux porte-avions, leurs navires d'escorte et environ 2000 soldats de la marine. Ils servent en premier lieu à la dissuasion et ne doivent intervenir qu'en cas d'urgence - des urgences qui se sont déjà produites à plusieurs reprises au cours des dernières semaines. «Le fait qu'il y ait des navires de guerre capables d'écarter les dangers est très important pour la navigation civile», explique Woertz. Dans ce domaine, les Etats-Unis restent «un acteur très important», selon l'expert.

«Jusqu'à présent, les réactions américaines sont très minimes»
Ali Fathollah-Nejad

Des mesures concrètes contre les rebelles houthis au Yémen pourraient toutefois s'avérer compliquées pour les Etats-Unis: «Les Etats-Unis pourraient repérer les rampes de lancement à partir desquelles les Houthis tirent leurs missiles. Mais cela pourrait s'avérer difficile, surtout si les rampes de lancement sont mobiles», explique l'expert. Ali Fathollah-Nejad est du même avis. Selon lui, il est pour l'instant impossible de dire si cela va changer.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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