Vous avez cinq millions de dollars sous le coude, ou dans votre petit bas de laine? Le président américain a lancé le site trumpcard.gov pour réclamer sa fameuse Trump Card, comme promis lors de sa campagne.
Ainsi, si vous avez les ressources financières nécessaires, oubliez la Green Card gagnée à la sueur d’années de procédure, ou à coup de loterie et de visas familiaux. Place à la Gold Card, la version haute couture du rêve américain, pour ceux qui préfèrent prendre le raccourci en Bentley plutôt que la file d’attente.
Une carte dorée, ou doraayy comme disent les gens qui ont les moyens de se l’offrir, qui donne accès à un visa permanent pour les Etats-Unis. Et oui, pour l’exemple, Donald Trump a mis sa propre tête dessus. Cet homme est un génie.
C’est un «visa permanent à 5 millions de dollars» (soit 4 millions de francs à la louche), annoncé comme une version très haut de gamme du programme EB-5 (déjà existant, et destiné aux étrangers capables d’investir dans l’économie américaine). Mais selon Donald Trump et ses équipes, l’EB-5 est «trop sujet à la fraude», trop bureaucratique. Bref, pas assez sexy.
Trump holding up a gold card with his face on it: For $5 million, this can be yours pic.twitter.com/aJtjn077Mc
— Acyn (@Acyn) April 3, 2025
La Trump Card promet un accès express à la résidence permanente, avec un chemin «simplifié» vers la citoyenneté. Les personnes intéressées peuvent déjà s’inscrire sur le site trumpcard.gov, ouvert depuis le mercredi 11 juin. Le formulaire tient en quelques champs: nom, email, région du monde, entreprise ou particulier… et basta. C’est tout. On vous rappellera (ou pas).
Le site, d’ailleurs, a déjà fait couler pas mal d’encre numérique. «Le site le moins cher pour vendre le visa le plus cher du monde», titrait The Daily Beast. Il faut dire que pour le moment, la plateforme ressemble davantage à un projet étudiant de 2006, avec une interface minimaliste et aucun détail légal en vue.
Mais si l’on en croit l’équipe de Trump, ça n’a pas empêché des milliers de personnes de s’inscrire. «It’s going viral», assure l’entourage du président. On espère que l’email de confirmation arrive avec un hologramme de l’aigle américain qui crie «U-S-A! U-S-A!».
Dans la bouche de Trump, c’est simple: les gens riches viendront dans ce pays en achetant cette carte.
Le rêve américain, version Wall Street. Howard Lutnick, ancien CEO de Cantor Fitzgerald et désormais secrétaire au Commerce dans l’équipe Trump, va encore plus loin: il imagine un million de Gold Cards vendues. Soit, tenez-vous bien, 5000 milliards de dollars injectés dans l’économie américaine. De quoi racheter la dette nationale, reconstruire tous les ponts du Midwest et, pourquoi pas, repeindre la Maison-Blanche en or. The sky is the limit.
Bon, pour le moment, personne n’a encore demandé d’étude de faisabilité au sein de l'équipe du président (pour la mise en place de la Gold Card d’un point de vue légal j’entends, pas pour transformer la Maison-Blanche en Golden House).
Car attention: ce que Trump vend, ce n’est pas directement la citoyenneté. C’est un «visa permanent» avec «un chemin vers» le passeport américain. Cette subtilité juridique est cruciale. Car elle permet à l’administration Trump de dire que le Congrès n’a pas besoin de valider. Pas de loi à passer, pas de débat au Sénat. Juste un formulaire en ligne et un virement de 5 millions. En théorie.
Sauf que cette théorie risque de rencontrer un obstacle de taille: la réalité juridique. Déjà, plusieurs experts en droit constitutionnel soulignent que ce programme pourrait être attaqué en justice, notamment s’il outrepasse les lois actuelles sur l’immigration. Affaire à suivre, donc.
Pur l'heure, Trump, grand défenseur de la lutte contre l’immigration illégale, propose désormais un système où l’immigration devient un produit de luxe. Le «rêve américain» pour ceux qui ont déjà coché toutes les cases du succès. Mais le président américain ne s’en cache pas. Il veut attirer les riches. Les entrepreneurs. Les «winners». L’Amérique ne serait plus un refuge, mais un club fermé. Et la possibilité, ensuite, d’avoir un vrai passeport.
On ne sait pas encore si cette Gold Card fonctionnera, ni combien de millionnaires seront prêts à faire un joli virement PayPal pour se l’offrir. Ce qui est sûr, c’est que le storytelling est parfaitement rodé. Et au fond, c’est peut-être ça, le vrai génie de Trump.