Les défenseurs des droits de l'homme dénoncent la «machine de mort» qui tourne à plein régime en Iran: depuis janvier, le régime a exécuté au moins 354 personnes. Cela représente deux exécutions par jour et presque 100 de plus que l'année dernière à la même période. Seule la Chine exécute plus de personnes que l'Iran.
Les détenus rapportent que de nombreuses condamnations à mort sont déjà fixées au début du procès. Les exécutions sont en forte hausse depuis l'arrivée au pouvoir du président Ebrahim Raïssi, il y a deux ans, alors qu'une modification de la loi aurait dû réduire les condamnations.
Les victimes seraient avant tout des minorités ethniques et d'autres groupes marginaux.
Selon Mahmood Amiry-Moghaddam, le régime veut ainsi empêcher de nouvelles protestations. Les dirigeants de la République islamique augmentent donc la pression sur les dissidents. Des experts du Conseil des droits de l'homme de l'ONU viennent de signaler à Genève que Téhéran veut punir plus sévèrement les femmes qui enfreignent l'obligation de porter le foulard.
Pour rappel, en septembre dernier, la mort de Mahsa Amini, 22 ans, aux mains de la police religieuse, avait déclenché des manifestations nationales contre le régime des mollahs et ébranlé le pouvoir du clergé chiite. Dans la rue, les manifestations se sont calmées, mais les raisons de la révolte – port obligatoire du foulard, corruption, crise économique et manque de participation politique – n'ont pas changé.
Depuis la victoire du partisan de la ligne dure Ebrahim Raïssi lors des élections présidentielles il y a deux ans, les juges iraniens font preuve d'une plus grande sévérité. L'année dernière, au moins 582 personnes ont été exécutées, soit 77% de plus qu'en 2021. Cette année, le nombre pourrait encore augmenter.
L'organisation de Mahmood Amiry-Moghaddam, qui a dû s'exiler en Norvège, a déclaré que cinq manifestants figuraient parmi les victimes exécutées depuis janvier. A la fin de l'année dernière, deux autres personnes avaient été exécutées pour avoir participé aux protestations. Selon les Nations unies, au moins 19 autres manifestants ont été condamnés à mort.
La plupart des condamnations à mort qui ont eu lieu cette année – au moins 206 – ont été infligées pour des délits présumés liés à la drogue. Selon le IHR, le nombre d'exécutions suite à des procès pour drogue a augmenté de 126% par rapport aux premiers mois de 2022.
Cette forte augmentation montre que les autorités iraniennes utilisent la peine de mort comme un instrument d'intimidation, car une modification de la loi en 2018 avait pour but de limiter le recours à cette sentence pour les délits liés aux stupéfiants. Jusqu'alors, la possession de cinq kilos d'opium et de 30g d'héroïne était passible de la potence. La réforme a relevé les seuils à 50 kg d'opium et deux kilos d'héroïne. Malgré cela, de plus en plus de personnes sont condamnées à mort pour une prétendue possession de drogue.
Selon la Convention des Nations unies sur les droits civils et politiques, que l'Iran a ratifiée, la peine de mort ne peut être prononcée que pour les «crimes les plus graves». Le commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Volker Türk, a donc critiqué les exécutions pour des délits liés à la drogue en Iran, les jugeant incompatibles avec les normes internationales en matière de droits de l'homme.
Les procès liés à la drogue se déroulent devant les tristement célèbres tribunaux révolutionnaires, où les accusés n'ont souvent pas d'avocat et où les aveux sont extorqués sous la torture. «Au tribunal, on vous demande si vous avez possédé de la drogue ou non», a déclaré un condamné à mort lors d'un entretien avec Amnesty International, «Et c'est égal si vous dites oui ou non».
De plus, depuis l'année dernière, les condamnations à mort sont à nouveau effectuées en public. Il y a deux mois, un homme a été conduit à la potence sur une place de la ville nord-iranienne de Maragheh pour avoir eu des relations illégales avec des femmes; la justice n'a pas précisé ce qu'elle lui reprochait exactement.
Plusieurs centaines de spectateurs et de journalistes ont assisté à l'exécution. Le chef du IHR, Amiry-Moghaddam, accuse le régime de vouloir assurer sa survie par des «pratiques moyenâgeuses» et d'intimider la société.
Des étrangers se trouvent également dans les couloirs de la mort iraniens. En avril, la Cour suprême de la République islamique a confirmé la condamnation à mort de Jamshid Sharmahd, un Allemand d'origine iranienne accusé de terrorisme. Un mois plus tard, la justice a fait exécuter le double national suédois et iranien Habib Chaab.
Traduit et adapté de l'allemand par Léa Krejci