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Comment la jeunesse alimente la haine entre Israël et Palestine

A demonstrator adds burning tires during a protest against Israeli military raid in the West Bank city of Nablus, along the border fence with Israel, in east of Gaza City, Wednesday, Feb. 22, 2023. Pa ...
Des Palestiniens brûlent des pneus dans la ville de Naplouse en Cisjordanie, le long de la clôture frontalière avec Israël. Le conflit au Proche-Orient est sur le point de connaître une nouvelle dégradation, préviennent les experts.photo: keystone

«Guerre TikTok»: comment les jeunes alimentent la haine au Moyen-Orient

Des deux côtés du conflit israélo-palestinien, les réseaux sociaux contribuent à radicaliser les jeunes de façon croissante.
05.03.2023, 08:0105.03.2023, 11:25
Anne-Kathrin Hamilton / watson.de
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Des Israéliens et des Palestiniens tués, des maisons en feu, des bombes, des coups, des tirs, des cris et des enfants qui grandissent au cœur de tout cela.

Une lutte sans fin pour un bout de terrain.

Pour certains, ce territoire est sacré et pour d'autres, il représente la patrie. Pour beaucoup, c'est les deux. Les Israéliens et les Palestiniens se battent depuis si longtemps qu'il est difficile de garder une vue d'ensemble.

epa10495112 An armed Israeli soldier keeps watch in the West Bank town of Hawara, near the city of Nablus, 28 February 2023. Israeli security forces have been conducting searches in the area and set u ...
Les soldats israéliens et les Palestiniens s'affrontent régulièrement.photo: keystone

Accusations, haine, terreur et violence - le conflit au Proche-Orient s'est transformé en une querelle complexe. Les générations qui grandissent ne savent pas ce que signifie la paix. Apparemment, les jeunes sont déjà tellement imprégnés du conflit qu'il est devenu une partie d'eux-mêmes.

Les enfants palestiniens sont «conditionnés»

«Dans le territoire palestinien de Gaza, il existe des camps de terreur pour les écoliers», explique Arye Sharuz Shalicar en réponse à une question de watson. Il vit lui-même en Israël et conseille le gouvernement israélien. Selon lui, les enfants palestiniens sont endoctrinés dès leur plus jeune âge à la haine des Juifs. Dans les camps terroristes, on propage le récit selon lequel Israël est une invention coloniale des Juifs européens.

«Ils pensent que nous n'avons rien à faire ici. C'est une manipulation de l'Histoire»
Shalicar

Dans son livre Shalom Habibi, il parle des relations tendues entre Juifs et Arabes — et de la possibilité de paix et d'amitié. Selon l'auteur germano-persano-israélien, les enfants israéliens sont éduqués dans les écoles à la tolérance et au respect mutuel pour tous les êtres humains.

epa10488293 A Palestinian throws back a tear gas grenade during clashes with Israeli soldiers after a protest at Bet Dajan village near the West Bank city of Nablus, 24 February 2023. Palestinians pro ...
Un Palestinien portant un masque de protection renvoie un bidon de gaz lacrymogène tiré par des soldats israéliens.photo: keystone

Selon Shalicar, on présente aux enfants palestiniens une «réalité très simple»: les Juifs sont des Européens blancs qui n'ont rien à faire ici; ils colonisent, volent et assassinent — ce qui fait d'eux les ennemis.

Violence contre la population civile

Mais la réalité des enfants palestiniens comprend aussi la violence de la part d'Israël, que Shalicar ne mentionne pas.

C'est ce que montrent les récentes attaques en Cisjordanie. A Naplouse, un tireur présumé palestinien a tué deux Israéliens. Une foule de colons israéliens s'est ensuite formée dans la ville palestinienne de Hawara. Les assaillants ont mis le feu à des maisons, des magasins et des véhicules. Le Croissant-Rouge palestinien a fait état de plus de 100 blessés.

De nombreuses maisons sont en feu — des enfants palestiniens perdent leur logement. Ils avaient peut-être auparavant déjà dû céder leur maison à une famille juive.

Déformation de l'histoire dans les écoles

Qu'en est-il de ces enfants palestiniens qui voient des Juifs frapper à leur porte et dire que c'est désormais leur maison? Shalicar comprend la colère. Mais il n'y a pas un seul Juif dans les villages palestiniens, d'après lui. «Nous serions immédiatement assassinés», affirme-t-il. «Les Juifs vivent dans leurs propres villages et villes.»

Palestinians sit in front of their house next to the beach during a rainy day in Dier al-Balah, central Gaza Strip, Saturday, Feb. 4, 2023. (AP Photo/Fatima Shbair)
Par une journée pluvieuse, des Palestiniens sont assis devant leur maison sur la plage de Dier al-Balah, au milieu de la bande de Gaza.photo: keystone

Dans les écoles, on n'apprend pas aux Palestiniens que les Juifs ont toujours vécu ici, selon Shalicar. On n'enseignerait pas non plus qu'en 1947, les Nations unies (ONU) avaient proposé aux Juifs et aux Arabes de revendiquer chacun une partie du pays. «Mais les Arabes ont refusé à l'époque», explique l'Israélien.

On inculque l’idée suivante aux enfants dès leur plus jeune âge: l'Etat d'Israël n'a pas sa place ici. Selon Shalicar, les jeunes ne se débarrassent pas facilement de ce schéma de pensée.

«Les seuls Juifs qu'ils rencontrent, par exemple en Cisjordanie, sont probablement des soldats israéliens. Cela renforce l'image que tous les Juifs sont mauvais.»
Shalicar
An Israeli settler with a weapon stands behind an Israeli soldier during clashes after Israeli settlers attacked Palestinians in Huwara, near the West Bank town of Nablus, Thursday, Oct. 13, 2022. (AP ...
Un colon juif orthodoxe armé se tient derrière un soldat israélien.image d’archive: keystone

Sur une telle base, un rapprochement entre jeunes israéliens et palestiniens serait impensable. Lui-même n'enverrait actuellement ses enfants dans aucun projet commun.

Un mur de méfiance, de peur et de violence

«La peur pour eux est trop grande, la confiance en l'autre partie trop faible pour que les Palestiniens nous accueillent à bras ouverts», dit-il. Ce n'est que lorsqu'une vie tranquille, côte à côte, sera possible que les jeunes pourront à nouveau se rencontrer et nouer des amitiés.

Mais la balle n'est pas seulement dans le camp des Palestiniens. Israël aussi doit tendre la main à la paix, estime la reporter indépendante Steffi Hentschke dans le podcast de Zeit-online.

«Le gouvernement israélien devrait absolument chercher le dialogue avec l'Autorité palestinienne»
Steffi Hentschke depuis Tel Aviv«Zeit-Online»

Selon elle, il faut donner aux Palestiniens le sentiment d'avoir le contrôle, au moins partiel, de la Cisjordanie occupée par Israël.

Un conflit émotionnel de part et d'autre

Le psychologue germano-israélien Ahmad Mansour ne veut pas non plus considérer le conflit de manière unidimensionnelle. Il constate une radicalisation croissante chez les jeunes des deux côtés, que ce soit du côté israélien ou palestinien. Les réseaux sociaux jouent ici un rôle important.

Ahmad Mansour
Ahmad MansourBild: keystone

«J'observe des choses des deux côtés du conflit qui me préoccupent», souligne-t-il. Mansour est né dans une petite ville arabe d'Israël. Aujourd'hui, il lutte contre la radicalisation des jeunes musulmans. Selon lui, ce qui est visible dans ce conflit, c'est qu'il s'agit d'émotions et non de faits. Il appelle cela la «guerre de Tiktok».

La jeune génération célèbre sa violence, ses émotions et son rôle de victime des deux côtés. Des obstacles se dressent ainsi sur le chemin de la paix orienté vers des solutions et des faits. Selon l'expert, ce sont surtout les Palestiniens qui transfèrent leur propagande sur les médias sociaux et ne donnent ainsi aucune chance aux voix rationnelles et orientées vers des solutions.

Radicalisation des jeunes sur Tiktok

Il s'agit d'une véritable radicalisation de Tiktok, que le psychologue n'avait jamais connue auparavant avec une telle intensité. Le portail vidéo Tiktok est rempli de propagande faite par des jeunes pour des jeunes. Les contenus ne sont guère soumis à un examen critique. Le problème est encore aggravé par un autre facteur: la jeune génération ne sait plus à quel point une escalade du conflit peut être brutale et sanglante.

«Nous avons une génération de jeunes qui sont nés en 2003/2004 et qui n'ont pas vécu la "deuxième intifada" de 2000»
Ahmad Mansour, psychologue
Palestinians celebrate after a shooting attack near a synagogue in Jerusalem, in Gaza City, Friday, Jan. 27, 2023. A Palestinian gunman opened fire outside an east Jerusalem synagogue Friday night, ki ...
Les Palestiniens de la ville de Gaza célèbrent ce qu'ils considèrent comme un attentat réussi.photo: keystone

A l'époque, des groupes radicaux palestiniens avaient mené un soulèvement armé et commis des attentats-suicides contre des civils israéliens.

En réponse, l'armée israélienne a lancé des attaques de représailles, détruisant une grande partie des infrastructures dans les territoires palestiniens. Cela a laissé des expériences traumatisantes des deux côtés mais la jeune génération n'a pas été marquée par cet épisode. C'est pourquoi leur attitude est plus brutale et plus intransigeante, estime l'expert.

Il voit également moins d'idéologie du côté palestinien. Il ne s'agit pas de l'organisation islamique radicale palestinienne Hamas, c'est-à-dire d'un récit religieux.

«Ce sont simplement des petits délinquants qui s'organisent et qui espèrent être reconnus dans leur communauté par le biais de cette lutte»
Mansour

Mansour ne pense pas que les jeunes puissent contribuer à mettre un terme au conflit au Proche-Orient.

epa10434281 Palestinians attend a protest in Jenin camp after nine Palestinians died during a raid by Israeli forces in the West Bank, in Gaza City, 27 January 2023. EPA/MOHAMMED SABER
Jeunes Palestiniens lors d'une manifestation en Cisjordanie.photo: keystone

L'expert se montre particulièrement inquiet à l'approche du ramadan. Ces dernières années, ces jours fériés importants ont régulièrement donné lieu à des débordements massifs. «Ce sont des périodes extrêmement sensibles», estime Mansour. Il a le sentiment qu'une situation de crise est inévitable.

Un impressionnant banc de méduses aperçu au large des côtes d'Israël
Video: watson
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