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L'ingérence de Trump est «inédite dans l'histoire moderne»

Trump cultive son goût de l'ingérence à l'étranger.
Les prises de position de Donald Trump ont souvent des airs de menaces, surtout lorsqu'il s'agit de l'Amérique du Sud.Image: Imago, montage watson

Cette tactique de Trump est «inédite dans l'histoire moderne»

Donald Trump multiplie les ingérences à l’étranger, affichant sans retenue ses préférences électorales. Une pratique inédite qui rompt avec les usages diplomatiques usuels.
03.12.2025, 12:1803.12.2025, 12:18
Léon BRUNEAU, Washington / AFP

De l'Europe à l'Amérique latine, Donald Trump multiplie les faits d'ingérence dans les affaires intérieures de pays alliés ou non, y compris lors d'élections.

Faisant fi des usages diplomatiques, le président américain n'hésite pas à distribuer bons et mauvais points à tel ou tel dirigeant étranger, et à s'ingérer dans les campagnes électorales à coup de messages sur son réseau social.

Du jamais vu dans l'histoire moderne

Cela n'est pas nouveau, en particulier en Amérique latine, que les Etats-Unis voient comme une chasse gardée. Mais aucun président moderne ne l'a fait de manière aussi effrontée que Donald Trump, selon des experts.

Thomas Carothers, du think tank Carnegie Endowment for International Peace à Washington, confie:

«Je ne me souviens pas d'un seul cas où un président américain ait été prêt à afficher aussi ouvertement ses préférences dans des élections étrangères, du moins dans l'histoire moderne.»
«Les Etats-Unis ont souvent été accusés d'ingérence dans les élections d'autres pays pendant la Guerre froide, mais cela ne s'est jamais fait de manière aussi ouverte et publique»

Dernier exemple en date: le Honduras, un pays de 11 millions d'habitants parmi les plus pauvres et instables d'Amérique latine. Donald Trump avait menacé sur son réseau Truth Social, sans apporter de preuves soutenant sa déclaration:

«On dirait que le Honduras est en train d'essayer de changer le résultat de son élection présidentielle. S'ils le font, ils le paieront cher!»

Le dirigeant républicain avait expressément soutenu l'homme d'affaires Nasry Asfura, quelques jours avant les élections de dimanche, disant qu'il «ne pourrait pas travailler» avec la candidate de la gauche au pouvoir Rixi Moncada «et les communistes», mais aussi qu'il ne faisait «pas confiance» au candidat et présentateur de télévision Salvador Nasralla.

Les deux candidats de droite, Asfura et Nasralla, étaient encore hier quasiment à égalité alors que le dépouillement se poursuit encore, selon le Conseil national électoral. Aujourd'hui, une faible tendance favorable à Nasralla se dessine, et un peu plus des deux tiers des bulletins ont été pris en compte. L'élection va, semble-t-il, se jouer à un cheveu.

Le candidat à la présidence du Parti national du Honduras, Nasry Asfura, lors des votes le 30 novembre 2025 à Tegucigalpa, au Honduras.
Le candidat à la présidence du Parti national du Honduras, Nasry Asfura, lors des votes le 30 novembre 2025 à Tegucigalpa, au Honduras.Image: Imago

Un schéma qui se répète dans plusieurs pays

Que ce soit en Argentine, où il s'était empressé d'appuyer son allié Javier Milei, ou encore en Equateur et en Colombie, Donald Trump tente d'influer sur le résultat d'élections, mais aussi des procédures en justice, comme pour l'ex-président brésilien d'extrême droite Jair Bolsonaro, condamné pour coup d'Etat.

Donald Trump n'hésite pas non plus à conditionner l'aide américaine à ses affinités avec leurs dirigeants: il a assuré que, si Asfura «ne remporte pas les élections, les Etats-Unis ne gaspilleront pas leur argent» au Honduras.

Pour Will Freeman, expert de l'Amérique latine au Council on Foreign Relations à New York:

«Il s'agit d'une tentative constante d'influencer la politique, afin de renforcer un glissement vers la droite qui gagne en puissance dans toute la région»

«Mais je ne pense pas que ces tentatives d'ingérence soient couronnées de succès dans tous les cas», ajoute-t-il en citant en particulier le Brésil du président Lula ou la Colombie de Gustavo Petro.

Quant au Venezuela, dirigé d'une main de fer par Nicolas Maduro, Trump fait planer la menace d'une intervention militaire, officiellement au nom de la guerre contre le trafic de drogue.

Le président autoritaire vénézuélien Nicolas Maduro, lors d'un rassemblement à Caracas, capitale du Venezuela.
Le président autoritaire vénézuélien Nicolas Maduro, lors d'un rassemblement à Caracas, capitale du Venezuela.Image: Imago

Des interventions également en Europe

Ailleurs dans le monde, le président Trump a écrit à son homologue israélien Isaac Herzog pour lui demander d'accorder une grâce au Premier ministre Benjamin Netanyahou, poursuivi pour corruption.

Il a en outre appelé les Européens à mieux traiter son allié et «ami», le Premier ministre hongrois Viktor Orban.

En mai dernier, deux semaines avant la présidentielle en Pologne, Trump avait reçu l'historien Karol Nawrocki, promu par l'opposition nationaliste du Droit et Justice (PiS), suscitant des accusations d'ingérence américaine.

L'administration Trump mène aussi une large offensive contre la «détérioration», selon elle, des droits humains en Europe, dont en Allemagne, au Royaume-Uni ou en France, visant notamment les restrictions à la liberté d'expression.

Epousant les vues des partis de droite comme l'AfD, le vice-président américain JD Vance avait accablé les Allemands et, plus généralement, les Européens, lors d'un discours à Munich en février dans lequel il avait affirmé que la liberté d'expression «reculait» dans le continent.

«C'est différent de la période de la Guerre froide, où les Etats-Unis favorisaient souvent une personne en particulier, mais pour des raisons géostratégiques», souligne Carothers avant d'ajouter:

«Là, Donald Trump estime avoir un groupe d'amis à travers le monde qu'il souhaite aider»
JD Vance, lors de sa prise de parole à Munich, en février de cette année.
JD Vance, lors de sa prise de parole à Munich, en février de cette année.Image: Imago
Donald Trump est photogénique, la preuve
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Donald Trump est photogénique, la preuve
source: corbis news / view press
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Donald Trump triche-t-il au golf ?
Video: watson
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