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Pourquoi 2026 sera cruciale pour la sécurité nucléaire mondiale

Le monde glisse vers un nucléaire sans arbitre
Le monde glisse vers un nucléaire sans arbitre.Image: Shutterstock

La dissuasion nucléaire bascule vers un monde sans règles

L’architecture mondiale de maîtrise des armements s’effrite, laissant place à une dissuasion nucléaire sans inspections, sans arbitrage et sans mécanismes multilatéraux robustes.
28.12.2025, 07:0128.12.2025, 07:01
Fabien Zamora, paris / afp

L'édifice juridique international de maîtrise des armements nucléaires risque fort de continuer à se lézarder en 2026, augmentant les risques de voir émerger une crise nucléaire difficile à gérer dans un contexte international déjà très volatil.

Deux rendez-vous importants sont à surveiller au premier semestre: l'expiration du traité bilatéral américano-russe New Start le 5 février, et la conférence de révision (Revcon) du Traité de non prolifération (TNP), la pierre angulaire de l'architecture de sécurité nucléaire, en avril à New York.

C'est quoi ce rendez-vous?

Cette réunion, qui se tient tous les quatre ou cinq ans, a pour but de faire vivre le TNP. Mais lors des deux dernières édition, les 191 Etats signataires ont échoué à adopter un texte final, et ce sera encore vraisemblablement le cas, selon différents experts.

«Cette Revcon va être difficile», a prévenu début décembre Alexandra Bell, présidente du Bulletin of the Atomic Scientists, organisme américain de référence, estimant que:

«Les perspectives sont sombres sur l'architecture de contrôle des armements»

«Nous sommes au point de démantèlement quasi-complet de cette architecture», a jugé le russe Anton Khlopkov, directeur du Centre pour l'énergie et les études de sécurité (Ceness) lors de la même conférence en ligne organisée par les Nations Unies. Pour la Revcon, «il faut rester réaliste dans les circonstances actuelles et essayer, au mieux, de préserver l'existant».

Puissance chinoise rebat les cartes

Des frappes américaines sur les sites nucléaires iraniens au tir d'essai du missile à propulsion nucléaire russe Bourevestnik en passant par les déclarations de Donald Trump sur l'éventuelle reprise d'essais nucléaires, le panorama nucléaire s'est assombri en 2025, alors que «l'architecture de maîtrise des armements s'effrite», explique à l'AFP la Française Emmanuelle Maitre, de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

Vidéo: watson

Tout cet édifice s'est construit au fil des décennies sur un axe Moscou-Washington, mais la montée en puissance chinoise et les évolutions technologiques le fragilisent. Et comme les relations internationales sont de plus en plus tendues, personne n'a trouvé le moyen de l'adapter pour l'instant.

«L'interdépendance croissante entre les forces nucléaires et conventionnelles et l'émergence de technologies de rupture (réd: projet américain de Golden Dome, les nouvelles armes hypersoniques) ont transformé la dissuasion nucléaire traditionnelle en un concept multidomaine», résume Hua Han, de l'université de Pékin, dans les minutes d'un colloque organisé par le centre de recherche pakistanais CISS en avril:

«La configuration trilatérale introduit des complexités bien supérieures à celles du modèle bilatéral de l'époque de la Guerre froide. La coopération croissante entre la Chine et la Russie complexifie les calculs de dissuasion, en particulier dans les deux principaux théâtres d'opérations: l'Europe et l'Asie-Pacifique.»

Résultat: le New Start, qui prévoit de limiter le nombre d'armes et des mécanismes de contrôle, va très probablement s'éteindre.

«Tout le volet inspection n'est déjà plus opérant, les notifications quand on déplace un missile, etc, tout cela a disparu. Il reste l'engagement volontaire de rester dans les plafonds», rappelle Emmanuelle Maitre.

Danger à long terme

En finir avec New Start «est dans l'intérêt des Etats-Unis», affirme Robert Peters, de l'influent centre de réflexion conservateur Heritage Foundation, résumant la volonté d'une large partie de la communauté stratégique américaine: ne pas se lier les mains avec Moscou seulement. Pékin, qui a pour l'instant moins d'armes, refuse jusqu'ici un dialogue trilatéral de désarmement.

«La Chine est la puissance nucléaire dont la croissance est la plus rapide au monde. Elle construit cent nouvelles ogives par an et possède désormais plus de silos de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) que les Etats-Unis», soulignait-il mi-décembre lors d'un colloque de l'IISS britannique:

«Le traité New Start n'apporte aucune solution à ce problème»

Cependant, il ne faut pas s'attendre à de lourdes conséquences dès le 6 février. A Washington comme à Moscou, «il y a une petite marge de manœuvre pour remettre des armes en service mais cela ne peut pas être numériquement très important. Il y a des goulets d'étranglement» qui ralentiront une remontée en puissance, selon Emmanuelle Maitre.

Mais ces abdications à venir accroissent les risques de voir émerger une crise nucléaire et un monde sans outil pour la résoudre autrement que par la force.

S'il n'y a pas de document final à la Revcon, «il n'y aura pas de conséquence immédiate et dommageable», résume Emmanuelle Maitre, mais «moins le TNP est fonctionnel, moins on peut faire émerger des solutions collectives en cas de crise».

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