Selon des informations récentes, la Russie a déplacé une partie de ses troupes et de son matériel stationnés en Syrie vers la Libye. Après la chute du régime Assad, Moscou avait initialement déployé des navires de guerre du port de Tartous vers les eaux internationales. Des images satellites montrent une activité accrue sur les bases militaires russes en Syrie.
D'après le Wall Street Journal, des avions russes auraient transporté des systèmes de défense antiaérienne dans l’est de la Libye, une région contrôlée par le commandant Khalifa Haftar, soutenu par Moscou.
Les infrastructures militaires russes en Syrie ne servaient pas uniquement à appuyer le régime d’Assad. Elles étaient aussi utilisées par Poutine pour fournir des armes, des mercenaires et des troupes à d’autres pays du Moyen-Orient et d’Afrique. Le port de Tartous faisait office de chantier naval pour les navires de guerre russes opérant en Méditerranée.
Avec la prise de pouvoir des rebelles à Damas, l’avenir de la collaboration entre la Russie et les nouvelles autorités syriennes reste incertain. Les récents mouvements russes seraient donc une mesure préventive, notamment dans le contexte des frappes israéliennes en Syrie visant à affaiblir les capacités militaires de l’armée syrienne.
#Russia appears to be reinforcing its bases in #Libya as it faces uncertain future in #Syria, its other foothold in Mediterranean
— Sophia Yan (@sophia_yan) December 16, 2024
At least 3 RUS military cargo IL-76s flew #Belarus-Libya since Dec 8 when RUS-allied #Assad regime in Syria toppled by rebels - FlightRadar24 data pic.twitter.com/oKcgjwA3aV
Poutine semble vouloir raviver une relation de longue date avec la Libye. Des troupes et du matériel pourraient y être stationnés, du moins temporairement. La Russie a déjà été présente dans ce pays ravagé par la guerre civile, notamment via les mercenaires du groupe Wagner. Ces derniers auraient utilisé des bases militaires libyennes comme plateformes pour leurs opérations en Afrique, rapporte le média américain.
Ce redéploiement rapprocherait les forces russes des pays membres de l’Otan et de l’Union européenne. Les ports de Benghazi et Tobrouk, par exemple, ne sont qu’à quelques centaines de kilomètres de l’Italie et de la Grèce. Mercredi dernier, des navires de guerre russes ont déjà suscité l’attention près de Majorque. Pour Khalifa Haftar, l’arrivée de systèmes radars russes serait un atout de taille, lui qui les réclame depuis longtemps.
Depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est plongée dans le chaos, divisée entre des factions rivales et l’influence de puissances étrangères. En 2019, un conflit civil majeur a éclaté. Aujourd’hui, le pays est divisé entre deux camps principaux: le nord-ouest, où siège le gouvernement officiel reconnu par les Nations unies, soutenu notamment par la Turquie, le Qatar et l’Italie.
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov, a déclaré, lundi, que Moscou est en contact avec la direction politique de Hayat Tahrir al-Cham (HTS) – le groupe rebelle ayant mené l’offensive contre Assad – pour discuter de l’avenir des bases russes en Syrie. Si celles-ci devaient être abandonnées au profit de la Libye, cela pourrait raviver le conflit libyen.
Avec une puissance militaire renforcée, Haftar pourrait tenter de prendre le contrôle total du pays, une ambition qui risquerait d’entraîner une opposition directe des États-Unis. L’année dernière, le directeur de la CIA, William Burns, aurait clairement exprimé cette préoccupation lors d’une visite sur place.
Il est également possible que le matériel militaire russe soit stocké temporairement en Libye. En l’absence d’un accord pérenne avec la Syrie, ces équipements – notamment les radars et navires – pourraient être rapatriés en Russie et réutilisés dans la guerre en Ukraine. Cependant, les capacités logistiques en Libye sont limitées. «Utiliser la Libye comme escale pour des opérations en Afrique imposerait des contraintes significatives sur la quantité d’équipement que Moscou pourrait transporter», explique Gleb Irisov, un ancien officier de l’armée de l’air russe ayant servi sur la base de Khmeimim en Syrie, dans le Wall Street Journal.
Traduit et adapté de l'allemand par Léon Dietrich