International
Russie

Les mères de jeunes recrues russes tirent la sonnette d'alarme

Les affiches publicitaires pour le service militaire en Ukraine sont omniprésentes à Moscou, mais les volontaires sont de moins en moins nombreux. C'est pourquoi les recrues doivent désormais s'y mett ...
Les affiches publicitaires pour le service militaire en Ukraine sont omniprésentes à Moscou, mais les volontaires sont de moins en moins nombreux. C'est pourquoi les recrues doivent désormais s'y mettre.image: Yuri Kochetkov/EPA

«Des écoliers comme chair à canon», les mamans russes tremblent

L'armée russe envoie délibérément de jeunes conscrits dans la zone de combat près de Koursk. Ceux-ci sont «tenus de défendre la patrie», justifie-t-on au ministère de la défense. C'en est trop pour les familles des recrues, qui se mobilisent.
22.08.2024, 06:06
Inna Hartwich, Moscou / ch media
Plus de «International»

Enrôlés en juillet, ils viennent de prêter serment début août pour défendre leur patrie. Et maintenant? Maintenant, les voici déjà en route vers la zone de combat. Vers Koursk. «Sauvez nos jeunes!», supplient avec désespoir les mères des conscrits de la région de Mourmansk, tout au nord de la Russie.

Depuis l'avancée aussi surprenante que réussie de l'armée ukrainienne en territoire russe près de Koursk, les dirigeants ne s'en cachent plus: ils envoient au combat des recrues fraîchement émoulues. Celles-ci ont «juré de défendre la patrie», justifie-t-on au ministère de la défense.

Le traumatisme afghan et tchétchène

Sauf que l'envoi sous la mitraille de ces recrues irrite autant qu'elle traumatise beaucoup de Russes. Depuis les guerres d'Afghanistan et de Tchétchénie, menées au prix d'une perte importante de conscrits à peine formés, la mobilisation de jeunes hommes pour faire la guerre ne va pas soi en Russie.

Jusqu'à présent, Vladimir Poutine s'était montré plutôt habile, n'engageant en Ukraine que des volontaires, des soldats ou des prisonniers qui ont signé un contrat spécial et que l'on rémunère correctement. Mais le pays a beaucoup changé depuis l'entrée de l'armée russe en Ukraine, en février 2021.

L'«opération spéciale» très peu contestée

Si les mères, au début des années 2000, pouvaient se rendre en Tchétchénie et sortir littéralement leurs fils du champ de bataille, il n'y a aujourd'hui, à l'heure de la censure militaire et de l'interdiction des rassemblements, plus guère de possibilités d'influer légalement sur la direction de l'Etat. D'autant plus que très peu remettent en question le sens de «l'opération militaire spéciale» menée par le Kremlin. Voilà plutôt ce qu'on lit et entend:

«Nous sommes des patriotes, Vladimir Vladimirovitch! Nous sommes à vos côtés! Ne laissez pas nos enfants mourir!»

Mais ces «enfants» envoyés face aux soldats ukrainiens meurent. Ou alors ils sont faits prisonniers. Plusieurs centaines de recrues sont actuellement portées disparues. L'armée ukrainienne publie régulièrement des photos de prisonniers russes. Les familles y reconnaissent des fils, des frères et des petits-enfants tout juste enrôlés. Les organisations humanitaires signalent une forte hausse des demandes de la population pour savoir comment éviter d'en arriver là.

Les parents rapportent que, à peine arrivés dans leur unité, leurs fils subissent des pressions pour signer des contrats avec le ministère de la Défense. Ils deviennent alors rapidement des soldats réguliers. Peu importe leur temps de service et s'ils ont acquis une spécialisation militaire.

«Il y a un danger de mort pour nos fils»

«Des combats ont lieu dans la région de Koursk. Il y a un danger de mort pour nos fils», peut-on lire dans l'appel des mères de la région de Mourmansk. Dans une autre pétition, les mères de recrues d'un régiment de tir motorisé de la région de Briansk, voisine de Koursk, demandent directement au président russe d'épargner leur progéniture.

Des mères écrivent au président russe:

«Ceux qui n'étaient hier encore que des écoliers sont envoyés sur le champ de bataille comme chair à canon»

«Des soldats d'élite lourdement armés se dressent face à nos enfants qui, pendant les quelques mois de leur formation, n'ont acquis qu'une seule chose: manier la pelle», se désolent-elles. Ces mères se plaignent de ne pas savoir où sont leurs fils – et semblent découvrir dans le même temps ce qui se passe depuis deux ans et demi dans leur pays.

Les généraux balaient les critiques des mères

Le Kremlin les a préservées pendant des mois d'un anéantissement de l'Ukraine, par tous les moyens de propagande, dépeignant la guerre sous des aspects romantiques et héroïques. Beaucoup de Russes continuent de croire que cette guerre ne les concerne pas. Même si elle les prive de leurs biens et des êtres qui leur sont chers, ils n'en veulent guère à leur président.

Dans un message vidéo, un commandant, Apti Alaudinov, de l'unité spéciale tchétchène Akhmat, se moque des complaintes maternelles:

«Ne faites pas de ces hommes des enfants que l'on met au lit avec une tétine! Tous, petits et grands, doivent se serrer les coudes. Il n'y a rien de mieux que de mourir pour sa patrie»

(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)

Cette crevette se venge
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
2 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
2
Une frappe aérienne tue 16 civils au Nigeria
Dans l'État de Zamfara, une frappe militaire a touché un groupe d'habitants mobilisés contre des bandits armés. L'incident relance les critiques sur les bavures de l'armée nigériane dans sa lutte contre les groupes criminels.

Au moins 16 personnes ont été tuées dans une frappe aérienne militaire dans l'Etat de Zamfara, dans le nord-ouest du Nigeria: un pilote a confondu des groupes d'autodéfense locaux avec des gangs criminels, ont indiqué des habitants dimanche à l'AFP.

L’article