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Cet essai révèle le retard de la Suisse en matière de drones

Eine Abwehrdrohne, aufgenommen bei einer technischen Erprobung, am Mittwoch, 17. Dezember 2025, in Hinterrhein. Bei den Erprobungen soll die Technologiereife von Angriffs- und Abwehrdrohnen erfasst we ...
Un drone intercepteur WASP testé sur le champ de tir de Hinterrhein.Image: keystone

Ce test révèle les points faibles de la Suisse en matière de drones

Les mini-drones ont bouleversé la conduite des opérations militaires. La Suisse souhaite s'y adapter: elle a créé une force opérationnelle et testé la semaine dernière plusieurs systèmes dans les Grisons.
28.12.2025, 07:0028.12.2025, 07:00
Peter Blunschi
Peter Blunschi

La tension est palpable sur le champ de tir de Hinterrhein. Dans quelques instants, un drone noir en forme de missile va décoller, suivi par un drone orange identique. Sa mission: intercepter et «détruire» le premier, du moins de manière simulée. Ces essais visent à évaluer le potentiel de drones suisses, tant offensifs que défensifs.

Au cours des deux semaines précédant Noël, des systèmes de sept fabricants ont été testés sur le terrain militaire du col du San Bernardino. Parmi eux figurait celui de la start-up ENS Dynamics, fondée il y a tout juste un an à Zoug, et dont les essais se sont déroulés en présence des médias. Mais les deux tentatives échouent: à chaque fois, le drone orange manque largement sa cible.

Mock-Ups von Abwehrdrohnen, aufgenommen bei einer technischen Erprobung, am Mittwoch, 17. Dezember 2025, in Hinterrhein. Bei den Erprobungen soll die Technologiereife von Angriffs- und Abwehrdrohnen e ...
Les drones d'ENS Dynamics sont fabriqués à l'aide d'une imprimante 3D et coûtent plusieurs milliers de francs.Image: keystone

Un échec, donc? Pas nécessairement. Les ratés ont été délibérément prévus par la Task force Drone de l'Office fédéral de l'armement Armasuisse. Selon un communiqué de presse, ces tests ont permis de déterminer «quelles technologies sont déjà opérationnelles, où se situent les limites et quels aspects l'industrie doit encore développer».

Moins de dépendance à l'étranger

La Suisse est considérée comme un pays de pointe dans la technologie des drones. L'objectif de la Task force Drone est de mettre à profit ce savoir-faire pour le développement et la production d'engins nationaux, «notamment afin de réduire la dépendance à l'étranger», a expliqué le directeur général Kai Holtmann. Parallèlement, cette technologie connaît actuellement un développement rapide.

Cela se manifeste de manière flagrante dans la guerre en Ukraine, devenue un véritable conflit de drones. Comme l'a déclaré Andrea Marrazzo, responsable du Centre suisse des drones et de la robotique au Département fédéral de la défense (DDPS):

«Les drones ont transformé le champ de bataille»

En réaction à cette évolution, le DDPS a créé en juin 2024 la Task force Drones.

Le Parlement fait pression

Les défis sont considérables. L'Ukraine produit environ 4,5 millions de drones par an, et les cycles de développement y sont «extrêmement courts», explique Kai Holtmann. La prise de risque y est donc très élevée: en clair, l'usage de nouveaux systèmes s'accompagne de pertes assumées. L'armée suisse, elle, ne peut se le permettre.

C'est pour cette raison que des tests sont nécessaires, et le champ de tir de Hinterrhein, dans les Grisons, situé à 1600 mètres d'altitude et entouré de hautes parois rocheuses, constitue un lieu idéal. La classe politique a également pris conscience de la nécessité d'agir: lors de la session d'hiver, le Parlement a transmis une motion demandant au Conseil fédéral de prendre des mesures «immédiates» contre les attaques de drones.

An engineer assembles FPV drone of "General Cherry" company at the workshop in Ukraine, on Dec. 4, 2025. (AP Photo/Evgeniy Maloletka)
Russia Ukraine War Interceptors
Ici, une unité de production de drones en Ukraine.Image: keystone

Une première étape pour la Suisse

Le ministre de la Défense, Martin Pfister, a accueilli favorablement la démarche. En effet, des mini-drones ont également été observés au-dessus d'infrastructures stratégiques en Suisse. L'urgence de la situation remet en question les procédures habituelles d'acquisition de systèmes d'armes, dont les processus à long terme ne sont pas adaptés aux drones.

Le DDPS n'acquerra pas les appareils en une seule fois, mais en plusieurs commandes successives, afin de suivre l'évolution de la technologie, a expliqué Andrea Marrazzo en ajoutant:

«Cela nécessite de la flexibilité, y compris au Parlement»

Surtout, la production nationale de drones doit d'abord être lancée. Les essais au col du San Bernardino ne constituent au mieux qu'une étape intermédiaire dans ce processus.

Exportations vers les pays de l'Otan

Alexander Ens, fondateur et CEO d'ENS Dynamics, s'est montré reconnaissant devant les médias malgré des résultats plutôt modestes, saluant l'opportunité offerte par Armasuisse. Sa société n'avait jamais pu tester ses drones WASP dans des conditions aussi optimales. Ces appareils sont fabriqués par impression 3D, pour un coût unitaire de plusieurs milliers de francs.

Les missiles «classiques» sont de loin plus coûteux. Et leur prix pourrait encore baisser en cas de production de masse. Alexander Ens et ses collaborateurs n'en font pas mystère: ils envisagent d'exporter leurs drones à moyen terme, notamment vers des pays de l'Otan, le marché suisse de l'armement étant (trop) restreint.

De grands obstacles en vue

Le problème réside dans les règles d'exportation restrictives de la Suisse, ont expliqué les intervenants lors de la rencontre avec les médias. Le Parlement les a assouplies durant la session d'hiver, mais le projet reste en suspens. En raison d'un référendum lancé par la gauche et les Verts, il devra probablement passer par une votation populaire, dont l'issue est incertaine. Une solution possible serait l'exportation en tant que biens à double usage (dual-use).

Dans le cas des drones ENS, cela impliquerait qu'ils soient livrés sans explosifs. Mais cela relève encore de la spéculation. Pour l'instant, les systèmes doivent d'abord démontrer leur efficacité sur le champ de bataille. Onze drones différents ont été testés à Hinterrhein. «Ils ont bien performé, mais pas parfaitement», a conclu le directeur de la Task force Drones, Kai Holtmann.

Il existe donc une marge de progression. La topographie exigeante demeure un obstacle majeur: elle complique notamment la liaison avec les satellites GPS, tout comme les conditions météorologiques souvent instables. Autrement dit, alors que la guerre des drones est depuis longtemps une sombre réalité en Ukraine, plusieurs obstacles de taille restent à surmonter avant qu'une production suisse autonome ne devienne réellement opérationnelle.

Traduit et adapté par Noëline Flippe

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