Taylor Swift sabote la lutte contre le surtourisme en Italie
Les habitants de Portofino peuvent dire «merci mais non merci» à Taylor Swift. Quand la chanteuse entonne «That view of Portofino was on my mind…» dans son titre Elizabeth Taylor, issu de son album The Life of a Showgirl sorti début octobre, personne n’aurait imaginé que cette petite phrase allait déclencher un tel raz-de-marée de recherches.
Et pourtant… Selon certaines plateformes spécialisées dans les voyages, comme Travel Republic, les recherches Google pour «Portofino» ont bondi de 1329% dans les jours suivant la sortie de l’album. Une phrase, un village, et Taylor casse (encore) l’Internet mondial.
Pourquoi tant de hype?
D’abord, Portofino avait déjà un joli CV. Il y a fort longtemps que le village de pêcheurs était devenu un haut lieu villégiature pour la jet‑set, avec ses maisons colorées, ses yachts, ses influenceurs en perdition, et tout ce qui va avec. Mais la mention dans une chanson par Taylor Swift a injecté un second souffle à ce spot de carte postale.
Pour les habitants et les gestionnaires de la commune, le sourire est toutefois un peu crispé. Car si on parle de +1300% de recherches, ça ne signifie pas automatiquement +1300% touristes tout de suite. Le calcul est simple (même pour les quiches en maths): facile de connaître un pic de +1300% si la base de recherches de départ était modeste.
Mais le ton est donné, et dans un cadre déjà fragilisé par le surtourisme, ce genre de coup de projecteur peut vite se retourner contre les locaux. Car ce n'est pas forcément les touristes aisés, ceux qui dépensent le plus, qui risquent de venir en masse grâce, ou à cause, c'est selon, de Taylor Swift.
Un village qui n’avait pas besoin de Taylor
Portofino, comme de nombreux paradis instagrammables, souffre déjà d’un embouteillage constant de visiteurs. Ruelles étroites, troupeaux de touristes venus juste pour la journée... Alors, quand les plateformes de voyage et les moteurs de recherche se mettent à clignoter «Portofino», les pouvoirs publics froncent les sourcils.
Et ça tombe bien: ils avaient déjà commencé à mettre des garde‑fous, avec par exemple l'interdiction de s'arrêter de manière prolongée dans les zones très fréquentées du village, traîner des valises, du matériel de pique-nique ou des enceintes portables dans les lieux publics, se promener en maillot de bain ou torse nu, prendre des selfies dans certaines zones, etc.
Le décor est donc planté, avec le glamour à l’américaine d’un côté, et la réalité locale avec ses limites face aux «one-day-trip» touristes de l’autre. L’«effet Taylor» (oui, on l’appellera comme ça) est un cas d’école: dès que la pop culture s’emballe pour un lieu, ce dernier change de dimension, souvent plus vite que prévu, sans avoir le temps de s’adapter (ou de mettre Taylor et les touristes dehors). A Portofino, l’équilibre était déjà délicat.
Si on pousse un peu la réflexion (oui, je me lâche), on peut se poser la question: est‑ce qu’on visite Portofino parce que Portofino est un bled italien merveilleux qui donne envie de manger des pâtes avec du Montepulciano en chantant du Eros Ramazzotti à tue-tête? Ou parce que Taylor Swift, dont on ne sait pas si elle est déjà allée là-bas, a mentionné son nom dans un couplet?
Les habitants, eux, n’ont pas forcément signé pour devenir une étape TikTok pour fans en PLS. Peut-être que la hype redescendra vite... En attendant de voir, on se réjouit que l’artiste mentionne l'inénarrable beauté d’Yverdon dans un prochain tube.
