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Les Ukrainiens peinent sur terre, mais triomphent en mer

A general view over a part of the port with grain silos and Comoros-flagged cargo vessel Kubrosli Y mooring while UN Secretary-General Guterres (not pictured) visits to the Odesa grain port, in Odesa, ...
Le port céréalier d'Odessa, en Ukraine, le 19 août 2022.Image: Keystone

Les Ukrainiens peinent sur terre, mais triomphent en mer

L'Ukraine a remporté des succès en mer Noire, mais son offensive terrestre s'est essoufflée. Sur certaines parties du front, Kiev semble avoir perdu l'initiative.
21.10.2023, 16:2921.10.2023, 17:48
Kurt Pelda, Odessa / ch media
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C'est l'été indien à Odessa, la plus grande ville portuaire ukrainienne sur la mer Noire. Là où, au début de la guerre, des barricades et des rouleaux de barbelés barraient encore la route, des familles flânent désormais sur les pavés et dans les vastes parcs de la ville.

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Depuis peu, on peut à nouveau se rendre dans le centre historique jusqu'à l'escalier Potemkine, à quelques minutes à pied du célèbre opéra. Mais on ne peut toujours pas y accéder, car il descend vers le port, qui reste une zone interdite.

Une ruine calcinée

L'escalier d'environ 140 mètres de long a été construit dans la première moitié du 19ᵉ siècle, selon les plans de l'architecte italien Francesco Boffo, qui avait fait son apprentissage au Tessin. Il est devenu mondialement célèbre grâce au film de Sergueï Eisenstein Le Cuirassé Potemkine.

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Dans une scène clé, les soldats du tsar descendent au pas l'escalier qui semble interminable. Ce faisant, ils provoquent un massacre parmi les habitants d'Odessa, qui se solidarisent avec les marins mutinés du cuirassé dans le port.

Péché de construction de l'époque soviétique : l'hôtel Odessa sur le port, bombardé par les Russes.
L'hôtel Odessa sur le port, bombardé par les Russes.Getty Images

Quelques blocs de béton surmontés de barbelés empêchent aujourd'hui l'accès à l'escalier, mais la vue vers le bas est désormais dégagée.

L'architecte Boffo a construit son ouvrage de manière à ce que seuls des paliers soient visibles d'en haut, mais pas de marches. Le regard se porte également sur le port et là, sur l'ancien terminal de passagers, où des missiles russes ont détruit il y a quelques semaines l'hôtel Odessa, alors vide.

Selon les informations de Moscou, elle aurait abrité le centre de commandement de la marine ukrainienne. Aujourd'hui, la tour de l'hôtel n'est plus qu'une ruine calcinée. Peu d'Odessiens regretteront toutefois cette boîte de mauvais goût. L'attaque a été menée en représailles à la destruction du quartier général de la marine russe dans le port militaire de Sébastopol en Crimée.

Les navires vont et viennent

Les médias accordent moins d'attention à la guerre en mer qu'aux offensives terrestres des deux parties. On pense généralement que l'Ukraine n'a pas de marine du tout. Mais ce n'est pas tout à fait vrai.

Port de Odessa
Des pêcheurs au port d'Odessa.Getty Images

Après une promenade le long de la zone interdite du port, on arrive sur la plage près du monument au marin inconnu. Toutes les bandes de sécurité et les panneaux «tête de mort» qui avertissaient autrefois de la présence de mines enfouies dans le sable ont disparu. Les visiteurs sont assis dans un café de la plage et profitent de la vue.

On y voit par exemple un bateau de patrouille ukrainien qui sort du port. Le bateau, équipé de deux tourelles, plonge de temps en temps la proue dans les vagues avant de se redresser.

Un peu plus loin, un cargo qui avait jeté l'ancre en dehors du port est en train de prendre la direction du sud, en direction du goulet d'étranglement turc du Bosphore. Pendant ce temps, un autre cargo, encore plus grand, s'approche de la zone d'amarrage à l'extérieur du port. Il s'agit du vraquier Majesty, long de 190 mètres, qui bat pavillon panaméen. Ce type de navire est idéal pour le transport de céréales.

La donne a changé

Depuis le mois de juillet, lorsque la Russie s'est retirée de l'accord sur les céréales avec la Turquie et l'ONU, une telle vision aurait été difficilement imaginable. Le blocus maritime de la flotte russe de la mer Noire était trop dense et les cargos de céréales évitaient Odessa.

Mais les frappes des Ukrainiens avec des armes guidées et des drones contre la marine russe ont changé la donne. La flotte s'est vue contrainte de retirer de plus en plus de navires de la péninsule occupée de Crimée et de les déplacer vers la partie orientale de la mer Noire. Là-bas, les attaques ukrainiennes sont moins probables.

Le mouvement de sédimentation vers l'est est important, car il réduit l'influence russe dans la partie occidentale de la mer Noire. Or, c'est par cette région que les céréales ukrainiennes doivent être acheminées pour être exportées.

Même si une grande partie est toujours exportée via la Roumanie et l'embouchure du Danube, davantage de navires peuvent désormais faire escale dans les ports maritimes ukrainiens autour d'Odessa pour y prendre leur cargaison.

On estime qu'actuellement, environ 60% des recettes d'exportation ukrainiennes proviennent de l'exportation de céréales. Le déroulement de la guerre maritime a une grande importance économique.

La contre-offensive se présente moins bien

En revanche, la contre-offensive ukrainienne au sud, vieille de trois mois et demi, se présente moins bien. L'objectif déclaré d'atteindre la côte de la mer d'Azov est toujours aussi lointain.

Près de Robotine dans l'oblast de Zaporijia, la principale ligne de front des Ukrainiens, il y a certes une grande brèche dans le front russe, mais les forces de Kiev n'ont pas encore pu s'emparer de la chaîne de collines décisive, la dernière avant la plaine sur la côte.

Au contraire, ces derniers jours, les contre-attaques russes ont même fait reculer quelque peu les Ukrainiens à certains endroits.

Il semble désormais que Moscou tente de détourner les Ukrainiens de leur principale offensive au sud en lançant des attaques à l'est du pays. L'offensive contre la forteresse ukrainienne d'Avdiïvka, qui a pour l'instant échoué au prix de lourdes pertes, sert à cela, tout comme les attaques plus au nord en direction de Liman et Koupiansk.

Les deux parties ont l'air d'avoir beaucoup de mal à traverser les champs de mines ennemis. La plupart du temps, les belligérants n'utilisent les chars de combat que pour soutenir les attaques de l'infanterie. Les duels entre chars de combat sont rares et les véritables batailles de chars n'ont pas lieu.

Livraison secrète de missiles ATACMS

Les hélicoptères de combat russes de type Ka-52 se sont révélés particulièrement efficaces contre les chars ukrainiens. Avec leurs missiles guidés, ils peuvent atteindre et détruire des véhicules à plus de dix kilomètres de distance. Ce faisant, ils opèrent généralement hors de portée des armes antiaériennes ukrainiennes.

La meilleure défense aérienne consiste toutefois à attaquer des hélicoptères parqués au sol. C'est exactement ce qu'ont fait les Ukrainiens en utilisant pour la première fois des missiles américains ATACMS.

Chacun de ces missiles a distribué avec précision 950 petites bombes à fragmentation au-dessus des aérodromes de Berdiansk au sud et de Louhansk à l'est. Si l'on en croit Kiev, neuf hélicoptères russes ont été touchés.

Apparemment, la livraison des missiles s'est faite en secret. Il faudra désormais voir, premièrement, comment les Russes réagiront à ce nouveau renforcement des Ukrainiens. Deuxièmement, le chancelier allemand Scholz doit maintenant décider s'il veut enfin libérer les missiles de croisière Taurus, qui sont comparativement très modernes.

Jusqu'à présent, Scholz s'est toujours caché derrière les Américains, selon la devise: si Washington livre des missiles ATACMS, l'Allemagne peut également libérer des Taurus.

Une nouvelle dynamique à la guerre?

Selon des sources russes, de grandes unités de l'infanterie de marine ukrainienne ont en outre traversé le fleuve Dnipro à Kherson, au sud-ouest. Depuis un certain temps déjà, les Ukrainiens s'y sont installés sur quelques îles.

Reste à savoir si les dernières tentatives ukrainiennes aboutiront à l'établissement d'une tête de pont sur la rive orientale, donc occupée par les Russes.

Si les Ukrainiens s'établissaient sur la rive est, un deuxième front serait ouvert contre les troupes russes qui se battent au sud. Cela pourrait apporter une nouvelle dynamique au cours de la guerre.

Traduit et adapté par Noëline Flippe

L'attaque du Hamas contre Israël, en images
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L'attaque du Hamas contre Israël, en images
Des habitants de la ville d'Ashkelon, dans le sud d'Israël, évacués par la police.
source: ap / tsafrir abayov
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