Société
Etats-Unis

Discrimination positive à l'université: la Cour suprême dit non

La Cour suprême veut mettre fin à la discrimination positive dans les universités

La très conservatrice Cour suprême des Etats-Unis a semblé prête lundi à mettre un terme aux programmes de discrimination positive à l'université. Ce serait un nouveau demi-tour historique après son revirement sur l'avortement.
01.11.2022, 08:1701.11.2022, 11:41
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Lundi, la haute juridiction américaine a consacré, de manière exceptionnelle, près de cinq heures d'audience aux procédures d'admission dans les plus vieilles universités privée et publique du pays, celles d'Harvard et de Caroline du Nord.

Comme nombre d'établissements très sélectifs, elles prennent en compte la couleur de la peau ou l'origine ethnique de leurs candidats dans l'évaluation de leurs dossiers, avec pour objectif est de corriger les inégalités issues du passé ségrégationniste des Etats-Unis et d'augmenter la part des étudiants noirs, hispaniques ou amérindiens dans l'enseignement supérieur.

Légitimes pour les uns, critiquées par les autres

Ces politiques, dites de discrimination positive, ont toujours été très critiquées dans les milieux conservateurs qui les jugent opaques et y voient du «racisme inversé».

Saisie à plusieurs reprises depuis 1978, la Cour suprême a interdit les quotas, mais autorisé les universités à prendre en compte, parmi d'autres, les critères raciaux, en jugeant que la recherche d'une plus grande diversité sur les campus était «légitime».

Etudiants d'origine astiatique

En 2014, le militant néoconservateur Edward Blum a adopté un nouvel angle d'attaque. A la tête d'une association baptisée «Students for Fair Admission», il a accusé les deux universités de discriminer les étudiants d'origine asiatique. Après avoir essuyé plusieurs défaites devant les tribunaux, il s'est tourné vers la haute Cour, profondément remaniée par Donald Trump.

«Les critères raciaux sont un malus pour les candidats d'origine asiatique»
Cameron Norris, avocat

L'un de ses avocats, Cameron Norris, a plaidé lundi en jugeant les programmes d'Harvard «racistes». Les candidats d'origine asiatique, qui ont des résultats académiques nettement supérieurs à la moyenne, seraient plus nombreux sur les campus si leurs performances étaient le seul critère de sélection, a-t-il soutenu.

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Des partisans de la discrimination positive rassemblés devant la Cour suprême des États-Unis alors que les juges se préparaient à entendre les arguments oraux dans deux affaires contestant l'utilisation de la couleur de peau dans les admissions universitaires à Washington, DC, le 31 octobre 2022.Image: keystone

La diversité comme subterfuge

Pour son confrère Patrick Strawbridge, utiliser des critères ethno-raciaux est «intrinsèquement source de divisions» et il faut que la haute juridiction déclare cette pratique contraire à la Constitution.

Leurs arguments ont semblé faire mouche auprès d'une Cour suprême qui n'a jamais été aussi ethniquement diverse qu'aujourd'hui avec deux magistrats afro-américains et une hispanique, mais compte une solide majorité conservatrice (six juges sur neuf).

«Quels sont les bénéfices académiques d'une plus grande diversité?», a interrogé avec insistance le juge noir Clarence Thomas, un détracteur des programmes de discrimination positive dont il a pourtant bénéficié pour étudier à la prestigieuse université de Yale.

Associate Justice Clarence Thomas joins other members of the Supreme Court as they pose for a new group portrait, at the Supreme Court building in Washington, Friday, Oct. 7, 2022. Justice Thomas was  ...
Le juge associé Clarence Thomas lors du portrait de groupe des nouveaux membres de la Cour suprême, dans le bâtiment de la Cour suprême à Washington, le 7 octobre 2022.Image: sda

Harvard a utilisé «la diversité comme subterfuge» pour écarter les étudiants juifs dans les années 30, a pour sa part relevé le juge Neil Gorsuch.

«Utiliser des classifications raciales est dangereux, il doit y avoir un point final»
Amy Coney Barrett, juge conservatrice à la Cour suprême

Amy Coney Barrett a rappelé que la Cour avait elle-même imaginé que ces politiques ne seraient plus nécessaires dans 25 ans.

Améliorer les performances

Les trois juges progressistes ont tenté de défendre le statu quo. Les critères racio-ethniques «ne sont jamais les seuls pris en compte» et les étudiants fournissent ces données «sur une base volontaire», a souligné la juge afro-américaine Ketanji Brown Jackson qui s'est récusée dans le dossier d'Harvard parce qu'elle a siégé au conseil de surveillance de l'établissement.

Si les universités n'ont plus le droit de prendre en compte des critères ethno-raciaux, «la place des minorités va s'effondrer», a ajouté la juge Elena Kagan, en soulignant que les campus servaient «de viviers pour les leaders du pays».

Une telle décision «aurait des effets dévastateurs», a ajouté Elizabeth Prelogar, qui leur a apporté son soutien au nom du gouvernement du président démocrate Joe Biden. Pour elle, la diversité est essentielle dans l'armée, où elle renforce la «cohésion» entre les soldats, mais aussi dans le monde de l'entreprise ou scientifique, où elle favorise «l'innovation».

Des grandes entreprises, dont Google ou General Motors, avaient d'ailleurs écrit à la Cour avant l'audience pour souligner qu'une «main-d'oeuvre diversifiée améliorait leurs performances» et qu'elles piochaient pour la sélectionner dans les viviers d'étudiants sur les campus. La haute juridiction doit rendre sa décision avant la fin juin 2023. (ats/mndl)

Avec ceux qui vivent les micro-agressions
Video: watson
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