«OMG! This is the best day of my life!», réussit à articuler Kimberly entre deux sanglots dans sa robe blanche meringue double crème dégoulinante. Elle sourit à côté d'une pièce montée au diabète et au cholestérol. Kimberly est heureuse d'épouser enfin Cameron, un chirurgien ultra beau gosse avec une grosse voiture et des dents si blanches qu'elles brillent dans le noir.
Pendant plusieurs mois, dans leur banlieue chic, c'est le bonheur. Mais Cameron commence à rentrer de plus en plus tard du travail. Kimberly se dit que ça n'est que parce qu'il travaille dur pour leur offrir de belles vacances à San Cabo au Mexique.
En rentrant après son club de lecture qui s'est terminé plus tôt (Brook, Kelly et Josie ayant bu des margaritas au lieu de lire le livre), Kimberly entend de la vaisselle qui se brise. Sur la cuisinière, Cameron et cette conne de voisine nymphomane sont en pleine action. Si occupés qu'ils ont fait tomber la saucière.
Kimberly court à l'étage, ramasse quelques affaires et, de rage, lance son alliance au visage de Cameron, lui pétant une de ses dents trop blanches. Elle monte dans sa voiture, met Takin' Back My Love de Ciara et Enrique Iglesias très fort et fonce. Loin de ce connard. Feu gaz sur le divorce.
Kimberly - rassurez-vous, elle n'existe pas, c'est un exemple issu d'un téléfilm sexiste - a donc raté son mariage (même si on est tous d'accord pour dire que le raté, c'est Cameron et ses dents de connard). Mais ça tombe bien puisqu'aux Etats-Unis, fêter son divorce est devenu so cool. Elle organise donc une «divorce party» pour enterrer, au sens figuré, ce connard (même si, dans sa tête, elle l'enterre dans la forêt).
A quoi ressemble une «divorce party»? Disons que c'est un peu moins solennel qu'un mariage: le plus souvent, la famille n'est pas présente. Ce sont en majorité les femmes qui s'offrent une telle fête, et on y retrouve les codes de l'EVJF: la tiare made in China sur la tête et l'écharpe «Just Divorced».
Dans ces soirées, les filles s'amusent, rigolent, tentent d'aider la divorcée à «oublier ce connard» en s'envoyant des shots et du gâteau. Sauf qu'il ne s'agit pas d'une pièce montée kitsch avec, à son sommet, un couple en plastique (ou en carton), mais d'une mariée qui, souvent, décapite un bonhomme.
Chez les fêtardes les plus chics, on peut aussi trouver une variante tout aussi chic: le gâteau avec une bite dessus, très populaire déjà dans les enterrements de vie de jeune fille.
Des activités sont également organisées, comme le lancer de hache sur la robe de mariée, ou le petit tour chez les chippendales, histoire de boucler la boucle.
Les Américains sont les champions pour transformer n'importe quel jour en grosse fiesta. Visualisez Halloween: des citrouilles partout. Et durant Thanksgiving? Des dindes partout. Lors de la fête du travail, Labor Day? Des drapeaux partout. Et si LA fête dans laquelle on claque toutes ses économies reste le mariage, pas étonnant que le divorce devienne lui aussi l'occasion de festoyer et de fabriquer des assiettes en carton «I’m divorcing!», des couronnes «Divorced!», des ballons, des gâteaux-pénis...
@stephanieeenr @Jes McCoy @briana mckinish ❤️🔥 #divorced #divorceparty #divorcetok #giftideas ♬ original sound - Stephanieeenr
A noter que les hommes aussi fêtent leur divorce, mais sans y mettre autant de paillettes (ou de penis-cakes). Pour l'heure, ces «divorce parties» restent davantage célébrées par la gent féminine.
La petite sauterie ne s'arrête pas à quelques ballons et une part de gâteau-pénis. Tout comme il y a des wedding planners, il existe des professionnels spécialisés dans les divorces. Des entreprises qui se chargent notamment d'organiser la fête et d'édicter des listes de cadeaux, comme pour les mariages, mais avec les choses qu'il faudra racheter après le partage des biens.
Ils s'occupent aussi de dégoter à Kimberly et aux autres futurs divorcés un bon avocat. Aux Etats-Unis, les divorces sont par ailleurs devenus un tel business que de nombreux cabinets d'avocats paient pour être référencés auprès de ces «divorce planners» et faire partie du package.
Mais à quoi peuvent bien servir ces fêtes? Selon des organisatrices interrogées par France 2, elles permettent de tourner la page, en marquant le coup pour entamer un nouveau chapitre. Et également - point important - de mettre de côté la honte qui entoure l'échec de son union.
Car rater son mariage reste un sujet tabou dans de nombreuses familles. Même si la relation est morte, la quantité de couples qui restent ensemble «pour les enfants», ou pour sauver les apparences n'est pas négligeable, surtout outre-Atlantique.
Si fêter son divorce en grande pompe est devenu so cool aux Etats-Unis, Kimberly et les autres n'ont pas pour autant le monopole: ces événements sont très populaires dans d'autres pays, comme en Chine, par exemple. Mais aussi en Mauritanie, pays où l'islam est la religion d’Etat. Pour la petite histoire, il n’est pas rare de trouver, dans ce pays du nord-ouest de l’Afrique, des gens qui ont été mariés une dizaine de fois.
Finira-t-on par connaître le même engouement pour ces «divorce parties» à l'américaine en Suisse, avec des confettis, des ballons et des pénis-cakes? Peut-être. Rappelez-vous qu'il y a encore quelques années, on ne fêtait pas Halloween, et on n'avait jamais entendu parler de Black Friday. Pour l'instant, c’est la saison des EVJF et EVG qui commence, suivie de celle des mariages... Une chose après l’autre.