Si vous passez trop de temps à scroller sur Instagram et TikTok, vous avez sans doute vu passer des tendances maquillage qui reprennent l'esthétique grunge des années 1990, à la Kate Moss, dans des vidéos courtes et rythmées. Sauf si vous êtes un passionné de tracteurs et que votre algorithme vous montre des reels du dernier modèle de John Deere, mais si c'est le cas, je me demande comment vous êtes arrivé sur cet article.
Bref. Les trends beauté, donc.
Si certains ont bel et bien envahi les rues, les magazines et les réseaux sociaux, à l'instar du barbiecore après la sortie du film éponyme en juillet 2023, d'autres «tendances» présentées comme telles sont à mettre entre d'immenses guillemets.
Au cours des derniers mois, vous avez peut-être entendu parler de la «vanilla girl aesthetic», du «strawberry makeup», de la «clean girl aesthetic», du «mocca makeup» ou encore de la «cosy girl». Des pseudo tendances qui ont eu droit à leur quart d'heure de gloire uniquement parce que des influenceurs ont donné des noms à la con instagrammables à leurs tutos.
Des quarts d'heure de gloire qui se sont même parfois transformés en heure entière de gloire lorsque certains magazines ont décidé de reprendre la «tendance» dans des sujets qui présentent les produits à acheter pour reproduire tel ou tel look «qu'on verra partout» et dont vous n'avez, parfois, jamais entendu parler, jamais vu l'ombre d'un début de bribe de courant d'air sur les réseaux.
Mais comment ont-elles donc pu échapper à votre vigilance, vous qui scrollez frénétiquement dans les reels d'Instagram jusqu'à ce que mort (de votre batterie) s'ensuive? En fait, grâce ou à cause du fonctionnement des réseaux sociaux et de leurs algorithmes, il se peut qu'une «tendance» n'arrive jamais jusqu'à vous, car vous n'avez aucun atome crochu avec le sujet. Dans ce cas, comment se fait-il que certaines de ces vidéos virales soient qualifiées ainsi?
Désormais, tout va si vite qu'une tendance publiée le lundi peut comptabiliser des millions de vues le jeudi avant de tomber aux oubliettes le vendredi lorsqu'une nouvelle tendance émerge, et ainsi de suite.
Un hashtag au nom «fancy», une musique entraînante, une vidéo de huit à trente secondes, et hop! Avec un peu de chance, votre tuto sortira du lot dans le bazar de publications similaires, totalisera des millions de vues et les marques vous enverront un joli colis le mois prochain avec le nouveau mascara X ou le dernier gloss Y à mettre en lumière le temps d'un feu de paille.
Même la manière de réaliser ces vidéos suit une «tendance». Prenons exemple avec ce «messy makeup». Le tuto mélange la «clean girl aesthetic» et le grunge des années 1990, est court, les étapes sont enchaînées rapidement, au son de Perfect (Exceeder) de Mason et Princess Superstar, titre sorti en 2007 et déterré par le film Saltburn qui cartonne en ce moment sur Prime Video.
@daniellemarcan kate moss, messy-worn in makeup > clean girl makeup for 2024. ib @Rowi @Natalie #makeup #beauty ♬ original sound - Classic Tunes 02
@aliciabreuer0 Im struggling with which i prefer more… clean girl makeup or messy grunge for 2024??? #makeup #beauty ♬ original sound - Classic Tunes 02
Si certaines modes vous donnent parfois l'impression d'être extrêmement tendance pendant quelques jours à peine, puis plus rien peu après, c'est justement parce que certaines bénéficient d'une mise en lumière excessive sur les réseaux sociaux ou dans la presse féminine, alors qu'au fond, il s'agit de pratiques relativement niches. Et encore une fois, en fonction du contenu que vous consommez, les algorithmes ne vont pas vous montrer des tracteurs John Deere si vous êtes fan de maquillage, et inversement.
Les tendances sont même devenues parfois si niches que vous n'avez sans doute jamais entendu parler de la vidéo la plus vue en 2023 sur TikTok. On la doit à une certaine @dollievision et son tuto maquillage, qui comptabilise plus de 500 millions de vues.
D'ailleurs, à en croire la presse féminine, le bleu sera sur toutes les paupières, tous les ongles, tous les minois en 2024. C'est ce que prédit la plateforme Pinterest, sur la base des hausses de recherches de produits, de looks ou de tutos de ses internautes:
Vous haussez un sourcil (bleuté)? Vous ne devriez pas. Car comme l'écrit Teen Vogue...
Comment ça, vous n'étiez pas au courant que le mermaidcore, inspiré de l'esthétique des sirènes, avait cartonné l'été dernier...? Décidément, votre algorithme n'est pas à l'affût des «tendances», qu'elles soient niches, instagrammables ou planétaires.
(Nous non plus, on n'était pas au courant pour les sirènes. Fichtre.)