Votre regard a peut-être déjà été happé par son élégante silhouette colorée, détonnante sur les rayons des supermarchés, au milieu des familières canettes rouges et noires. De son nom mystérieux «Y3000», une nouvelle variante du soda le plus célèbre du monde est disponible depuis mi-septembre dans les commerces de Suisse.
Oubliez les très basiques saveurs «cerise», «vanille» ou «citron». Ce nouvel arôme a le «goût de l'avenir», jure la compagnie dans un communiqué. La marque en veut pour preuve cette saveur «unique» (décidément, que de belles promesses) qui a été concoctée à l'aide, on ne sait pas trop comment, de l'intelligence artificielle.
Et pour achever cette immersion dans le futur, un code QR imprimé sur les fesses de la canette permet aux goûteurs les plus courageux d'accéder à un site web plein d'images générées par AI. Si on en croit Coca-Cola, l’avenir sera rose.
Niveau gustatif, par contre, on craint le pire. Que nous laisse augurer l'an 3000? Des notes de «pétrole fouetté»?«Sang de vierge»? «Vin sans alcool»? «Goudron sous la canicule»? «Plastique brûlé»? «iPhone fondu»? «Bois carbonisé»? Ou pourquoi pas... «caca»?
Pour nous en assurer, nous fonçons à la Coop la plus proche nous procurer un exemplaire de cette prometteuse et terrifiante «édition limitée». Prix: 1 francs 10. Bah, si l'expérience se révèle si abominable que ça, on la fera passer en note de frais.
Pour ce plongeon dans un millénaire incertain, une poignée de cobayes de la rédaction accepte de mettre à contribution ses papilles délicates. Dans l'épisode précédent, ces vaillants soldats de l'info s'étaient mis en danger pour différencier le Pepsi du Coca, à l'aveugle.
Sourcils froncés, narines à l'affût, nous trempons solidairement nos lèvres dans ce breuvage de l'an 3000. Et malheureusement pour son look fuschia, pourtant complètement «watson compatible», la dégustation, elle, se conclut en quelques secondes sur un flop. Petit florilège des réactions.
Plutôt que des notes subtiles de pétrole ou de bois brûlé, le Coca du futur ressemble en fait, surtout, à du Coca. Si ce n'est qu'il est plus sucré, plus chimique et plus écoeurant. Un peu comme si on y avait fait mariner une sucette à la fraise pendant une nuit.
Dépourvu du mordant qui fait toute la noblesse d'un Coca-Cola original, Y3000 a ce petit je-ne-sais-quoi d'indescriptible qui ne devrait réjouir que les plus fervents adeptes de fraises Tagada et de Malabar. Notre conseil? Profitez bien de 2023, parce que l'an 3000 s'annonce non seulement fuschia, mais surtout plutôt écoeurant. L'avenir reste à écrire.