C'est la deuxième valeur jamais enregistrée et la plus élevée depuis 2010. Pas moins de 12,8% des assurés ont changé de caisse maladie au début de l'année 2023. Ce qui correspond à environ 1,1 million de personnes. Les jeunes adultes, soit ceux âgés entre 26 et 34 ans, les Suisses romands, où le poids des primes est de toute façon plus important, ainsi que les personnes à hauts revenus se sont montrés particulièrement enclins à ce changement. C'est ce qui ressort d'un sondage représentatif réalisé pour le compte de l'entreprise de conseil Accenture et dont CH Media a eu connaissance.
Comme le montre l'enquête, la part de ceux qui n'ont jamais changé de caisse maladie s'élève désormais à 30%. Et elle devrait continuer à diminuer. Plus de 50% des personnes interrogées indiquent, en effet, vouloir comparer les primes cette année.
Marcel Thom ne veut pas encore s'engager sur un chiffre précis concernant la hausse des primes. Mais elle devrait être plus élevée que la moyenne à long terme de plus 3%. Car outre l'augmentation régulière des coûts, un «besoin de compensation» se fait également sentir. Alors que les primes doivent, en principe, augmenter au même rythme que les coûts, ces dernières années, elles ne l'ont pas fait. Comme l'explique l'auteur de l'étude et spécialiste de la santé, les coûts ont augmenté de 7,4% entre 2020 et 2022, ils n'ont augmenté «que» de 5,9 % sur la même période. Pour lui, la différence de 1,5 point de pourcentage doit être comblée.
La hausse prévisible des primes alimente de plus belle le carrousel des assurances maladie. En effet, pour environ 80% des personnes interrogées, le montant de la prime est le principal critère de changement de caisse. Les autres aspects sont secondaires. Marcel Thom justifie l'augmentation constatée pour le critère de la prime avant tout par la récente et relativement importante hausse des primes de 6,6% en moyenne. «La sensibilité au prix a augmenté», poursuit-il, tout en ajoutant que de nombreuses personnes auraient compris qu'elles pouvaient économiser de l'argent dans ce domaine sans véritable perte de prestations.
Et ce nombre devrait encore augmenter. Selon le sondage, si la prime devait croître de 20 francs par mois début 2024, 29% des assurés envisageraient de changer. Dans le cas d'une hausse de 30 francs ou plus, ce nombre passe à 67%. Les raisons qui empêchent le changement de caisse maladie sont, selon l'enquête, la satisfaction avec le prestataire actuel ou la crainte d'une charge administrative. Mais celles-ci ne sont finalement pas très importantes. Près de deux tiers des assurés changent d'assurance de base en un clic de souris, sur le site Internet du nouveau prestataire ou via un service de comparaison en ligne.
Néanmoins, le changement fréquent de caisse maladie entraîne une augmentation du fractionnement, car l'assurance complémentaire n'est pas aussi facile à changer que l'assurance de base en raison de maladies antérieures ou de contrats de plusieurs années. Selon l'enquête, 22% des assurés ont déjà leur assurance de base et leur assurance complémentaire auprès de deux caisses différentes. Mais cette tendance au fractionnement est aussi alimentée par de nouvelles offres, comme celle du groupe Axa, qui ne propose que des assurances complémentaires et optimise l'assurance de base pour sa clientèle.
En fin de compte, dans le contexte actuel du marché, comme le précise l'auteur de l'étude, «le prix prime sur tout». Et ce, bien que la population locale se préoccupe fortement de sa santé et y mette le montant. Dans l'enquête d'Accenture, 76% des personnes interrogées déclarent investir «activement» dans leur santé, 54% se disent même prêtes à payer pour cela. «Les Suisses et les Suissesses sont des férus de la santé», déclare Marcel Thom.
Les Suisses sont donc à la fois très sensibles à la santé et très conscients des coûts lorsqu'ils choisissent une caisse. Ce qui peut sembler contradictoire au premier abord se résout, en fait, rapidement: en effet, seuls 18% des personnes interrogées estiment que les caisses sont en partie responsables de leur santé.
Un chiffre accablant si l'on considère que les assureurs maladie s'efforcent depuis des années de se positionner en tant que partenaires de santé de leurs clients à l'aide de campagnes publicitaires coûteuses. Selon les personnes interrogées, la responsabilité de leur santé incombe en premier lieu à elles-mêmes, puis aux médecins et autres professionnels de la santé ou encore à la famille et aux amis.
Les caisses maladie ne sont toutefois pas les seules à être mal notées par la population. Seuls 39% des personnes interrogées indiquent que les patients sont au centre du système de santé suisse. Thom estime qu'il y a «encore beaucoup de marge de progression». D'autant plus que la Suisse se paie le deuxième système de santé le plus cher du monde après les Etats-Unis, avec des coûts annuels de plus de 90 milliards de francs.
Les personnes interrogées voient un grand potentiel d'amélioration dans la coordination entre les médecins et les hôpitaux. Seuls 43% sont d'avis que celle-ci fonctionne bien actuellement. Le dossier électronique du patient (DEP), qui pourrait remédier à cette situation, se fait toujours attendre.
(aargauerzeitung.ch)
Traduit et adapté par Noëline Flippe