«Il a été brûlé ici»: Ce Romand a créé un parc d'attractions morbide
Halloween approche et vous ne savez pas trop que faire en cette période pour vous procurer des frissons tout en vous amusant? On a peut-être trouvé le lieu qu'il vous faut. Situé à Laconnex, dans la campagne genevoise, Vooland Island se présente comme une île de l'horreur - ou plutôt, un «cabinet de curiosité axé sur l'occulte» - selon les mots de son créateur, Dominique Thévenoz, 43 ans.
Ce musée à ciel ouvert situé dans le jardin de cet artiste genevois exhibe une multitude d'objets ésotériques ou carrément glauques, provenant de diverses époques et des quatre coins du monde. «J'explique des choses insolites et effrayantes. Ceux qui viennent à Vooland Island sont des adorateurs de fantômes et de pirates», développe Thévenoz.
Si les mots ont de quoi faire frissonner, la voix très joviale du quadragénaire me détend instantanément. Loin d'adopter une attitude glaçante digne de Mercredi Addams, ce créatif atypique ne demande qu'à partager les nombreuses connaissances du monde du paranormal qu'il a acquises au cours de ses multiples périples.
Il faut dire que l'homme a eu plusieurs vies, qu'il a fait fusionner avec une étonnante facilité. De star du rock à tatoueur, il a pérégriné sur les traces de Barbe Noire pour écrire un livre sur la piraterie. Il a ensuite élargi ses recherches sur divers continents.
Des expériences ésotériques
Le monde du paranormal, le Genevois dit l'avoir côtoyé depuis tout petit. «L'homme qui a habité la maison familiale de mes parents a été brûlé pour sorcellerie en 1660, ici, à Laconnex», me glisse-t-il dans un murmure. «A l'époque, on exécutait autant les hommes que les femmes accusés de sorcellerie». Lorsque je lui demande s'il croit aux fantômes, la réponse ne se fait pas attendre:
Téléphones débranchés qui sonnent, verres qui s'éclatent au mur sans raison... La conversation prend bientôt une dimension plus angoissante, quand il nous confie avoir été possédé, aux Caraïbes. «Il y a beaucoup de vaudou, là-bas. Un mauvais esprit m'a emmené au bord d'une falaise, ça a failli mal finir». Une «expérience», dit-il encore, qui l'a profondément «secoué», mais qui ne ternira en rien sa passion pour les phénomènes surnaturels et les histoires sordides.
D'où son initiative de construire, dès 2004, une «île» où se côtoient ses thèmes de prédilection. A savoir le vaudou (du nom du lieu, «Vooland»), la sorcellerie et, bien sûr, la piraterie. Dans ce lieu hors du temps, vous pourrez donc vous promener au milieu de crânes d'animaux, d'instruments de torture, ou encore de mygales et de serpents séchés. On y trouve aussi de fausses tombes (et la vraie tombe de son chat), ainsi que des choses plus malaisantes, comme des fiches sur des tueurs en série suisses, à l'instar de Marie Jeanneret, dite «l'empoisonneuse».
On y traverse des sections plus fun, comme un Escape Game au thème morbide (c'est fun, non?), ainsi que 15 attractions à vivre en réalité virtuelle. Les cabanes hantées vous feront voyager, du Mexique à l'Arizona, en passant par l'Egypte. L'objet préféré du créateur?
L'occulte en Romandie
A travers son fantasque jardin, Dominique Thévenoz tient avant tout à présenter sa région sous un nouveau jour, à travers les mythes et histoires occultes de Romandie. «Genève, à l'époque, était l'une des villes de Suisse où le plus de sorciers et sorcières ont été brûlés», nous avise-t-il. «On avait la dénonciation facile.»
Ces phénomènes locaux, il les a racontés au moyen de treize petits films, produits de façon indépendante, à visionner en toute (in)quiétude dans sa roulotte de médium. L'un est consacré à la piraterie sur le lac Léman. On y apprend que le célèbre corsaire Dantal, qui a sévi dans le coin au début du XVIIIe siècle, a réussi à faire le casse du siècle en arraisonnant le bateau du Duc de Vendôme.
Autre phénomène raconté, qui plonge davantage dans la légende, celui de la Dame Blanche de Meinier, dont l'âme vagabonde hante encore les ruines du château de Rouelbeau, situé dans le terroir genevois. Ces films, produits de façon presque artisanale, ont nécessité un travail de longue haleine. «J'ai fait deux ans de recherche, en lectures, à travers les archives, et en écumant les musées», explique Thévenoz, qui a également récolté des images, créé des sons et autres maquettes pour donner vie à tous ces récits du pays.
Ce penchant pour les trucs bizarroïdes, le Genevois n'en a pas honte. Au contraire, avec Vooland Island, il compte bien attirer un public de tous horizons - et pas uniquement des pélos en manque d'adrénaline. Il faut dire que, depuis quelques années, l'on observe une résurgence d'intérêt pour l'occulte, ou tout simplement pour le sordide - en témoigne l'engouement pour les true crimes retraçant la vie des tueurs en série sur Netflix.
Et ce n'est pas Dominique Thévenoz qui dira le contraire. Selon sa vision, l'humain aime bien se faire peur. Il a besoin de savoir qui il est, dans toutes ses facettes, «même les plus démoniaques».
Les visites proposées à Vooland Island (Genève)
Vooland Island ne vous offrira peut-être pas de quoi vous exorciser, mais il promet en tout cas de ravir les amateurs de légendes locales. Si le lieu est ouvert presque toute l'année (sauf en plein hiver), il tombe à pic pour ceux qui rêvent de se mettre au diapason avec Halloween de façon originale. Pour en profiter, il existe plusieurs options: vous pouvez soit vous inscrire pour une visite guidée de deux heures (en pleine nuit, pour un maximum de sensations), soit pour une escale d'une journée dans cet univers «zombiesque», avec grillades au menu. Les plus courageux peuvent même y dormir.
De quoi traumatiser les courageux visiteurs? «Pas du tout», répond l'artiste dans un grand éclat de rire. «Le jardin est certes déconseillé aux moins de douze ans, mais il accueille de nombreuses familles, et je mets beaucoup d'humour dans mes tours». C'est avant tout un divertissement, qui permet un moment de partage. «Par contre», ajoute Dominique Thévenoz en reprenant une voix plus grave, «de nombreux visiteurs assurent avoir ressenti une énergie très chargée dans mon jardin». Vous voilà prévenus.
- Le site de Vooland Island
- Les familles sont bienvenues, mais le jardin est déconseillé aux moins de 12 ans.
- L'adresse:
Route du Lavoir 11CH
1287 Laconnex