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Ligue des champions: le PSG perpétue une culture de la lose

le PSG perpétue une culture de la lose.
le PSG perpétue une culture de la lose.

Le PSG, ce «club de guignols» qui perpétue la culture de la lose

Après la remontada de Barcelone, l'effondrement de Madrid (3-1) est un nouveau chapitre dans la légende du Paris Saint-Germain et de ses ratages irrationnels. Un club de saltimbanques, dit un expert. Un club ancré dans la tradition du vedettariat à la française, dit un autre. Un club de losers, au fond?
10.03.2022, 18:5511.03.2022, 15:00
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Comme souvent, le débat s'élève sous la plume de Vincent Duluc: «Le PSG ne sait toujours pas comment se construit une équipe, mais il sait très bien comment elle s'écroule. Ce n'est plus un accident, c'est une culture», écrit l'éditorialiste de L'Equipe, marqué par l'effondrement spectaculaire du PSG à Santiago Bernabeu.

De quelle culture parle-t-on au juste? La culture de la lose. La culture de la fête et de la défaite. Une culture de club Med, avec des drôles de zozo (mais peut-on rire de tout?) et des bikinis rikikis, selon la description caricaturale qu'en a fait Daniel Riolo, chroniqueur vedette de RMC, dans un moment de colère:

«Quand ils arrivent au PSG, ils prennent un boulard démesuré. C’est le même problème depuis 10 ans. Ils vont sur Tik Tok, ils font la fashion week. Dans les autres clubs, ils ne font pas ça. Il n’y a qu’au PSG qu’il y a cette bande de guignols»
Daniel Riolo, mercredi soir sur RMC

L'effet Bebel

Fort de ses 64 ans, Didier Roustan confirme les liens historiques qui unissent le PSG au comique troupier. Le journaliste précise dans «L'Equipe du Soir» que, fondamentalement, «le PSG est un club de saltimbanques. L'histoire commence là. C'est créé par Belmondo, tralala boum boum. Par Daniel Hechter, artiste et couturier. Ce n'est pas rationnel. On peut analyser ce club sous tous les angles possibles, mais on ne peut pas comprendre car on est des gens rationnels. Le PSG, lui, repose sur des sables mouvants. Depuis toujours. C'est le seul club au monde qui te fait des flops pareils.»

En 1973, Jean-Paul Belmondo participe au plan de relance du PSG.
En 1973, Jean-Paul Belmondo participe au plan de relance du PSG.

Roustan rappelle que la victoire en Coupe des coupes, le seul trophée européen du PSG (1996), est d'abord le fait d'un tennisman aux origines africaines. «Il a fallu les grigris de Noah pour sublimer tout ça», soupire-t-il.

Noah, c'était le gars qui marchait sur l'eau, qui piétinait les convenances, qui traversait la vie pieds nus en adoptant des allures de fonceur, c'était la posture messianique et les préceptes bon marché, capable de transcender la nation velléitaire en deux vannes et trois notes légères. Mais même lui a perdu la foi, comme il l'a hurlé mercredi dans un post Twitter:

Le contexte français

Après la remontada de Barcelone déjà, puis l'élimination piteuse contre Manchester United en 2019, le PSG était apparu suspect, extraordinairement froussard et vulnérable aux yeux de l'Europe. Ce jeudi matin, il en est la risée.

«Prendre un but onze secondes après l’engagement… Si le Real Madrid avait affronté une équipe U15, cela ne serait pas arrivé. C’est incroyable et embarrassant pour une équipe de ce niveau»
Jamie Carragher, ancienne gloire de Liverpool

Est-ce là encore une question culturelle? Possible. Même sous pavillon qatari, le PSG ne peut s'affranchir totalement d'un contexte historique où, biberonnée aux deuxièmes places magistrales de Poulidor, une partie de la France continue de revendiquer fièrement une passion romantique pour l'accessit, jusqu'à une certaine vulgarité de la victoire.

A la confluence d'une réflexion scientifique et d'une blague potache, un groupe d'étudiants a ainsi créé la Fédération française de la lose (FFL), dédiée aux dérouillées fantastiques de la Gaulle cocardière. «Les Français ne perdent pas plus que les autres, mais ils perdent mieux», raconte un livre qui, sur 240 pages non exhaustives, rend gloire aux actes manqués, aux honneurs perdus et aux retours bredouilles.

Nous en avions parlé avec l'écrivain français Denis Grozdanovitch qui, s'il fut d'abord un excellent joueur de tennis, reste un témoin privilégié d'«une forme d’hédonisme à la française», dont le Paris SG, de Bébel à Neymar, semble porter les germes.

«En Suisse, vous êtes protégé de l’engouement par votre crypto-calvinisme. Ici, nous aimons le brillant, le clinquant. Nous avons un goût très prononcé pour le vedettariat. Un sportif à peu près bon mène une vie de nabab, sort en boîte, et jouit d’un attrait irrésistible. Pourquoi ces jeunes adolescents, élevés dans des valeurs tout de même assez tenaces de bien-vivre telles qu’elles subsistent en France, iraient se mettre en tête de devenir à tout prix le dominant intégral?»
Denis Grozdanovitch

Le syndrome PSG

Paris a donc flanché au moment où il semblait le plus impérial, jeu à une touche et en triangle nimbé de maîtrise totale. Il a d'un seul coup perdu pied, quand celui de son gardien s'est mis à trembler (61e, 1-1). Pas n'importe quel gardien, pourtant: Gianluca Donnarumma n'a jamais entendu parler de Daniel Hechter, il est jeune, fraîchement débarqué d'un pays de winners (l'Italie championne d'Europe) et n'a pas assez de mots en français pour comprendre Riolo.

«Le club aspire tous les joueurs vers ses sables mouvants. Regardez Buffon: il est arrivé à Paris et il a commencé ses cacades»
Didier Roustan dans «L'Equipe du Soir»

Trop choyés, trop préservés, aucune résistance aux chocs et au stress que le championnat de France est incapable de lui fournir, car il est bien trop pauvre pour cela. Résultat: 3 buts en 17 minutes. Triplé de Benzema, un Français en exil. Trois buts comme le PSG n'en avait pas encaissé aussi vite en Ligue des Champions depuis la fameuse remontada de 2017, où il avait perdu 6-1 à Barcelone après une victoire 4-0 au Parc des Princes!

«Le pire, c'est qu'après la boulette de Donnarumma, le PSG était encore qualifié. Comment a-t-il pu s'effondrer à ce point», questionne Olivier Dacourt sur Canal+.

«Il y a une fragilité dans cette équipe, persiste Didier Roustan. Il y a le poids du club, du passé. Marquinhos, Verratti, Di Maria, Kimpembe: tous ces gars ont vécu la remontada et Manchester. Ils sont imprégnés de ces échecs.»

Johan Micoud insiste sur la fragilité de certains joueurs qui, au dessus du lot en général, coulent dans les temps faibles. Il rappelle que ces mêmes joueurs ont gagné des Ligues des champions ailleurs, de Messi et Neymar (Barcelone) à Wijnaldum (Liverpool), sans même évoquer Navas et Ramos (Real Madrid). «C'est donc bien un problème culturel», suggère l'ancien No 10.

Ce raisonnement conduit Vincent Duluc à désacraliser l'erreur de Donnarumma et à prendre de la hauteur d'une plume allègre: «Dans une véritable équipe, dans un cadre collectif solide et au long cours, dans un club où l'effectif serait gouvernable par l'entraîneur, cette erreur n'aurait pas eu ces conséquences.»

L'éditorialiste en tire ses conclusions: «Ce que cette impensable élimination révèle, une fois de plus, c'est que la culture du club est au coeur de l'échec: la culture du PSG est d'accepter que les joueurs soient plus grands que le club, et beaucoup plus grands que les entraîneurs, qui continueront de passer très vite et sans laisser de traces, si Doha ne balaie pas la maison et jusque devant sa porte.»

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