Née le 1er septembre 2015 lors d'un match amical entre Bienne et Lausanne, la Tissot Arena a ajouté une nouvelle date à sa jeune histoire dimanche 16 avril 2023, hier soir donc, lorsqu'elle a été pour la première fois le théâtre d'un match comptant pour la finale du championnat de Suisse. Ça s'est mieux passé pour le club local cette année, puisque s'il avait perdu en 2015 contre Lausanne (2-3), le HC Bienne s'est imposé dimanche grâce à un but de Damien Brunner à sept secondes de la fin (3-2). Voilà les Seelandais à égalité avec les Genevois (1-1 dans la série) en finale, un stade de la compétition qu'ils n'avaient plus atteints depuis leur dernier titre en 1983.
Il y avait quelque chose d'émouvant à voir ce HC Bienne évoluer dans sa «nouvelle» patinoire archi-comble (6562 spectateurs/guichets fermés) pour un titre de champion national; c'était un peu comme si les promesses faites au mariage il y a huit ans se concrétisaient. Dans un couple, c'est en général un bébé qui arrive; cette fois, c'est une finale mais ça veut dire la même chose, c'était un objectif que les deux parties espéraient atteindre et qui s'est enfin réalisé. «Sans la Tissot Arena, il n'y aurait pas de HC Bienne sous cette forme», reconnaît d'ailleurs volontiers le CEO des patineurs, Daniel Villard.
S'il est aussi proche de renouer avec son glorieux passé, c'est parce que le club bilingue possède de grands dirigeants et joueurs, mais aussi une patinoire qui l'a fait basculer dans une autre dimension (tout le contraire de Genève-Servette, englué depuis 20 ans dans des oppositions de toutes sortes pour un nouveau stade et privé de modernisation). Lors de l'inauguration de l'enceinte, Ueli Maurer, alors chef du Département fédéral des sports, avait fait un voeu:
À l'époque, c'est à dire entre la remontée du club seelandais en LNA (2008) et son déménagement dans la Tissot Arena (2015), le conseil d'administration du HCB avait dû injecter un million de francs par an, la faute au manque de ressources générées par l'espace VIP restreint au Stade de glace, une patinoire désuète qui ne séduisait guère les sponsors.
Tout a changé en 2015. D'abord parce que le club est responsable de la gastronomie dans son stade, tous les restaurants étant exploités pendant et en dehors des matches par la société HC Bienne Gastro SA. Ensuite parce que rien qu'avec les loges VIP, le club génère un million supplémentaire par saison. «Le budget s'élève désormais à 17 millions, soit 7 de plus que lors de la dernière saison disputée par le club dans son ancienne patinoire», relève le Tages-Anzeiger. C'est encore loin des grandes équipes de National League (au budget situé autour des 30 millions), mais cela permet au HCB de refaire une partie de son retard. Quand on sait qu'à Genève, Chris McSorley avait l'habitude de dire qu'il lui manquerait toujours au moins un million pour remporter le titre, on peut imaginer ce que sept millions de plus veulent dire pour les Biennois.
Les effets ont aussi été visibles sur la glace, puisque le club entraîné par Antti Törmänen a vécu deux demi-finales consécutives dans les années qui ont suivi son emménagement (2018 et 2019). À quel point ce spectaculaire bon en avant était-il lié à la nouvelle patinoire? Interrogée par Tamedia, la co-présidente Stéphanie Mérillat avait reconnu un «effet déclencheur»:
Le HC Bienne a appris très vite. Ses dirigeants ont affirmé qu'ils n'avaient eu besoin que de deux ou trois ans pour apprivoiser leur nouvelle infrastructure et en tirer tous les avantages, «notamment pour tout ce qui concerne le nerf de la guerre, à savoir le secteur VIP et les loges, a souligné Mme Mérillat. Trois ans, c’est le temps qu’il a fallu pour que le catering tourne au rythme adéquat.»
C'est aussi le temps qu'il a fallu aux Seelandais pour emmagasiner de l'expérience, acquérir confiance et force, beaucoup de force; de celles qui, en 2023, permettent d'arracher la victoire à sept secondes de la fin quand a gâché un avantage de deux buts et qu'on se retrouve dos au mur.