Les médias suisses ont usé à maintes reprises de «la douche froide» ou du «coup de froid» pour évoquer la décision de Zermatt Bergbahnen: celle de barrer purement et simplement l'accès aux skieurs d'élite mondiaux à son glacier cet été.
C'est par le biais d'un communiqué cinglant, paru le 16 avril, que le monde du ski alpin a découvert la nouvelle: «Dès cet été, les équipes de ski d’élite ne trouveront plus de pistes d’entraînement à Zermatt. Nous réévaluerons la situation dans un an.»
Une décision qui apparaît comme une vengeance, ce que dément Markus Hasler, CEO des Remontées mécaniques de Zermatt. Or, il a confié au Nouvelliste que «si tout est tellement mieux ailleurs, ils (réd: les équipes nationales) peuvent aller ailleurs».
Les bénéficiaires de cet improbable imbroglio, ce sont les jeunes skieurs. La relève va pouvoir parfaire sa technique dans des «conditions généreuses», confirme le communiqué de la station haut-valaisanne. Les équipes de jeunes athlètes des clubs de ski, des associations régionales et des centres de performance (réd: NLZ) vont pouvoir s'en donner à cœur joie.
Une décision qualifiée de «stratégique» par les décideurs zermattois. Sauf que dans ce choix dit stratégique, les cadres C et B de Swiss-Ski vont en pâtir et ne pourront pas profiter des infrastructures valaisannes. Envoyer les coureurs à l'autre bout du monde coûte cher, très cher, si bien que même les membres de l'équipe Coupe d'Europe restent ici, sur les neiges helvétiques.
Franz Julen, le président du comité d'organisation des courses zermattoises, a donc tapé du poing sur la table, lui qui est en rogne contre la Fédération internationale de ski (FIS) et le traitement infligé à la station haut-valaisanne par la presse – on se remémore le scandale des pelleteuses longuement traité dans les médias nationaux.
Mais la suppression des courses dans le calendrier de l'an prochain a été la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Un contrat de cinq ans, jusqu'à la saison 2026/27, avait été conclu avec la FIS. Sauf que les huit courses annulées ont pesé dans la balance et le président de la FIS, Johan Eliasch, a décidé de tout simplement supprimer le rendez-vous zermattois.
C'est un gros coup dur pour notre équipe nationale, qui avait un réel avantage sur les autres nations grâce à une piste qui permet la pratique de la descente. Nos descendeurs ont pu s'entraîner pratiquement sans discontinuer avant de lancer la saison, cette année.
Cela avait même créé des remous dans le milieu du ski alpin et nourri de vives critiques, surtout de la part de Marko Pfeifer, entraîneur principal de la Fédération autrichienne de ski (ÖSV). Remonté comme un coucou, il assurait que «les Suisses ont probablement beaucoup plus de kilomètres de vitesse dans les jambes que les autres».
Que vont faire les descendeurs helvétiques? Selon nos informations, le programme des spécialistes de vitesse prévoyait initialement de ne pas partir à l'étranger. Mais le départ est désormais inéluctable. Et pour s'entraîner de manière optimale, seule la station de la Parva, au Chili, peut accueillir les descendeurs. L'Argentine ne peut pas offrir une piste de descente, tout comme la Nouvelle-Zélande – des embouteillages en prévision?
Car Zermatt est bien l'unique piste estivale (en Europe) pour accumuler les kilomètres avec les skis de vitesse aux pieds. Pour les spécialistes de descente, l'été se résume à un chemin de croix pour répéter ses gammes et procéder à des tests de matériel. Mais le séjour peut se transformer en réel cauchemar: l'an dernier, le voyage au Chili avait été difficile pour nos cracks, avec de fortes chutes de neige et l'impossibilité de s'entraîner de manière optimale.
Depuis cette annonce aux relents de vendetta, Swiss-Ski a réagi par l'intermédiaire de Walter Reusser, directeur général:
Reusser conclut que «les conséquences de cette décision pour la préparation de la saison prochaine doivent être analysées tranquillement.»
Si les Rogentin, Murisier, Von Allmen, Monney et Boisset vont devoir paqueter leurs bagages pour pouvoir s'entraîner, les spécialistes de géant et de slalom sont aussi dans la même impasse et n'ont pas de terrain d'entraînement. Mais cela ne change pas grand-chose à l'équation, car les slalomeurs ne faisaient que quatre jours de ski avant de s'envoler de l'autre côté du globe.
Selon nos informations, la décision avait déjà été prise en amont pour les slalomeurs de ne pas se rendre sur les glaciers suisses. L'idée était de ne pas mettre les spatules sur la neige helvétique et de prendre l'avion en direction de la Nouvelle-Zélande, pour s'y entraîner 4 à 5 semaines.