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Retraites: l'UDC semble oublier les idées de Blocher

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L'UDC semble oublier les idées de Blocher et perd sa base

L'UDC semble oublier les idées de Blocher.
Petit à petit, Christoph Blocher semble se retirer et de nouvelles idées émergent à l'UDC.Image: dr/keystone/watson
Le retrait progressif de la figure incontournable de l'UDC et artisan de son succès, marque un tournant pour le parti. Ce dernier semble à la recherche d'une nouvelle identité, se rapprochant ainsi de la droite européenne classique.
11.02.2024, 16:0812.02.2024, 08:09
Patrik Müller / ch media
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L'UDC est un cas unique dans le paysage politique européen. Certes, les médias étrangers la mettent souvent dans le même sac que l'AfD en Allemagne, le FPÖ en Autriche ou le parti Le Pen en France. Mais en réalité, elle se distingue sur un point décisif: l'UDC est (économiquement) libérale sur les questions de politique sociale et financière:

  • Elle mise sur la responsabilité individuelle.
  • Un Etat social allégé.
  • Le libre-échange, avec des exceptions pour l'agriculture.

La plupart des autres partis de droite, qui ont actuellement le vent en poupe dans le monde entier, se comportent ici à la manière des populistes de gauche: ils promettent à leurs électeurs, parmi lesquels on compte un nombre de personnes modestes supérieur à la moyenne, de meilleures prestations sociales, des retraites plus élevées et, de manière générale, que l'Etat s'occupe d'eux. Créer des dettes? Peu importe.

Si l'UDC est devenu le plus grand parti du pays et a progressé lors des dernières élections, ce n'est toutefois pas grâce à ses positions en matière de politique sociale et économique, fortement influencées par Christoph Blocher, entrepreneur actif au niveau international. Mais à un thème qui relie l'UDC à l'AfD, au FPÖ et à Le Pen: la migration. Partout en Occident, ce thème permet de gagner des voix.

Un problème pour les votations

Pourtant, ce n'est pas sur l'immigration qu'il faudra voter en mars prochain, mais sur la politique sociale. La direction de l'UDC a négligé le dossier important des assurances sociales et de la prévoyance vieillesse, bien que cela préoccupe sa base. Celle-ci est maintenant à la dérive. Malgré la position négative de la direction du parti, 57% des sympathisants de l'UDC veulent voter oui à l'initiative syndicale. Officiellement, l'UDC genevoise recommande d'accepter le texte.

Ses défenseurs, au sein du parti, argumentent qu'il faut faire quelque chose pour les retraités, après tout, l'Etat a aussi dépensé des milliards pour tout et n'importe quoi à l'époque du Covid-19, et il y a toujours eu de l'argent pour le sauvetage des banques et l'aide au développement. Cette logique est inhabituelle à l'UDC: on est pour des dépenses supplémentaires de l'Etat de cinq milliards de francs par an – parce qu'il y a assez d'argent pour autre chose.

Un parti divisé?

La direction de l'UDC parviendra-t-elle à faire basculer sa base dans le camp du non d'ici la votation dans quatre semaines. Elle tente – surprise! – avec l'argument des étrangers. La rente complémentaire AVS serait un cadeau de plusieurs milliards aux bénéficiaires de rentes à l'étranger. Il n'est pas certain que cela soit efficace. Si environ la moitié des électeurs de l'UDC votent finalement pour la 13ᵉ rente AVS, ils aideront l'Etat social à réaliser sa plus grande extension depuis l'introduction de l'AVS. Ce serait historique.

Un fossé se creuse entre la «classe politique» interne au parti et les citoyens. Il est encore plus évident en ce qui concerne l'âge de la retraite. En haut, on est pour une augmentation, en bas, on est massivement contre.

L'érosion des positions économiques libérales au sein du parti populaire se manifeste également dans le domaine du service public. Le conseiller fédéral UDC Albert Rösti veut assouplir les directives pour la Poste, qui ne devrait plus distribuer les lettres que trois jours par semaine à partir de 2030. A l'unisson avec les syndicats, l'UDC a déclaré: Il n'est pas possible que la riche Suisse ne puisse plus s'offrir une poste qui garantisse le service du courrier A jusque dans les vallées les plus reculées. Rösti a aussitôt ajourné son dossier, qu'il voulait en fait soumettre au Conseil fédéral mercredi.

Que se passe-t-il actuellement à l'UDC? Faut-il bientôt ajouter à l'attribut «national-conservateur» celui de «social-conservateur» et supprimer celui d'«économiquement libéral»? Ce serait ironiquement une européanisation de l'UDC dans le sens des partis de droite chez nos voisins. La direction du parti tient encore la ligne. Mais à long terme, aucun parti ne peut supporter un conflit entre l'élite et la base. Christoph Blocher, l'inventeur de l'Unikum – qui a permis au parti de devenir e premier du pays –, vient de prononcer son dernier discours à l'Albisgüetli. On verra bien où le parti se dirige s'il se retire encore plus.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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