L'un des principaux reproches formulés dans la campagne de votation sur les deux initiatives de santé est que les fabricants de médicaments, les hôpitaux, les médecins et les caisses maladie empêcheraient toute mesure d'économie et toute réforme. C'est la raison directe pour laquelle les coûts ne cessent d'augmenter.
Cette accusation est au moins partiellement injuste, un exemple récent le montre. Quatre jours après la votation populaire, le Conseil des Etats décide du deuxième ensemble de mesures de réduction des coûts proposé par le Conseil fédéral. Sept mesures sont en discussion. Mais il n'est pas certain qu'elles permettent de réaliser des économies.
Au contraire, il pourrait même y avoir une augmentation des coûts s'il était décidé que les prix des médicaments, en Suisse, peuvent être plus élevés qu'ailleurs. La question se pose donc sérieusement de savoir si, quelques jours après le vote, le Parlement se retrouvera à nouveau sans solutions concrètes.
Des forces du centre-gauche ont réanimé, juste avant la capitulation, une mesure que l'on croyait morte depuis longtemps: l'introduction d'un nouveau fournisseur de prestations. Selon une majorité de la commission de la santé du Conseil des Etats, les «réseaux de soins coordonnés» devraient désormais pouvoir être facturés par l'assurance maladie obligatoire.
La manière dont cette nouvelle structure sera mise en place donne déjà du fil à retordre aux personnes concernées. En outre, les experts de la santé tirent déjà la sonnette d'alarme. Chaque acteur supplémentaire autorisé à facturer via la caisse maladie génère des coûts supplémentaires. Ceux-ci se répercutent à leur tour directement sur le montant des primes.
Les partisans sont convaincus du contraire. Ils souhaitent en effet orienter les personnes souffrant de maladies chroniques ou multiples vers des soins coordonnés. Cela signifie que les personnes concernées reçoivent un plan de traitement supérieur entre les médecins, les soins, les hôpitaux et les autres professionnels de la santé.
Mais c'est là que le bât blesse. Soit les patients sont contraints, soit ils doivent choisir les modèles d'assurance correspondants par le biais d'incitations. Pourtant, ce système fonctionne bel et bien déjà ainsi aujourd'hui. La preuve en est que de nombreux réseaux de médecins ont été créés de leur propre initiative.
En Suisse orientale, à Zurich, mais aussi en Suisse centrale et sur le plateau, ces réseaux se sont établis. Détail cocasse: ils s'opposent à la nouvelle règle de la commission de santé. Ils craignent en effet que cette dernière ne saborde leur initiative personnelle et, dans le pire des cas, ne la détruise.
Pour une fois, toutes les caisses d'assurance maladie sont du côté des réseaux de médecins. Elles attestent que les modèles existants fonctionnent. Les réseaux assument une responsabilité budgétaire, ils ont intérêt à bien faire leur travail. Entre-temps, les patients ont également découvert les avantages: plus de 80% de tous les assurés ont récemment choisi un modèle avec choix limité du médecin, qui favorise les soins coordonnés.
En bref, les réseaux existants ne voient pas l'avantage de la nouvelle règle. «Pour les médecins de réseau, un nouveau centre de facturation signifie plus de travail», explique Anne Sybil Götschi, médecin et présidente de medswissnet, l'association faîtière des réseaux de médecins suisses.
Les caisses maladie déclarent également qu'il est «totalement inutile de charger ce domaine d'une réglementation superflue et même nuisible», comme l'écrit l'association Curafutura. L'administration des réseaux serait rendue plus difficile, car il n'est pas clair qui doit facturer via le nouveau fournisseur de prestations et comment.
Mais le sentiment d'urgence face aux promesses de la votation semble grand. Il est également prévu de s'attaquer aux coûts de la santé par des méthodes discutables. Le Conseil des Etats pourrait faire passer la mesure contre la volonté de la branche. Pourtant, le projet avait déjà complètement échoué lors de la procédure de consultation.
Le Conseil national s'est certes efforcé d'intégrer de meilleures solutions pour renforcer les soins coordonnés dans les mesures de maîtrise des coûts et a organisé trois tables rondes avec les personnes concernées et l'administration. Mais cette dernière n'a pas eu la volonté de s'engager dans de nouvelles voies. La proposition n'a pas été modifiée et le Conseil national l'a rejetée.
Afin d'éviter une éventuelle catastrophe, tous les assureurs, médecins, hôpitaux et autres organisations de santé ont adressé une lettre à ce sujet: le nouveau fournisseur de prestations doit être rejeté.
Cela suffira-t-il? L'attitude défensive du secteur s'inscrit parfaitement dans le schéma esquissé par le centre-gauche, selon lequel toutes les réformes échoueraient en raison de leur résistance.
Pourtant, les solutions pour une meilleure coordination des soins attendent depuis longtemps. Le tarif médical Tardoc, qui attend depuis des années d'être mis en œuvre, permettrait de mieux rémunérer les prestations de coordination et un financement uniforme des prestations ambulatoires et hospitalières (EFAS) favoriserait également la collaboration. Mais la réforme est désormais sur la sellette. Les syndicats et le PS veulent la faire dérailler. La population votera à l'automne.
Et une autre amélioration réelle se fait attendre.
Traduit et adapté par Noëline Flippe