Un millier de personnes ont commémoré les victimes de la catastrophe de Mattmark samedi en Valais. Elle s'est produite il y a 60 ans sur le barrage du lac artificiel du même nom. Le 30 août 1965, un morceau du glacier de l'Allalin s'était effondré et avait enseveli le campement du chantier du barrage. 88 personnes ont perdu la vie, dont 56 Italiens.
Dans son discours, le président du gouvernement cantonal, Matthias Reynard, a cité Aloïs Hauser, l'un des rares témoins:
Aujourd'hui encore, le souvenir de la catastrophe est vivant, a poursuivi Matthias Reynard, «mais on se rappelle aussi très bien de ce qui a suivi». Car à la glace de la montagne s'est ajoutée «la froideur des autorités de l'époque». Le conseiller d'Etat socialiste a évoqué les procédures judiciaires: elles ont conclu à l'imprévisibilité de l'éboulement. Il a aussi rappelé un autre problème:
C'est finalement l'ambassade d'Italie à Berne qui avait réglé la facture.
«La gestion humaine de cette tragédie a été catastrophique», a reconnu le dirigeant valaisan. Le canton du Valais l'assume, à l'inverse de la Confédération: «C'est pourquoi je tiens aujourd'hui à présenter des excuses officielles au nom du gouvernement valaisan». Matthias Reynard s'est adressé à toutes les familles, à tous les proches, «à tous ceux qui ont porté cette douleur pendant six décennies»:
L'émotion était palpable parmi les nombreux proches des victimes présents. «C'est la première fois qu'une autorité présente ses excuses», après 60 ans, a affirmé Domenico Mesiano, président du comité d'organisation de la cérémonie: «Beaucoup avaient les larmes aux yeux».
En Italie, la cérémonie a fait sensation jusqu'au plus haut niveau. Le président, Sergio Mattarella a publié samedi un message - qu'il avait par ailleurs transmis au comité d'organisation:
Il a aussi exprimé la sympathie de toute la République italienne à tous ceux qui se sont unis en mémoire de cet événement douloureux.
Samedi toujours, le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis a posté sur X: «Mon collègue Antonio Tajani (réd. vice-président du Conseil des ministres d'Italie) et moi rendons hommage aux 56 citoyens italiens, 23 citoyens suisses et 9 autres personnes qui ont perdu la vie il y a 60 ans lors de la tragédie de Mattmark». Le conseiller fédéral PLR a publié deux photos: l'une du monument - une croix en pierre avec une couronne, l'autre du lieu de l'accident. Son homologue italien a fait de même.
Mais dans l'après-midi, le tweet des ministres s'est avéré trompeur. La photo datait d'une année précédente. Aucun des deux n'a assisté à la commémoration en Valais.
Le conseiller national valaisan Emanuel Amoos, lui, a bel et bien participé au rassemblement. Il a réagi sur Facebook à l'absence du Tessinois: «J'étais aujourd'hui à Mattmark en tant que conseiller national, mais vous n'y étiez pas». L'élu a souligné que les familles des victimes, les autorités italiennes, dont le ministre Luca Ciriani et l'ambassadeur Cornado, ainsi que les autorités cantonales avaient fait le déplacement.
J’étais présent aujourd’hui à Mattmark, mais vous n’y étiez pas. Les familles des victimes, les autorités italiennes dont le Ministre Monsieur Luca Ciriani, et les autorités cantonales, elles, étaient bien présentes. Nous aurions toutes et tous apprécié votre présence.
— Emmanuel Amoos (@AmoosEmmanuel) August 30, 2025
Le département fédéral des Affaires étrangères ne commente pas l'affaire. Un porte-parole se contente d'indiquer qu'Ignazio Cassis et Antonio Tajani ont souhaité transmettre ensemble un message à propos «d'un événement terrible qui a marqué les relations entre la Suisse et l'Italie».
Soit. Mais selon certaines informations, le Conseil fédéral a manifestement eu du mal à se positionner pour la commémoration. Selon son président, Domenico Mesiano, le comité d'organisation a invité le Conseil fédéral à participer à l'événement et à assumer son patronage dès fin 2024.
La réponse du Conseil fédéral, signée par le chancelier fédéral Viktor Rossi, date du 2 avril et ne compte que dix lignes. Viktor Rossi y regrette qu'aucun membre du gouvernement ne puisse se libérer. Avant d'ajouter ceci: «de plus, nous estimons que cet événement ne peut être placé sous notre patronage». Point barre.
Matthias Reynard l'évoquait dans son discours: à la froideur du glacier s'est ajoutée celle des autorités. Contrairement au Valais, le Palais fédéral n'a manifestement pas beaucoup évolué depuis 60 ans.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker