Pour comprendre pourquoi Neuchâtel a tiré discrètement son épingle du jeu durant cette «Semaine de la vaccination», il faut d'abord rappeler les actions nationales: concerts, tentes vaccinales, people sur papier glacé et boules de Berlin. Bilan à la volée? Quelques piqûres réalisées sur place, des shows de Stress & Co désertés et des pharmaciens en colère d'avoir été écartés de la fête. Même Guy Parmelin a fait une moitié de grimace au moment d'oser un pré-bilan en direct sur les ondes de la Radio télévision suisse (RTS) vendredi matin:
Le coup de grâce? La démission fracassante en cette fin de «Semaine de la vaccination» de Madame OFSP, Virginie Masserey. Un flop annoncé qui se confirme doucement, sans avoir à trop fouiller dans les chiffres.
Seul point positif dans ce quasi fiasco général: un canton romand se distingue par ses actions ciblées et sa communication sobre mais intelligente. Première bonne idée, alors que la Confédération a tout misé sur les «stars» sandwichs, Neuchâtel s'est offert la participation de gens qu'on ne connait pas, mais qui savent.👇
«Nous vous encourageons à vous faire vacciner!»
— Canton de Neuchâtel (@Etat_Neuchatel) November 11, 2021
Près de 400 médecins neuchâtelois se mobilisent en faveur de la #vaccination contre la #COVID19 dans une annonce parue dans le journal @arcinfo dans le cadre de la Semaine nationale de la vaccination.@BAG_OFSP_UFSP @alain_berset pic.twitter.com/oX2VCaLwht
Qu'est-ce qui peut bien pousser le quidam récalcitrant à s'approcher d'une seringue? 400 médecins neuchâtelois réunis sur une seule affiche incitative ou 80 personnalités suisses aussi calées en épidémiologie que vous et moi?
La bonne comm' neuchâteloise souligne d'ailleurs d'autant plus les maladresses successives des campagnes nationales. Infantiliser avec humour plutôt qu'inciter avec sérieux.
Deuxième bonne idée du canton de Neuchâtel durant cette «Semaine de la vaccination»? Offrir un test sérologique à ceux qui hésitent encore à se faire piquer. Une idée qui avait d’ailleurs été proposée par l’expert à Infovac Alessandro Diana, dans une interview pour watson. Comprendre scientifiquement que l'on est vulnérable au Covid-19 peut éventuellement faire tomber les dernières réticences. «Neuchâtel a un budget maximal de 500 000 francs sur les 100 millions de la Confédération», avait annoncé lundi le médecin cantonal Claude-François Robert. Une somme qui servira à rembourser les tests de sérologie qui coûtent 50 francs pièce.
Seule condition à la gratuité du test: se faire vacciner dans la foulée. Si le test est positif, une dose suffira. S'il est négatif, c'est le double. Entre une pluie d'injonctions condescendantes et la mise en place d'une action discrète mais réfléchie, Neuchâtel a choisi. Et pas question ici de prendre les gens pour des abrutis: «Il n’y a aucune volonté de faire la morale à quiconque et nous avons beaucoup de compréhension pour ceux qui ont des doutes sur la vaccination», précisait le conseiller d’Etat neuchâtelois Laurent Kurth dans le quotidien ArcInfo.
Aussi fou que cela puisse parfois paraître, prendre sa population au sérieux, c'est prendre une pandémie au sérieux. Cette semaine, Neuchâtel a décidé de fixer l'ennemi sans cligner de l’œil et de concentrer ses efforts sur une communication à la sobriété qui fait du bien: des spécialistes qui s'unissent, des équipes qui s'activent. Alors que toute l'Europe est à nouveau en train de se barricader pour défier une cinquième vague agressive, l'heure est au sérieux. Et la Confédération a tout à faire.