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Economie

Suisse: voici ce qui «appauvrit et réduit le pouvoir d'achat»

Fotomontage zeigt Kaufkraft Expertin Sarah Lein vor einem Hintergrund eins Einkaufswagens neben einem Gemüseregal im Supermarkt
Une enquête menée par watson montre que de nombreuses personnes ressentent une perte de pouvoir d'achat et se restreignent. Sarah Lein, professeure d'économie, analyse les résultats.Image: keystone / Sarah Lein, montage watson

Voici ce qui «appauvrit et réduit le pouvoir d'achat» des Suisses

L’enquête watson dévoile un malaise économique chez les Suisses. L’experte Sarah Lein détaille les mécanismes qui affaiblissent les finances des ménages.
20.11.2025, 23:2120.11.2025, 23:21
Hanna Hubacher
Hanna Hubacher

L'enquête représentative menée par watson et Demoscope montre que plus de la moitié de la population suisse estime que son pouvoir d'achat a diminué au cours des cinq dernières années, et pour 31% d'entre eux, il a fortement chuté. Sarah Lein, professeure d'économie explique pourquoi c'est le cas, où des mesures politiques sont nécessaires et ce dont les salariés suisses peuvent malgré tout se réjouir.

Les résultats du sondage vous ont-ils surpris?
Sarah Lein: Non. Nous avons connu une inflation clairement mesurable au cours des cinq dernières années. Les prix à la consommation ont augmenté d'environ 7% depuis octobre 2020, et les primes d'assurance maladie ont même grimpé de 20% sur la même période.

«Les salaires ont certes légèrement augmenté, d'environ 5%, mais moins fortement que l'inflation»

Quelles autres évolutions ont contribué à la baisse du pouvoir d'achat?
Ces dernières années, nous avons été confrontés à de nombreuses crises: la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine et la crise énergétique qui s'en est suivie. Nos pays voisins connaissent également une croissance économique très faible. A cela s'ajoutent les droits de douane instaurés par Trump.

«Ce n'est pas un environnement favorable pour l'économie suisse, même si la situation y est meilleure que dans d'autres pays.»
«Tout cela nous a appauvris et a réduit notre pouvoir d'achat»
A propos de l'intervenante
Sarah Lein est professeure de macroéconomie à l'Université de Bâle. Ses recherches portent sur l'économie monétaire, les cycles conjoncturels et l'inflation.
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image: dr

Les personnes âgées ont déclaré plus fréquemment que les plus jeunes que leur pouvoir d'achat avait diminué. A quoi cela pourrait-il être dû?
Les personnes âgées disposent d'un revenu relativement fixe, issu de leur retraite, qui a moins bien suivi l'inflation. Les plus jeunes bénéficient souvent d'une augmentation de salaire plus importante, qui compense partiellement la hausse des prix. De plus, les dépenses liées à la santé sont généralement plus élevées chez les personnes âgées.

Plus de la moitié des personnes interrogées ont indiqué qu'elles allaient moins souvent, voire plus du tout, au restaurant ou au bar en raison de la hausse des prix. Beaucoup économisent également sur les vacances, les vêtements ou ont moins de capacité à mettre de l'argent de côté. Ces changements de comportement sont-ils typiques?
Oui, les gens commencent par réduire les dépenses non essentielles, ce qui est bien documenté scientifiquement. Autrement dit, les besoins fondamentaux, comme le logement, la nourriture, les assurances et l'assurance maladie, sont prioritaires.

«Les dépenses liées aux loisirs, comme les sorties au restaurant ou les vacances, sont mises de côté en premier lorsque la situation économique est tendue.»

60% des personnes interrogées ont déclaré avoir dû puiser dans leurs économies l'année passée pour faire face à l'inflation. Ce résultat devrait-il inquiéter?
Pas nécessairement, même en temps normal, on utilise ses économies. En général, ce sont surtout les personnes âgées qui utilisent leurs économies après la retraite, et ce, même en dehors des périodes de crise.

«Je ne m'inquiéterais que si un nombre croissant de jeunes déclarait devoir puiser dans leurs économies»

C'est exactement ce que montre notre enquête. Les 15-35 ans ont déclaré avoir puisé dans leurs économies presque aussi souvent que les plus de 55 ans.
Ce chiffre me semble très élevé par rapport à d'autres données, il convient donc d'être prudent dans son interprétation. Il serait important de disposer d'une série chronologique pour savoir si ces proportions ont évolué.

Notre enquête a montré que beaucoup de personnes espèrent des solutions politiques: réduire les primes, baisser les impôts, augmenter les salaires. Quelles mesures politiques jugez-vous utiles pour renforcer le pouvoir d'achat?

«Je pense qu'il faut avant tout maîtriser les primes d'assurance maladie»

Nous vivons de plus en plus longtemps et consommons davantage de prestations de santé. Cela signifie que les primes continueront d'augmenter si nous n'adaptons pas le système. Des mesures politiques sont nécessaires, mais elles doivent non seulement redistribuer les coûts, mais les réduire durablement.

«Intervenir politiquement sur les salaires ou les loyers ne serait pas économiquement pertinent. Il faut aussi être transparent: la politique ne peut pas empêcher complètement l'inflation.»

Vous voulez dire que l'inflation est inévitable?
Eh bien, la banque centrale peut certes influencer et atténuer la hausse des prix à moyen terme. Ainsi, la BNS a réussi à limiter l'inflation par rapport à d'autres pays. Mais des chocs comme la pandémie ou la guerre en Ukraine ne peuvent pas être évités par la banque centrale, et l'inflation peut donc augmenter à court terme.

La majorité des personnes interrogées, soit 53%, estiment que les prix continueront d'augmenter dans les années à venir. Quelles évolutions prévoyez-vous pour le pouvoir d'achat dans un futur proche?

«Je suis plus optimiste que les sondés. Je m'attends à ce que l'inflation reste faible en moyenne l'année prochaine»

Actuellement, elle est d'environ 0%, ce qui est positif. De plus, les économistes prévoient une hausse des salaires d'environ 2% l'année prochaine. Avec une inflation proche de zéro, cela représenterait un gain de pouvoir d’achat réel.

«Cependant, les augmentations des primes d'assurance maladie ne sont pas incluses dans ce calcul, et là, il est très probable que de nouvelles hausses se produisent.»

Cela signifie-t-il que, finalement, les ménages ne bénéficient d'aucun gain réel de salaire?
En moyenne, il restera probablement un petit bénéfice. Cependant, le gain de pouvoir d'achat sera un peu moindre, car une partie des augmentations réelles de salaire devra être consacrée à des primes d'assurance plus élevées.

Quel est l'impact observable des attentes pessimistes des consommateurs, telles que révélées par l'enquête, sur l'économie?
Lorsque les consommateurs ont le sentiment qu'ils doivent épargner et être prudents, ils consomment moins. Cela a des effets négatifs sur l'ensemble de l'économie.

«L'incertitude agit comme un frein, et je ne pense pas que nous nous en débarrasserons rapidement»

Traduit et adapté par Noëline Flippe

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