Depuis que Donald Trump a imposé à la Suisse une surtaxe douanière de 39%, l’organisation de promotion des exportations Switzerland Global Enterprise (S-GE) basée à Zurich ne cesse d'être sollicitée par les entreprises suisses, qui demandent des conseils pour savoir quelles règles douanières s’appliquent à leurs produits, et quelles possibilités de contournement existent.
Comme l'explique Orlando Alfonso, directeur d’Exporthelp, un service de la S-GE:
Le nombre de requêtes liées aux exportations vers les Etats-Unis a augmenté de 172% par rapport à un mois moyen de l'année précédente et a donc presque triplé. Ce sont surtout les PME industrielles qui cherchent de l’aide, ce qui n’a rien d’étonnant: après l’industrie pharmaceutique, encore épargnée par les droits de douane, ce sont les horlogers et les constructeurs de machines qui dépendent le plus du marché américain.
Beaucoup de questions portent sur le fait de savoir si un produit suisse est réellement concerné par les taxes américaines. D’autres entreprises soumettent des idées pour contourner les droits de douane et souhaitent en vérifier la légalité. Récemment, les experts de l’exportation ont reçu de nombreuses demandes sur la fixation des prix, indique Orlando Alfonso.
Par exemple: comment la valeur en douane, qui sert de base à la perception des droits de douane, peut-elle être fixée à un niveau plus bas?
Il n’existe pas de réponse simple à cette question, mais il y a une certaine marge de manœuvre. Par exemple, pour le calcul de la valeur en douane, seuls les frais de transport jusqu’au port d'embarquement doivent être inclus, et non la livraison complète jusqu’au destinataire final aux Etats-Unis. Alfonso ajoute:
Pour cela, l’équipe s’appuie principalement sur les informations officielles issues des proclamations ou «executive orders» de l’administration Trump.
Si certaines entreprises et branches suisses sont durement touchées, les perspectives pour l’économie dans son ensemble ne paraissent pas aussi sombres, malgré le montant record de 39% de droits de douane. Le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) prévoit certes un recul du produit intérieur brut cette année et l’année prochaine, mais pas de récession.
Le choc douanier semble moins dévastateur que d’anciennes crises, comme la suppression du taux plancher du franc ou le premier confinement pendant la pandémie de Covid-19. Au printemps 2020, les fermetures imposées avaient paralysé l’économie d'un coup, touché bien plus de secteurs et risqué de déclencher une crise financière.
Aujourd’hui, la situation est différente: les droits de douane ont un effet progressif et ne concernent qu’environ 10% des exportations suisses. Le Seco n’anticipe donc pas, à court terme, une vague de demandes de chômage partiel. A moyen terme, le taux de chômage pourrait certes augmenter, mais cela dépendra aussi de l’accord que le Conseil fédéral pourra négocier avec Trump.
Le Conseil fédéral prévoit de présenter prochainement au président américain une offre «améliorée» pour faire baisser les droits de douane. D’ici là, les exportateurs suisses doivent optimiser leur gestion de la situation. La Switzerland Global Enterprise ne donne pas seulement des conseils immédiats, mais aide aussi les entreprises à réduire leur dépendance au marché américain, par exemple via des partenariats, la création de filiales ou la diversification vers d’autres marchés.
Les perspectives pour la Suisse pourraient toutefois s’assombrir si Donald Trump décidait d’imposer des droits aux géants pharmaceutiques Roche et Novartis, ou s’il parvenait à les contraindre à baisser leurs prix. Dans ce cas, selon le centre de recherches conjoncturelles de l'EPF de Zurich (KOF), une récession serait probable.
Traduit de l'allemand par Anne Castella