
Le cinéma Bio à Carouge.image: capture
La polémique enfle après que le directeur d'un cinéma carougeois a refusé de s'associer au Festival international du film des cultures juives de Genève. Nicolas Walder, candidat de la gauche unie à l'élection complémentaire de septembre au Conseil d'Etat genevois, réagit.
12.07.2025, 07:1112.07.2025, 14:18
Les raisons invoquées par le directeur du cinéma Bio de Carouge pour ne pas s’associer à l’édition 2026 du Festival international du film des cultures juives de Genève (GIJFF dans son acronyme anglais) font réagir. Le média juif français Radio Shalom et la chaîne israélienne i24News ont rendu compte de ce refus suite à la publication d'un article de watson mercredi 9 juillet sur ce sujet.
Dans un courrier envoyé fin mai à la programmatrice du GIJFF, Irma Danon, le directeur du cinéma Bio, Alfio Di Guardo, affirme que «montrer des films se réclamant de la culture juive revient actuellement à prendre position», en faveur d’Israël, comprend-on, et que «le comportement des dirigeants d’Israël jette un voile noir sur toutes les vertus de la culture juive».
Par ailleurs, Alfio Di Guardo dit craindre les réactions hostiles à l'annonce d’une collaboration de son cinéma avec le GIFF. Il s'en ouvrait mercredi à watson:
«Certains pourraient dire qu’on est du côté d’Israël. J’ai déjà été embêté lorsque nous avons projeté au début de l’année Le Brutaliste, qui raconte l’histoire d’un rescapé de la Shoah. On m’a dit à cette occasion que c’était un film de propagande pour Israël.»
Alfio Di Guardo, directeur du cinéma Bio à Carouge
Et d’ajouter: «Je n'ai pas envie que le cinéma Bio soit stigmatisé pour son soutien au gouvernement israélien.»
A quoi Irma Danon, jointe également mercredi, a répondu, marquant son désaccord avec le directeur du cinéma carougeois:
«La culture juive existe depuis des siècles, indépendamment d’Israël, et ce, quoique chacun d’entre nous pense du drame en cours à Gaza. C’est comme si on nous demandait d’abjurer ou de signer des aveux pour avoir le droit d’exister en tant que juifs. On n’exige pas de telles choses d’autres groupes sociaux.»
Irma Danon, programmatrice du GIJFF
Associé à l'artiste JR mondialement connu
Ce vendredi sur son compte Instagram, Marc Berrebi s’insurge contre les arguments du directeur du cinéma carougeois. Ce Genevois d'adoption, juif tunisien de 63 ans né à Tunis, allie «business et poésie», comme l’écrivait Le Temps dans un portrait publié en 2018.
En 2007, avec l’artiste muraliste français JR mondialement connu, il réalisait une exposition géante et illégale de photographies des deux côtés de la barrière de séparation construite par Israël entre la Cisjordanie et l’Etat hébreu à compter de la deuxième Intifada. Des visages arabes et juifs, gens de la rue, religieux des trois monothéismes présents en terre sainte, tentaient d'égayer le mur d’une humanité disparue. Cela se voulait un message d’espoir dans une région meurtrie.
L'exposition de 2007 sur le mur de séparation israélien👇

image: capture
Marc Berrebi le dit à watson:
«Je suis un pacifiste, défenseur de tout temps d’un Etat palestinien aux côtés de l’Etat d’Israël»
Marc Berrebi
Sur son Instagram, ce Genevois d’adoption commence par dire que le cinéma Bio, réputé pour son bel aspect Art déco, est «[son] cinéma» et qu’il s’y rend «toutes les semaines». Quant au Festival international du film des cultures juives de Genève, il affirme qu’il donne lieu chaque année «à des discussions passionnantes et ouvertes».
Les explications fournies par le directeur du cinéma Bio indignent Marc Berrebi:
«Vous n’avez jamais lu que le comportement des dirigeants de la Syrie jetait un voile noir sur toutes les vertus de la culture arabe, ou que le comportement des dirigeants iraniens jetait un voile noir sur la culture perse (…)»
Marc Berrebi
Et d’ajouter:
«Vous n’avez jamais entendu dire qu’on demandait une déclaration de politique étrangère à des membres d’une communauté culturelle ou religieuse»
Marc Berrebi
«Je ne dis pas qu’il pleut quand on me crache dessus»
Marc Berrebi termine son intervention en ces termes:
«Je ne suis pas une victime. Je ne fais pas un post pour me plaindre de l’antisémitisme. Je fais un post pour que ceux qui le cautionnent sachent qu’on les voit. Je fais un post, car je me bats contre le racisme, le sexisme et l’homophobie et que, selon le proverbe yiddish, je ne dis pas qu’il pleut quand on me crache dessus. Je fais un post, car je n’ai pas peur.»
Marc Berrebi
watson a demandé au Carougeois Nicolas Walder son avis sur les raisons données, en l’état, par le directeur du cinéma Bio pour ne pas s’associer à la prochaine édition du GIJFF. L’actuel conseiller national écologiste est le candidat unique des Verts et du Parti socialiste à l’élection complémentaire du 28 septembre au Conseil d’Etat genevois suite à la démission d’Antonio Hodgers. Connu pour ses positions propalestiniennes, il a été par le passé membre du conseil d’administration du cinéma Bio.

Nicolas Walder.image: Keystone
«Je le dis d’emblée, je combats la censure et l’autocensure. Il importe de lutter contre toute forme d’antisémitisme. Les cultures juives doivent pouvoir s’exprimer»
Nicolas Walder
Nicolas Walder nuance: «D’un autre côté, il faut prendre en compte la sensibilité des Carougeois, qui sont horrifiés par les actes de nature potentiellement génocidaire, selon la justice internationale, de l’armée israélienne à Gaza.»
«Dans cette période, ils ne comprendraient peut-être pas qu’on présente positivement la culture juive, malheureusement assimilée par beaucoup aujourd’hui à la politique de Netanyahou»
Nicolas Walder
Nicolas Walder reprend:
«Je peux donc aussi comprendre les craintes du directeur du cinéma Bio, qui a une entreprise à faire marcher. Rappelons-nous que la RTS avait suspendu la diffusion des films avec Gérard Depardieu durant les dernières fêtes de fin d’année pour ne pas heurter les téléspectateurs suite à des révélations décrivant l’acteur en prédateur sexuel.»
Nicolas Walder
Le candidat à l'élection complémentaire au Conseil d'Etat entrevoit un compromis possible:
«Pour autant, je plaide pour une solution qui permette de réunir les parties. A cette fin, il me semble qu’un débat posant la problématique israélo-palestinienne à l’occasion de ce festival serait plus que le bienvenu»
Nicolas Walder
La 15ᵉ édition du Festival international du film des cultures juives de Genève devrait se tenir en mars prochain. Quatre cinémas genevois ont accueilli l'édition 2024.
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