Suisse
immigration

Le PLR veut une taxe de 10 000 francs pour les employés de l'UE

Ce PLR veut une taxe de 10 000 francs sur chaque employé étranger

Simon Michel (PLR) propose une taxe sur l'embauche de travailleurs européens pour contrer l'immigration croissante en Suisse. Une mesure qui suscite des débats au sein du Parlement.
04.12.2024, 05:5604.12.2024, 05:56
Francesco Benini / ch media

Chaque année, les partisans des relations entre la Suisse et l’Union européenne se rassemblent au «Lucerne Dialogue». Lors de l’édition 2024, Simon Michel, conseiller national PLR et dirigeant de l’entreprise Ypsomed, a présenté une proposition pour le moins audacieuse: imposer une taxe de 10 000 francs aux entreprises suisses employant des travailleurs issus de l’UE.

Cette proposition vise à contrer l’initiative populaire de l’UDC contre une «Suisse à 10 millions», qui pourrait drastiquement limiter l’immigration en provenance de l’UE, forçant la Suisse à résilier les accords bilatéraux. Pour Simon Michel, cette initiative est dangereuse et un contre-projet est indispensable.

Il souligne que l’immigration nette, atteignant près de 100 000 personnes en 2023, accentue les tensions sur le marché du logement et sur les infrastructures. Si personne ne conteste le besoin de main-d’œuvre étrangère pour l’économie, la population exprime un mécontentement croissant face à ces chiffres.

Une taxe pour freiner l’immigration

La proposition de Simon Michel s'appuie sur le concept de «contribution de solidarité», dit-il. Soit, une taxe d'immigration: une entreprise suisse qui emploient plus de 250 personnes et qui embauche une personne de l'UE devrait payer 10 000 francs à la Confédération. Les secteurs de la restauration et de l'hôtellerie, qui peinent à pourvoir leurs postes vacants, seraient épargnés. Et bien sûr, la taxe ne serait prélevée que si l'immigration en Suisse est élevée sur le long terme.

Ce principe s’appuie sur des idées émises par des économistes tels que Rainer Eichenberger et Christoph Schaltegger. Ces derniers estiment qu’une taxe sur l’immigration pourrait réduire les flux migratoires. Cependant, Christoph Schaltegger juge le montant de 10 000 francs insuffisant et suggère même de le doubler.

«Celui qui veut adhérer au modèle social suisse devrait être obligé de payer une cotisation»
Christoph Schaltegger

Or, le contre-projet à l'initiative de l'UDC prévoit que ce ne soit pas le ressortissant de l'UE, mais son employeur qui doive s'acquitter d'une taxe.

En complément, Simon Michel propose d’adopter une formule élaborée par l’ancien diplomate Michael Ambühl. Celle-ci prévoit des restrictions d’immigration si la Suisse enregistre des niveaux nettement supérieurs à la moyenne des pays de l’UE. Selon cette formule, seule le Luxembourg connaît actuellement une immigration relative plus importante que la Suisse.

Simon Michel veut assumer le conflit avec Bruxelles

Mais deux questions se posent: comment Bruxelles réagirait-elle à une taxe d’entrée de 10 000 francs? Et pourquoi une telle mesure est-elle nécessaire, alors que l’UE semble prête à offrir une clause de sauvegarde dans le cadre des négociations bilatérales?

«Si l'on veut lutter efficacement contre l'initiative de l'UDC, il faut expliquer à la population quels sont les moyens concrets de réduire une immigration élevée»

Sur ce dernier point, le conseiller national Simon Michel anticipe un conflit avec l’UE, qui pourrait engager une procédure contre la Suisse. Toutefois, il estime que cette procédure prendrait des années et que d’ici là, la taxe aurait rempli son rôle en réduisant l’immigration.

«D'ici là, nous pourrons supprimer la taxe, car l'immigration aura été réduite»

La Suisse assumerait donc un conflit avec l'Union européenne, mais - contrairement à l'initiative de l'UDC - sans mettre en péril les accords bilatéraux. Le président du centre, Gerhard Pfister, avait présenté un plan similaire l'été dernier.

Des avis divisés au Parlement

Le centre politique, à travers son président Gerhard Pfister, soutient l’idée d’une clause de sauvegarde unilatérale. Philipp Bregy, chef du groupe parlementaire du centre, voit dans la proposition de Simon Michel une réponse directe à l’initiative de l’UDC. Le Parti socialiste, pour sa part, reste prudent et souhaite examiner les détails avant de se prononcer.

« Avec sa proposition, le conseiller national Simon Michel reprend la demande du président du centre Gerhard Pfister d'une clause de sauvegarde unilatérale. Celle-ci doit être comprise comme une contre-proposition directe basée sur le modèle Ambühl à l’initiative "Pas de Suisse à 10 millions" de l'UDC.»
Philipp Bregy

Du côté des Verts libéraux, Jürg Grossen invite à attendre les résultats des négociations sur les accords bilatéraux avant d’introduire de nouvelles mesures restrictives. Lisa Mazzone, présidente des Verts, critique vivement l’idée, qualifiant la taxe de bureaucratique et inefficace.

«Le PLR a complètement perdu la raison»
Lisa Mazzone

La présidente des Verts rappelle que la dernière initiative de l'UDC sur la limitation de l'immigration a été rejetée par plus de 60% des voix en septembre 2020. De 2016 à 2021, l'immigration annuelle nette vers la Suisse se situait entre 53 000 et 61 000 personnes. Selon elle, la solution serait d'investir dans les logements abordables et les transports publics pour répondre aux besoins d’une population croissante.

Après une accalmie, la hausse récente de l’immigration nette, qui a atteint 99 000 personnes en 2023, relance les tensions politiques. Simon Michel devra convaincre au-delà des rangs du PLR et du centre pour espérer voir son projet adopté. Pour l’heure, le chemin reste semé d’embûches.

Traduit de l'allemand par Anne Castella

La Suisse va encore plus taxer le tourisme d'achat: voici vos astuces
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
7 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
7
Obi «n'exclut pas» reprendre encore d'autres magasins Migros
La chaîne allemande reprend des sites gérés jusqu'ici par Migros. Elle s'est emparée de trois magasins Do-It du géant orange. Quels sont ses projets en Suisse?

Après des années sous la bannière de Migros, la chaîne allemande de bricolage Obi reprend elle-même les rênes de ses magasins en Suisse. En absorbant plusieurs enseignes Do-It du géant orange et en développant son offre de services, Obi veut s’imposer face à une concurrence sous pression. Mais dans un marché en repli et face à l’essor des plateformes à bas prix, le pari est-il gagnant? Sebastian Gundel, CEO d’Obi depuis 2022, pilote l’expansion de la chaîne allemande de bricolage en Suisse et répond à nos questions.

L’article
7