Les étranges disques colorés pendent au plafond de la serre. Il y en a des roses, des jaunes, des verts. Ils scintillent de mille feux sous le soleil matinal. Mais qu'est-ce que c'est?
C'est ainsi que la start-up lausannoise Voltiris et le canton d'Argovie ont présenté l'infrastructure qui orne depuis peu la serre de tomates du producteur de légumes Meier Gemüse à Rütihof, en Argovie. L'entreprise romande Voltiris veut rendre l'agriculture plus durable en développant un nouveau système d'installation photovoltaïque sous serre «made in Switzerland».
Poser des installations solaires sur des surfaces agricoles n'est pas une nouveauté en soi. Le concept connu sous le nom d'agrivoltaïsme existe depuis les années 1980. Son avantage? Une même surface est exploitée à double.
L'inconvénient, en revanche, c'est que les panneaux solaires absorbent trop de lumière pour certaines plantes, notamment les tomates, qui ont besoin de beaucoup d'ensoleillement. Chaque pourcentage de lumière en moins se traduit par une baisse du rendement. C'est donc là qu'intervient la nouvelle technologie développée par l'entreprise Voltiris.
Le principe rappelle celui des grandes centrales d’énergie solaire dans les déserts de Californie ou d’Espagne: des miroirs concentrent les rayons du soleil sur un point focal au centre, qui sont ensuite transformés en électricité. A Rütihof, ce ne sont pas des miroirs, mais des surfaces colorées qui dirigent la lumière vers un petit panneau solaire au centre - tout en laissant passer les longueurs d’onde rouges et bleues du spectre lumineux, celles dont les plantes ont besoin pour pousser.
«Nous utilisons la puissance du soleil deux fois», explique Dominik Blaser, développeur de produits et cofondateur de Voltiris. De petits moteurs veillent à ce que les réflecteurs s'orientent en permanence vers le soleil.
Selon les calculs de la start-up Voltiris, l’installation devrait produire entre 160 et 180 mégawattheures d’électricité par an. Concrètement:
La question du coût de l’installation est restée sans réponse lors de la conférence de presse. Sans surprise, ni Ruedi Meier, propriétaire de Meier Gemüse, ni les représentants de Voltiris n’ont souhaité s’exprimer sur le sujet. On sait seulement que le canton d’Argovie a soutenu le projet à hauteur de 50 000 francs.
«Cette installation solaire est une avancée concrète pour la transition énergétique», a expliqué Markus Dieth, conseiller d’Etat argovien du Centre. A ses yeux, le projet illustre de manière exemplaire la synergie possible entre agriculture et production d’énergie.
Pour Meier Gemüse, l’objectif à long terme est clair: s’affranchir des énergies fossiles, en particulier du gaz naturel. Le producteur de légumes ambitionne de couvrir, à moyen terme, une part significative de ses besoins énergétiques grâce à ses propres installations. La nouvelle installation de Voltiris fournit 5 à 10% de la consommation totale d’énergie de son exploitation.
A l'avenir, il souhaite produire son énergie autant que possible lui-même. La nouvelle installation de Voltiris couvre actuellement environ un cinquième de la surface de ses serres. Les autres serres seront ajoutées au fur et à mesure.
C'est du moins ce qu'écrivent le canton, le producteur de légumes et la start-up dans leur communiqué de presse. Sur quoi s’appuie une telle déclaration? «Nous sommes les seuls à fabriquer ce type d’installation solaire», assure Dominik Blaser. Certes, un concurrent a développé une technologie similaire il y a quelques années, mais elle n'a jamais été commercialisée.
L’entreprise place beaucoup d’espoir dans son innovation, qu’elle présente comme «un nouvel avenir avec de nouvelles possibilités pour les exploitants de serres». Outre Meier, trois autres producteurs de légumes testent actuellement l'installation. Et Voltiris se tourne déjà vers le centre mondial des serres: les Pays-Bas.
Traduit de l'allemand par Anne Castella