Selon une information révélée par l’émission A Bon Entendeur de la RTS, près de 350 professionnels de la santé, dont de nombreux médecins genevois, ont adressé une lettre ouverte à la direction de Migros pour réclamer la réintroduction du Nutri-Score sur les produits de l’enseigne. Supprimé l’an dernier pour des raisons de coûts jugés trop élevés, cet outil d’évaluation nutritionnelle est pourtant considéré comme essentiel par ses défenseurs.
Un an après l’abandon du Nutri-Score par Migros, la fronde des experts en santé publique s’intensifie. Ce système d’étiquetage, basé sur une échelle allant de A à E et du vert au rouge, vise à renseigner les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des aliments transformés, tels que les céréales, biscuits ou plats préparés. Déployé à l’échelle européenne et adopté par Migros en 2021 pour ses marques propres, il avait été jugé d’une «utilité trop faible au regard des coûts élevés qu’il implique» par la direction du géant orange.
Pour les 344 signataires de la lettre ouverte, cette suppression va à l’encontre des intérêts des consommateurs et de la santé publique.
Première signataire de cette lettre, la Dr. Johanna Sommer, professeure à l’Université de Genève, rappelle les enjeux majeurs liés à la transparence nutritionnelle.
Elle insiste également sur les bienfaits avérés du Nutri-Score, étayés par près de 150 études scientifiques démontrant son impact positif sur la consommation et la prévention de maladies chroniques telles que le diabète, l’arthrose et certains cancers.
L’OCDE va dans le même sens et estime que, si tous les pays européens adoptaient ce système d’étiquetage, deux millions de maladies chroniques pourraient être évitées d’ici 2050. Un argument de poids qui peine cependant à convaincre au-delà des milieux scientifiques.
Loin d’être généralisé, le Nutri-Score peine à s’imposer en Europe. Selon les révélations récentes de Radio France, la Commission européenne aurait renoncé à le rendre obligatoire face à la pression des lobbys agroalimentaires et de pays comme l’Italie, qui défendent la richesse de leur patrimoine gastronomique, incluant des produits mal notés comme l’huile d’olive et le parmesan.
En Suisse, le Parlement a opté pour un «meilleur encadrement» du Nutri-Score, sans pour autant en faire une norme contraignante. Conséquence, plusieurs acteurs de l’industrie alimentaire suisse ont suivi l’exemple de Migros et réduit son application. Le groupe Emmi, premier transformateur laitier du pays, a ainsi diminué la présence du Nutri-Score sur ses produits depuis l’année dernière, tandis que la filière du Gruyère s’y est farouchement opposée.
Dans ce paysage contrasté, Nestlé fait figure d’exception, maintenant l’apposition systématique du Nutri-Score sur ses produits, aussi bien en Suisse qu’à l’étranger. Reste à savoir si l’appel des professionnels de la santé suffira à faire fléchir Migros et à relancer le débat autour de cet outil d’information nutritionnelle.
(sia)