Le nouveau Parlement se réunira dès le mois de décembre. Il retrouvera sur sa route de vieux dossiers, des serpents de mers, comme on dit. La suppression de la valeur locative est l'un d'eux. Le Conseil des Etats s'en saisira. Aucune solution ne semble se profiler, les fronts entre les deux chambres se sont durcis.
Ainsi la commission du Conseil des Etats continuera de défendre la suppression de cet impôt uniquement pour les résidences principales, non pour les résidences secondaires. Et pourquoi donc? Pour éviter que les cantons touristiques ne perdent trop de recettes fiscales. Les cantons de montagne, généreusement dotés en résidences secondaires, ont fait pression sur les sénateurs.
Le Conseil national est d'un autre avis. Seul un changement complet du système a un sens, a jugé une importante majorité de la Chambre basse. Sûrement parce que cette dernière redoute qu'un accord favorisant certains cantons puisse compromettre le succès du projet dans les urnes. Le référendum, en effet, paraît inévitable. Mais avant cela, il faudra que les deux conseils se mettent d'accord.
D'autres points de discorde demeurent entre députés et sénateurs. Le plus important est sans doute celui qui consiste à savoir dans quelle mesure l'on pourra continuer de déduire les intérêts passifs privés. Le Conseil national veut fixer la limite à 40%. Un calcul de la Confédération montre quelle conséquence cela aurait pour son budget et celui des cantons. Pour un taux d'intérêt hypothécaire moyen de 2%, les pertes s'élèveraient à 1,3 milliard de francs. Plus le taux hypothécaire augmente, plus le manque à gagner diminue.
Une majorité du Conseil des Etats ne craint pas les pertes fiscales. C'est pourquoi il veut limiter la déductibilité à 70%. A titre de comparaison, la déduction des intérêts passifs ne peut aujourd'hui dépasser de plus de 50 000 francs le rendement brut de la fortune d'un contribuable. Mais grâce aux faibles taux d'intérêt hypothécaires de ces dernières années, cette limite n'a été que rarement atteinte dans la pratique.
En supprimant la valeur locative, les responsables politiques espèrent notamment rendre l'endettement moins attractif. Plus l'on peut déduire, moins l'on est motivé à rembourser les hypothèques. Une exigence de la gauche est toujours sur la table: elle souhaite que les intérêts débiteurs ne puissent plus être déduits du tout. Il s'agirait alors d'un changement conséquent de système. Mais il coûterait plus cher à certains propriétaires immobiliers que le modèle actuel.
Tous les partis souhaitent un changement de système et s'accordent sur l'obsolescence de l'impôt sur la valeur locative. Les camps ne sont en revanche pas d'accord sur les conditions de sa suppression. Au début, les forces bourgeoises ont soutenu un projet qui rapporterait aux propriétaires. Soit, une suppression de la valeur locative et la déductibilité totale des intérêts passifs. A l'opposé, la gauche préférerait un projet neutre en termes de coûts, voire qui génère des recettes supplémentaires.
Avec autant de partis et de groupes d'intérêts qui se chamaillent, il est presque certain que la session d'hiver ne suffira pas à clore le sujet. Si les propositions de la commission de l'économie du Conseil des Etats passent la rampe, le Conseil national devra à nouveau les examiner. Et ce, sans que la Chambre des cantons n'ait rien concédé au préalable.
Il est également certain qu'un projet coûteux, qui plus est, en faveur des propriétaires immobiliers, aura du mal à convaincre dans les urnes. Le peuple a déjà rejeté deux fois l'abolition de la valeur locative. La question devrait donc rester d'actualité encore un certain temps.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker